Advancy, juge de paix d'un virage digital de Geodis
Upply, la filiale 100 % digitale du groupe français Geodis, a ouvert en octobre une place de marché qui met directement en relation les transporteurs et les expéditeurs de marchandises. Une transformation tout sauf aisée pour laquelle Upply s’est adjoint les conseils d’Advancy.
Au départ, une certitude : l’ubérisation qui gagne petit à petit tous les secteurs d’activité n’a aucune raison d’épargner celui du transport de marchandises. Ainsi, en 2016, alors qu’Uber a fait de la France son deuxième marché européen, le Groupe Geodis lance l'élaboration un plan digital. Boris Pernet, vice-président exécutif de Supply Chain Optimization, une des cinq lignes de métier du groupe, holding de la SNCF dédiée au transport de marchandises et à la logistique, analyse sa ligne de métier et les défis posés par le digital. Dans le cadre de cette réflexion, il identifie un risque important de désintermédiation pour ses activités et propose à ses collègues du Comité de Direction de Géodis une idée pour transformer ce risque en opportunité.
« Il nous semblait évident que notre industrie ne serait jamais à 100 % digitale, mais qu’elle serait fortement impactée par la transformation numérique. La désintermédiation risquait de nous mettre en difficulté si nous ne répondions pas aux nouvelles attentes du marché. » C’est ainsi que naît l’idée de créer une place de marché numérique pour transporteurs et expéditeurs et, plus globalement, tous les acteurs de la supply chain.
Au croisement de la culture data et du monde de la logistique, Upply veut fournir des analyses et des données sur les prix du transport à l’international, et permettre aux acteurs souhaitant acheter et vendre d’entrer en connexion directement sur son site. Numérique, transparence et désintermédiation : à l’époque, l’approche est nouvelle pour le secteur. Elle est le fruit des réflexions des cinq lignes de métier de Geodis (supply chain optimization, freight forwarding, logistique contractuelle, distribution & express et road transport) et de ses fonctions support : « Nous n’avons pas sollicité de cabinet extérieur, car c’est notre cœur de métier de réfléchir aux problématiques de supply chain », explique Boris Pernet, devenu président du directoire d’Upply.
Advancy entre en piste
Mais deux ans s’écoulent, le temps de développer les briques technologiques et de se lancer enfin sur le marché… Une éternité dans le digital ! En novembre 2018, Geodis a donc besoin de rechallenger son business plan. Probable que le contexte macro-économique ait joué aussi dans cette remise à plat : la maison mère doit relever le défi de la concurrence, et le marché de la logistique est en pleine consolidation. En tout cas, cette fois, la décision est prise de faire appel à un conseil extérieur. Quitte à tout remettre en question ? « Le plus grand danger aurait été d’être convaincu de choses qui n’auraient pas été avérées ! » sourit Boris Pernet.
Le nom d’Advancy est arrivé par la SNCF : « Nous connaissons bien les problématiques de logistique de transport, explique Éric de Bettignies, fondateur du cabinet de conseil en stratégie. Nous avions déjà travaillé avec Geodis sur un projet pour le Grand Paris. Et puis on s’était perdu de vue. » La nouvelle mise en contact est réussie. Boris Pernet a besoin d’aller vite et il est convaincu par la relation qui s’installe avec les équipes d’Advancy : « Le choix d’un cabinet tient beaucoup à des questions humaines, à des partages de convictions. Et puis Advancy avait une excellente réputation pour mettre les idées en mouvement ; et la taille du cabinet aussi nous allait bien. Nous nous sentions un client important, face à des personnes réellement intéressées par nos problématiques, qui nous relancent, nous challengent. C’est exactement ce dont nous avions besoin. »
La feuille de route pour Advancy : confronter le plan de développement de la toute nouvelle plateforme de logistique digitale à la réalité du marché. Il fallait réétudier le plan stratégique, vérifier si Upply avait les atouts pour être leader sur le marché, quels étaient sa proposition de valeur, son marqueur différenciant, son modèle de gain de parts de marché… « Entre l’énoncé des premières lignes du projet Upply et le moment où l’on est intervenu, deux start-up (Everoad et Fretlink) s’étaient lancées sur le créneau en France », rappelle Thibault Reinhart, qui a piloté la mission du côté d’Advancy.
