Alban Neveux, CEO d’Advention : « Pas besoin forcément d’être les plus gros, mais il faut être les plus malins »
85 consultants dans le monde (et 8 partners) dans 6 bureaux, une cinquantaine de consultants en France. Le groupe Advention, créé par des anciens de Roland Berger, de Bain et de Monitor, a trouvé sa place en France et à l’international dans ce secteur ultra-concurrentiel du conseil en stratégie, face aux géants du secteur, et ce, grâce à des leviers « différenciants ». Telle est en tout cas l’analyse d’Alban Neveux, ancien de Bossard-Gemini Consulting et de Roland Berger, l’un des cofondateurs et CEO d’Advention, qui a partagé avec Consultor les spécificités et les ambitions de ce cabinet de 22 ans d’âge.

Consultor : Vous qualifiez votre cabinet de mini multinationale du conseil en stratégie…
Alban Neveux : Nous ne sommes pas des géants, mais notre ADN fait que nous sommes très internationaux quasiment depuis notre création. Le fait d’être un groupe de taille intermédiaire très global, avec un P&L global, constitué de 15 nationalités parlant 19langues, avec trois quarts des projets réalisés à l’international, nous donne ce marqueur fort de grand bureau mondial. À la différence des gros cabinets du secteur qui ont, eux, des bureaux locaux, des budgets locaux, avec des équipes et des activités locales…
Autre spécificité native d’Advention, notre ADN métier axé sur quatre clusters qui représentent 90 % de notre activité, la santé, le consumer, la tech/industrie, et enfin les business services, de grosses poches de croissance économique mondiale. Et nous avons fait le choix de faire pour l’instant l’impasse sur d’autres, comme les services financiers, nous n’avons pas les compétences et/ou il y a des cabinets très spécialisés et compétents, ou le secteur public, très complexe, lourd à gérer, peu rentable en France, difficile à piloter…
25 % de votre activité se passe aussi dans le secteur du PE qui n’est plus au beau fixe depuis 1 an maintenant. À quels défis êtes-vous confrontés sur le sujet ?
Le niveau d’attente des investisseurs a toujours tendance à augmenter et les technologies comme l’IA accélèrent ce phénomène. Il faut donc toujours anticiper de davantage professionnaliser les approches et les méthodologies, ce qui finalement constitue un défi toujours intéressant pour des acteurs du conseil en stratégie comme Advention très impliqués auprès du private equity. Nous découvrons également les PME grâce aux investisseurs dans le cadre des deals…
Vos projets sont centrés sur les stratégies de croissance, qui représentent 50 % des missions, l’amélioration des performances, et les revues stratégiques. Auprès de quels types de clients intervenez-vous ?
Les trois quarts sont des corporate, le dernier quart des fonds d’investissement. Sur le corporate, les deux tiers sont de grandes entreprises comme L’Oréal, Saint-Gobain, Thales, General Electric, Pfizer, Safran… Mais nous avons depuis toujours eu à cœur aussi d’accompagner des ETI de moins d’un milliard de chiffre d’affaires, ou des start-ups – de l’univers de la tech mais pas seulement –, devenues licornes pour certaines, comme Webhelp ou Trigo, car pour nous la richesse économique ne se fait pas uniquement par les entreprises cotées. Nous découvrons également les PME grâce aux investisseurs dans le cadre des deals…
6 bureaux sur 4 continents (Paris, Londres, New York, Vancouver, Dubaï et Shanghai)… Qu’est-ce qui vous singularise par rapport aux gros cabinets en France et à l’international ?
Nous ne sommes pas des bulldozers du conseil, mais des 4x4 agiles. Pas besoin forcément d’être les plus gros, mais il faut être les plus malins. La capacité d’analyse et de discernement n’est pas liée à la taille. Nous proposons une approche de stratégie opérationnelle, « l’actionable strategy », qui apporte à la fois une vision stratégique, mais aussi les solutions pour la mettre en œuvre. Certains de nos clients nous ont confié qu’ils avaient fait appel à des gros cabinets qui ont dégrossi, avec des analyses trop high level, mais qui ne savaient pas quoi en faire ensuite. Pour paraphraser le groupe L’Oréal, j’aime à dire qu’il faut penser en poète et agir en paysan…
Les États-Unis sont le deuxième pôle d’activité du cabinet. Comment un cabinet de taille intermédiaire français fait-il la différence dans cette région ?
L’un de nos éléments différenciants forts, c’est notre multiculturalisme, aux États-Unis comme dans le reste du monde. Nous avons des associés franco-américains, sommes positionnés depuis longtemps là-bas, en échanges quotidiens, très imprégnés par ce continent (comme les autres d’ailleurs) avec en même temps notre culture européenne, à la fois un creuset et un carrefour du monde depuis des millénaires, qui nous donne une très bonne compréhension de ce qui se passe ailleurs.
Comment souhaitez-vous poursuivre votre développement ?
Avec trois axes : international, sectoriel et de métiers. Sur l’international, nous souhaitons avant tout renforcer nos bureaux existants. Et à notre échelle, ce n’est pas rien. Nous envisageons également d’ouvrir à terme un septième bureau à Singapour, le nouvel épicentre asiatique. Sur le sujet sectoriel, il va s’agir de faire grossir nos clusters existants avec des focales plus poussées. Nous faisons par exemple beaucoup de medtech, et nous voulons aller plus loin dans la pharma. Nous allons aussi développer le luxe/lifestyle côté consumer, et le secteur de la tech, une portance puissante qui impacte tout le monde. En termes de métiers, pour faire de la stratégie augmentée, nous avons besoin de plus de RSE, d’Ops, et de digital/IA. Cela va se faire en recrutant des personnes dédiées et en travaillant sur les acquisitions.
Et du côté des people d’Advention ?
Nous sommes aussi différenciants sur ce point. La preuve implacable, notre turnover est d’environ 8 % alors qu’il s’élève à 20-25 % en moyenne dans le secteur. Un indicateur précieux, concret et réel que les consultants ont le sentiment de faire le bon job et de trouver leur équilibre pro-perso. Pour cela, il est important pour nous que les consultants aient des perspectives d’évolution plutôt rapides, au minimum 7 ans pour devenir partner, au maximum 15 ans. Il y a un cadre, cependant nous gardons la plus grande flexibilité lorsque nous estimons que la personne est prête pour une évolution. Autre indicateur, nous avons aussi un taux de féminisation mondial du partnership de 25 % (2 femmes partners à Paris pour 8 associés, ndlr).
Concernant le recrutement, nous souhaitons intégrer une quinzaine de nouveaux consultants dans nos différents bureaux cette année afin d’accompagner notre seule croissance. En dehors des critères classiques de sélection, nous recherchons avant tout des états d’esprit internationaux et collectifs avec une dimension entrepreneuriale forte.
Vous avez également instauré un programme de formation dans la durée, au total de 7-8 ans, pour tous vos consultants…
Au-delà de la formation technique pure, avec différents modules selon les niveaux de séniorité, de la stratégie, à la finance en passant par la supply chain ou la gestion de projets, il sert aussi d’onboarding et d’acculturation. Les consultants sont par ailleurs tous sensibilisés bien sûr à l’IA, une déferlante, qu’il faut savoir utiliser à bon escient. Tout le monde passe impérativement par cette formation, avec des formations essentiellement en présentiel dans nos différents bureaux afin que les gens se connaissent.
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