Accenture, Capgemini : vous avez dit consultants en stratégie ?

Accenture et Capgemini comptent parmi les sociétés qui revendiquent une activité de conseil en stratégie, au même titre que BearingPoint et Kurt Salmon (et bien d'autres).

Patrick Ferraris, vice-président de la practice transformation digitale chez Capgemini Consulting, et Cédric Vatier, directeur de la stratégie et du développement durable chez Accenture France, répondent aux questions de Consultor sur la crédibilité de leur activité face aux marques historiques de la discipline.

Benjamin Polle
16 Oct. 2012 à 02:00
Accenture, Capgemini : vous avez dit consultants en stratégie ?

"3 à 5% des parts de marché en France"

Accenture a clôturé son exercice 2011-2012 en trombe : le géant du conseil, spin off d’Andersen Consulting depuis 2001, aux 244 000 employés dans pas moins de 120 pays, affichait le 27 septembre un chiffre d’affaires de 27,9 milliards de dollars, en hausse de 9%. Idem pour Capgemini, qui avec ses 10 milliards de revenus en rythme annuel et ses 120 000 collaborateurs ferait en comparaison presque pâle figure. Début août, la société française voyait son chiffre d’affaires semestriel atteindre 5,1 milliards d’euros.

Toutes deux revendiquent des prestations de conseil ultra diversifiées, en organisation, en conception des systèmes d’information, dans l’optimisation des opérations, dans l’aide à l’externalisation, et…en stratégie. « Nous totalisons entre 3 et 5% des parts de marché du conseil en stratégie français », dit à Consultor, Cédric Vatier, directeur de la stratégie et du développement durable chez Accenture France, en se basant sur des analyses de marché menées en interne.

Chez Capgemini, les activités sont structurées en trois branches. D’abord Sogeti (Société pour la gestion et le traitement de l'information), la société d’infogérance à l’origine du groupe : créée en 1967 par Serge Kampf, qui, en mai dernier, a remis son mandat de président du conseil d’administration  du groupe (tout en conservant un statut honoraire). La branche, intégrée au groupe Cap Gemini S.A., comptait pour 15% des activités 2011, contre 79% pour la partie Capgemini, qui regroupe les prestations technologiques et l’externalisation, et 5,3% pour la partie conseil.

« Capgemini consulting est une entité à part au sein du groupe. Elle est dédiée intégralement aux questions de management, de stratégie et de transformation. Elle compte 3 000 consultants à travers le monde (dont 900 en France, ndlr) et exclut toute autre forme d’intégration de système. Nous y proposons à 100% du conseil », assure Patrick Ferraris, vice-président de la practice transformation digitale.

Le cliché des consultants SAP ne fait pas sourire

Le ton est donné : chez Capgemini et Accenture, le cliché des consultants SAP ne fait pas sourire. En un mot, à les entendre, leurs activités de conseil en stratégie sont armées pour faire jeu égal avec les marques dont c’est le cœur de métier. Même si les départements de stratégie au sein des métiers de conseil peuvent être marginaux. Chez Accenture, par exemple,  les recrutements de consultant en stratégie ne dépassent pas 10 à 15 personnes par an en France.

Cédric Vatier« Nous réduisons progressivement un déficit de notoriété spontanée face aux marques les plus connues du conseil en stratégie, même si dans les faits nous effectuons les mêmes prestations que ces cabinets dans les domaines des rachats, des fusions et acquisitions, et du repositionnement de modèle économique. Mais, nous allons plus loin. Nous proposons un accompagnement à la mise en œuvre. Nous ne restons pas uniquement en amont, là où d’autres sont plus présents », argumente Cédric Vatier.

