Une année électorale, sans impact sur le conseil en stratégie ?
Quel a été l’impact de la période préélectorale sur l’activité des cabinets de conseil en stratégie ? Contrairement à l’accoutumée, cette année, c’est business as usual.
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Rien ne semble vouloir freiner les entreprises, dopées par les premiers signes d’une reprise de la croissance après des années de morosité. Alors que les mois précédant les grands rendez-vous électoraux génèrent souvent une forme d’attentisme de la part des acteurs économiques, le premier semestre 2017 n’a pas connu de ralentissement sensible sur le marché français.
À peine la Bourse de Paris a-t-elle marqué un léger frémissement à la baisse quelques jours avant le premier tour du scrutin présidentiel, quand les sondages ont laissé entrevoir la sortie de la France de l’euro en cas de victoire de Marine Le Pen ou de Jean-Luc Mélenchon, avant de s’envoler à la hausse dès le lendemain du premier tour.
Pas d’impact négatif sur le volume de l’activité
Quel a été l’impact de la période préélectorale sur l’activité des cabinets de conseil en stratégie au cours du premier semestre ? Chez A.T. Kearney, « nous n’avons pas observé d’impact cette année, ni les précédentes années électorales, relève le directeur de la communication du cabinet, Thomas Bolac. Cela tient probablement à la nature de notre activité : nous travaillons sur de très gros projets et opérations sur lesquels une élection nationale n’a pas véritablement de répercussion. »
Même constat chez Vertone : « Nous n’avons rien observé de particulier depuis le début de l’année, constate l’un des directeurs, Raphaël Butruille. Peut-être un léger fléchissement depuis une quinzaine de jours, mais il est difficile de juger s’il y a une corrélation avec les élections ou avec les vacances scolaires… Je pense que les entreprises sont très pragmatiques, elles sont habituées à s’adapter constamment aux évolutions des conditions du marché et n’ont pas envie de spéculer. Or si on considère la sortie de l’euro, par exemple, c’est un scénario qui prendrait énormément de temps, et rien ne sert de spéculer à l’avance. »
Chez Advancy, « on s’attendait à ce que les six premiers mois de l’année soient très calmes parce que c’est ce qui avait été observé lors des précédentes années électorales, mais ce n’est pas du tout ce qui s’est produit, témoigne Éric de Bettignies, associé fondateur d’Advancy. Nous avons eu une très belle activité au cours du premier semestre , supérieure à celle de 2016 qui avait été une année record. »
Une tendance qui ne concerne pas les seuls acteurs économiques privés : « Nous avons parmi nos clients des fonds d’investissement proches de la puissance publique, tels que Bpifrance ou la CDC, et nous n’avons pas observé de frilosité ou de prudence particulière de leur part, ajoute-t-il. Ceci dit, je sais que des confrères ont constaté une baisse de l’activité en private equity au cours du premier trimestre, avant un redémarrage en mars au niveau européen, et seulement à partir d’avril en France. Je ne pense donc pas que cela était lié à l’élection française. »
Missions et thèmes « de saison » électorale
À défaut d’impact sur le volume de l’activité, le contexte électoral a-t-il une influence sur la nature des missions confiées aux cabinets de conseil en stratégie, en fonction de l’issue plus ou moins favorable du scrutin ? « Non, nous n’avons pas eu de missions ni été sollicités pour des travaux spécifiques de moyen terme visant à préparer un éventuel scénario catastrophe, reprend Éric de Bettignies. Tout ce que j’ai pu observer est une petite agitation au cours des deux dernières semaines, pendant lesquelles certains acteurs ont étudié des scénarios de transfert de fonds très rapides en cas de blocage des changes, mais il ne s’agissait que de petites couvertures de prudence, sans impact sur l’activité elle-même. »
Du fait de son potentiel contrecoup sur l’économie, ce grand rendez-vous quinquennal demeure néanmoins un sujet dont les consultants peuvent être amenés à discuter avec leurs clients. Et ce, d’autant plus que « les périodes préélectorales sont propices à des prises de conscience à l’égard de certaines problématiques économiques et sociales, souligne Raphaël Butruille. Cette année, par exemple, les débats ont porté, entre autres, sur le fait que la mondialisation profite essentiellement aux métropoles au détriment des petites villes françaises, qui meurent petit à petit. Or c’est une problématique qu’il convient d’intégrer dans ses réflexions quand on travaille pour un client qui a une forte assise en région. »
Et si de façon générale, « nous ne parlons pas de politique avec nos clients, relève Éric de Bettignies, cette année le monde des affaires était inquiet de cette radicalisation du vote vers des personnes qui ont des programmes économiques extrêmement incertains. »
La vie du cabinet à l’heure des urnes
Quid de l’impact des élections présidentielles sur la vie interne des cabinets de conseil ? Les discussions et commentaires sur l’actualité politique sont-ils autorisés autour de la machine à café ? « Oui, bien sûr. Au même titre que tous les évènements importants, les grands rendez-vous politiques animent les conversations, d’autant plus que cette année, le feuilleton de l’élection présidentielle valait bien une série sur Netflix… », plaisante Raphaël Butruille.
Pas de tabou quant aux orientations politiques des uns et des autres ? « Non, cela ne pose aucune difficulté, nous sommes bien assez grands pour mesurer tout l’intérêt qu’il y a à débattre et échanger entre personnes qui n’ont pas tout à fait les mêmes positions », poursuit-il.
De même, chez Advancy, « ce n’est pas du tout un sujet tabou, les gens en parlent très ouvertement et il y a beaucoup de bon sens et de recul dans ces discussions qui sont ouvertes et très transparentes, pointe Éric de Bettignies. Il y a même probablement eu des petits paris internes sur des pourcentages, c’est très bon enfant. »
Enfin, la politique peut avoir un tout autre type d’impact sur la vie interne du cabinet, comme c’est le cas chez Vertone cette année : « Nous avons accordé un congé sans solde de deux mois et demi à un consultant qui va se présenter aux élections législatives, explique Raphaël Butruille. Nous n’avons pas envisagé une minute de le lui refuser. Bien sûr, s’il est élu, il va quitter le cabinet. »
Miren Lartigue pour Consultor.fr
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