Le cabinet a découpé la mission en trois étapes : d’abord comprendre le plan stratégique d’origine, s’imprégner de ses hypothèses de croissance et de volumes, faire la revue de l’existant ; ensuite, challenger le potentiel sur le marché, réaliser le benchmark des autres modèles de plateformes, comprendre les attentes des clients d’Upply, déduire les facteurs clés de succès ; enfin mettre à jour le plan stratégique.
« Nous avons vraiment travaillé dans un mode de coconstruction avec les équipes d’Upply. Et nous avons passé beaucoup, beaucoup d’entretiens, comme à chaque fois. C’est notre approche chez Advancy. Nous avons parlé à toute la structure dirigeante d’Upply, ensuite à des experts du marché et d’autres plateformes, via nos réseaux de connaissances. Sans oublier un important travail de revue de presse. Nous commencions à voir une histoire se dessiner. Et nous avons itéré là-dessus », explique Thibault Reinhart.
« Il faut le savoir, mais ça prend beaucoup de temps de travailler avec un cabinet extérieur ! »
La mission aura duré huit semaines en continu et mobilisé une équipe composée d’un chef de projet, Thibault Reinhart, d’un senior consultant, Pierre-Loup Lelasseux, et d’un consultant, Kader Diallo. En plus de deux partners : Éric de Bettignies, en relation directe avec Boris Pernet, et Sébastien Revel, partner, expert en logistique.
Du côté d’Upply, il a également fallu impliquer les équipes : « Nous avons posé des gens en miroir pour que le cabinet puisse s’approprier le travail. Pour certains ateliers, nous avions jusqu’à douze personnes présentes. Il faut le savoir, mais ça prend beaucoup de temps de travailler avec un cabinet extérieur ! » confie Boris Pernet.
Au final, l’intervention d’Advancy a fait bouger Upply sur la stratégie de lancement. « On a pivoté sur la manière d’aller sur le marché. On avait un plan plus agressif à l’origine. Nous avions pris, par exemple, un angle “multimodal” pour adresser tout de suite tous les moyens de transport. De même, nous voulions que la plateforme soit multigéographique. Mais au vu des tailles de marché et des coûts associés à la tactique, on a décidé de se focaliser d’abord sur le transport routier, et de démarrer par la France. Ensuite viendront les États-Unis », précise Boris Pernet avant de conclure : « Nous avons gagné en maturité. Nous avons été plus vite à nous rendre compte des choses parce qu’on a croisé notre expérience avec d’autres. »
Du côté d’Advancy, on confirme qu’il a fallu aller chercher des comparables dans d’autres secteurs pour contourner la difficulté de travailler sur un marché émergeant. Si des concurrents d’Upply existaient désormais, ils n’en restaient pas moins jeunes et n’offraient pas le recul nécessaire pour valider des modèles : « Nous avons dû dépasser l’approche théorique, trouver des exemples concrets et tangibles pour fournir les bons arguments aux équipes d’Upply. Pour cela, nous avons adopté une approche ouverte, en allant voir des industries comme le marché des VTC, de l’hôtellerie avec Booking, ou encore de la livraison à domicile », confie Thibault Reinhart.
La mission aura sans doute autant appris à Geodis-Upply qu’au cabinet de conseil, qui peut désormais se targuer d’une expertise en matière de transformation digitale de la supply chain. Un sujet qui préoccupe de plus en plus de clients industriels.
Delphine Sabattier
Crédit photo : Geodis StQuentinFallavier 92 Nicolas Dartiailh
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