Patrick Ferraris l’assure : être un petit département de stratégie dans une organisation aux prestations très largement diversifiées ne nuit pas à la qualité des prestations proposées. Et peut même être un avantage, par rapport à la transversalité des métiers présents dans le groupe : « La majeure partie des prestations de conseil de Capgemini Consulting ne se mélange pas avec les autres activités du groupe. Quand nous nous chargeons de la transformation des opérations au sol d’une compagnie aérienne, nous sommes dans le registre de la pure réflexion stratégique. D’autres, comme lorsque nous revoyons le modèle de gestion des sinistres d’une grande assurance, prestation particulièrement intensive en système d’information, nous amènent à associer le conseil en stratégie, aux opérations et en IT. In fine, le client décide de ce qu’il attend de nous », analyse l’ancien de Bossard – le cabinet justement intégré au groupe Capgemini en 1999 –, et diplômé d’un master de MIT et des Ponts-et-Chaussées.

« Nous expliquons aux clients que nous sommes compétents pour d’autres sujets que pour l’IT ou l’externalisation pour lesquelles nous sommes les plus connus », dit pour sa part Cédric Vatier.

Ni complexe d’infériorité, ni envie de partir ailleurs, insiste-t-il : « Aucun des consultants que j’ai pu connaître n’a exprimé le souhait de partir dans un autre cabinet. Soit nous mettons un terme à la collaboration, soit nos consultants poursuivent d’autres types de carrière ».

Pourquoi une différence de tarification si forte ?

Pour lui, la comparaison entre sociétés de conseil en management et de stratégie est « un sujet RH vieux de dix ans. C’est has been. On a appris à différencier clairement les métiers. Notre département stratégie a 25 ans. Ce sont des profils différents. Et de toute évidence, nous avons appris à bien gérer de manière différenciée des parcours et des profils distincts ».

Le diable serait-il donc dans les prix ? Le taux de facturation des consultants en stratégie d’Accenture et Capgemini, auprès d’une même clientèle entre le mid-cap et le CAC 40, est bien inférieur aux références les plus élevées.

« Je ne veux pas parler pour les autres, mais en ce qui nous concerne, nous avons un positionnement tarifaire clair, notamment sur les questionnements de transformation digitale (le cabinet publie le biannuel Digital Transformation Review en partenariat avec le Massachusets Institute of Technology depuis janvier 2012, ndlr). De même pour la grande consommation, la beauté et les transports où nos TJM (taux journaliers moyens) sont comparables »,  détaille Patrick Ferraris.

L’un des associés de  Firmconsulting, le site canadien d’aide aux candidats à l’entrée du sacro-saint MBB (McKinsey, BCG, Bain) ne l’entend pas de cette oreille : « Il faut faire la distinction entre ce qui relève du stratégique et de la stratégie. Installer un système d’égouts à New York relevait d’une décision stratégique du maire pour rendre la ville plus attrayante en comparaison de Londres. Pour aussi stratégique qu’ait été la décision du maire, ce n’était pas de la stratégie. Il s’agissait d’ingénierie. Il ne faut pas confondre les projets stratégiques avec la stratégie », écrit-il. Il n'y a pas meilleur prêcheur qu’un ancien dévot : Firmconsulting est tenu par d'ex-consultants des MBB, « first tier » répètent-ils à l’envi.

Par Benjamin Polle pour Consultor, portail du conseil en stratégie-1710/2012

Benjamin Polle
16 Oct. 2012 à 02:00
tuyau

Un tuyau intéressant à partager ?

Vous avez une information dont le monde devrait entendre parler ? Une rumeur de fusion en cours ? Nous voulons savoir !

écrivez en direct à la rédaction !

commentaire (0)

Soyez le premier à réagir à cette information

1024 caractère(s) restant(s).

signaler le commentaire

1024 caractère(s) restant(s).
6 * 4 =

France

  • Vague d’élections d’associés au sein du BCG à Paris
    14/05/24

    La WWOM (Worldwide Officer Meeting) du BCG a procédé il y a quelques jours à 53 élections concernant la région EMEA et l’Amérique du Sud. 6 nouveaux associés rejoignent le bureau de Paris.

