Oliver Wyman au chevet des réfugiés
Qu’est-ce que le secteur privé peut faire pour favoriser l’intégration des réfugiés en Europe ? Leur donner des opportunités d’emplois, défend le cabinet de conseil Oliver Wyman dont l’initiative d’embauche de réfugiés est ouverte depuis deux ans. Si elle a effectivement conduit au salariat de plusieurs personnes réfugiées en Europe dans différents bureaux d’Oliver Wyman, l’initiative a été beaucoup plus réduite que prévu et se heurte à des difficultés inattendues.
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Juin 2016. Le président Obama appelle le secteur privé à s’engager davantage en faveur de la crise des migrants. Avec 65 millions de personnes déplacées cette année-là, les tensions migratoires atteignent un plus haut historique, selon les données compilées par l’Agence des Nations unies pour les migrants. Une cinquantaine de compagnies privées répondent à cet appel (Airbnb, Google, Facebook, Goldman Sachs, Coursera…). Accenture, McKinsey et Oliver Wyman comptent parmi elles.
Un objectif initial ambitieux
« En 2015, Scott [McDonald, le CEO d’Oliver Wyman] avait fait part de son émotion à propos de la crise des migrants », se souvient Lyndsay Anderson, en charge des ressources humaines au bureau de Dubaï, qui a mis sur pied une approche au recrutement de réfugiés qualifiés au sein du cabinet.
L’objectif est clair et semble atteignable : rendre possible le plus grand nombre d’embauches dans les rangs du cabinet. Mais en septembre 2017, deux ans après avoir lancé son initiative, le même Scott McDonald faisait état d’une dizaine d’embauches, deux dans des fonctions de consultants et sept dans des fonctions support.
Pourquoi si peu ? Les obstacles sont multiples. D’abord, le chemin est semé d’embûches d’un point de vue administratif, à commencer par l’obtention de visas ou de permis de travail. Puis, les organisations humanitaires avec lesquelles Oliver Wyman s’est mis en lien, pour trouver de possibles recrues, ne sont pas vraiment à la recherche de compétences professionnelles lorsqu’elles s’occupent de réfugiés. Elles sont déjà suffisamment dépassées par des missions de premiers secours, de logement ou de soin. Quand bien même par exemple un tiers des migrants qui arrivent aux États-Unis ont un diplôme supérieur.
La porte reste ouverte
Viennent aussi les difficultés à valoriser des acquis académiques ou professionnels dans des zones géographiques où le cabinet n’a absolument pas l’habitude de recruter. « On a rapidement réalisé que ce ne serait pas si simple que cela. C’est un défi d’alimenter la filière de recrutement de réfugiés », résume Lyndsay Anderson.
Pas d’objectifs quantitatifs de recrutements pour l’avenir, mais la porte reste ouverte assure le cabinet qui travaille par exemple avec Transitions, une ONG britannique spécialisée dans l’intégration professionnelle des personnes bénéficiant du statut de réfugiés au Royaume-Uni.
En France, Oliver Wyman développe un autre mode d’action pour aider l’embauche de réfugiés. Le cabinet travaille pro bono pour France Terre d’Asile qui intervient dans les centres d’accueil des demandeurs d’asile (CADA).
Projet pilote avec France Terre d'Asile
« Nous avons proposé un projet pilote à France Terre d’Asile, qui consiste à faire du mentorat professionnel auprès de réfugiés en France, dont le statut a été accordé par l’Office français de protection des réfugiés et qui sont en recherche d’opportunités professionnelles qualifiées », raconte Pierre Boy de la Tour, Principal à Paris.
Il est en charge du pro bono pour Oliver Wyman à Paris, c’est-à-dire les activités philanthropiques du cabinet. Des équipes dédiées s’y consacrent à tour de rôle sur des durées de trois mois et à raison de quatre projets par an pour le bureau de Paris.
Chaque équipe compte un partner, épaulé d’un associate ou d’un engagement manager, à temps très partiel, et un consultant junior à temps complet. Dans le cadre de ce projet pilote, qui n’était pas une mission pro bono à part entière, cinq réfugiés en recherche d’emploi ont ainsi pu être suivis par les consultants d’Oliver Wyman avec l’objectif de les aider à adapter leurs compétences au marché du travail en France.
Ainsi de ce professeur d’anglais en Syrie qui souhaitait retrouver un poste équivalent dans l’Hexagone. « Il n’avait pas le statut pour pouvoir prétendre à un poste d’enseignant. Nous l’avons donc réorienté vers des fonctions de traducteur et d’interprète », dit Pierre Boy de la Tour.
Élargir à des niveaux de qualification moins élevés
Mais là aussi le filon s’est vite tari, faute de compétences suffisamment qualifiées pour lesquelles des conseils en orientation de la part de consultants auraient pu être utiles. Le gros des profils que France Terre d’Asile cherchait à caser se destinait à des positions moins qualifiées. Ce sont ces profils qu’Oliver Wyman veut désormais atteindre dans une version étendue de son initiative, en mettant à profit son réseau de grandes entreprises clientes dont les besoins en recrutement ne trouvent pas toujours preneurs.
Benjamin Polle pour Consultor.fr
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