  • Dans le conseil, ces candidats qui se risquent au « ghosting »
    10/05/24

    Sur le marché de l’emploi, la pratique de ces candidats à une embauche, déjà recrutés ou sur le point de l’être, qui du jour au lendemain ne donnent plus aucune nouvelle, est désormais bien identifiée. Le « ghosting » a été amplement documenté dans tous les secteurs de l’économie… au point de toucher à présent des microcosmes tels que le conseil en stratégie ? Ponctuellement, oui, disent à Consultor plusieurs partners et recruteurs. Dans un cercle aussi fermé, les risques réputationnels ne semblent pas effrayer certains candidats.

  • L’IA au cœur du 2e roman de l’ex-consultant de Kéa
    07/05/24

    Simulacre, tel est le titre du 2e roman publié par l’alumni de Kéa, François-Régis de Guenyveau. L’ex-consultant de 35 ans, qui a passé près de 8 ans chez Kéa (jusqu’à fin 2022), se voit éditer une nouvelle fois par une maison de la place, Fayard (le premier a été publié chez Albin Michel). Une prouesse pour le jeune auteur inconnu d’un milieu littéraire très fermé.

  • L’ex-boss de Circle veut grandir dans la chanson
    26/04/24

    Il avait quitté Circle Strategy en septembre dernier, annonçant alors des projets dans le domaine artistique, et plus particulièrement musical. C’est chose faite. Augustin Van Rijckevorsel, dit Gus, l’un des cofondateurs (en 2019) et ex-président du cabinet, a sorti il y a quelques jours son premier single, « Rester petit », en tant qu’auteur-interprète.

  • « The (new) place to be » d’eleven
    23/04/24

    Nouveaux locaux pour les équipes du cabinet eleven, créé en 2008 et positionné à la croisée des chemins entre le conseil en stratégie, le digital, la data science et l’IA, qui a tout récemment quitté la place Victor-Hugo pour s’installer sur l’avenue Pierre-Ier-de-Serbie.

  • Ralentissement dans le conseil en stratégie : la France épargnée ?
    22/04/24

    « Les cabinets de conseil en pleine incertitude » pour Les Échos, « des vagues de licenciement et des embauches gelées » pour Le Figaro, « un avenir plus cyclique pour les consultants » selon le Financial Times… Que se passe-t-il vraiment dans le monde du conseil en stratégie ? Immersion, via plusieurs cabinets, dans des terres dont on ne peut dire pour l’instant qu’elles soient « brûlées ».

  • McKinsey : décollage (encore inconnu) pour un associé aéro
    19/04/24

    C’est un partner de près de 13 ans de cabinet qui a quitté McKinsey. Ilan Rozenkopf est spécialisé dans les secteurs de l’aviation commerciale, de la défense et de l’espace. « Je concentre mon travail sur la transformation du business model dans un contexte de rupture de marché et technologique », écrit-il sur son profil LinkedIn.

  • Chief of staff : un métier très consultant-compatible
    15/04/24

    Elle fait office de bras droit du CEO et de chef d’orchestre managérial. La fonction de chief of staff a débarqué en France il y a une quelques années seulement dans le monde de la tech et se développe à vitesse grand V. Un poste taillé sur mesure pour les profils de consultants en stratégie. Six d’entre eux nous font découvrir ce métier couteau suisse qui s’avère aussi un intéressant poste tremplin pour les alumni du conseil.

  • Strategy& : deux départs dans le partnership
    15/04/24

    Après l’arrivée/la promotion de 9 partners en 2023 chez Strategy&, 2 autres associés ont quitté récemment l’entité stratégie de PwC : le partner François Aubry, arrivé en 2022 (qui a rejoint Roland Berger), et le partner Guillaume Charly, depuis 2020 au sein du cabinet (qui ne communique pas pour l’instant sur sa nouvelle destination).

Super Utilisateur
France
accenture, capgemini, kurt salmon, bearingpoint, pricewaterhousecooper, ernst & young, deloitte, kpmg
3229
0
France: Accenture, Capgemini : vous avez dit consultants en stratégie