Bouygues, Free, SFR, Orange : « On est passé de 40 milliards d’euros de chiffre d’affaires à trois, à 30 milliards à quatre »
L’équation économique des opérateurs de télécommunication français n’est pas aussi rose que l’opinion dominante voudrait le laisser entendre.
C’est le point de vue défendu par Hervé Collignon, senior partner Media, Digital, Telecoms et Technology chez Kearney. Pour lui, une consolidation de quatre à trois acteurs reste sur la table : elle sera tributaire des bonnes personnes capables d’exécuter un rapprochement nécessaire au bon moment.
Il intervenait sur Smart Tech, l’émission quotidienne dédiée à l’innovation diffusée sur B Smart, le 8 juillet, au lendemain de la présentation par Free de sa nouvelle box, la Freebox Pop. Le signe évident, pour lui, des marges de manœuvre financières que les opérateurs de télécommunications essaient de reprendre au terme d’une décennie de guerre des prix.
« La situation économique des opérateurs européens n’est pas du tout proportionnelle à l’usage exponentiel qui est fait de leurs réseaux, à la différence des opérateurs américains par exemple », pose-t-il.
Chiffres à l’appui, accessibles à tous sur la base de l’Insee européen, Eurostat, qui recense les dépenses des ménages des pays membres de l’Union européenne. « Ils montrent que les dépenses de télécommunication ont faiblement cru de 2000 à 2018, loin, loin, très loin, des usages de télécommunication qui, partout, ont explosé », appuie Hervé Collignon.
Dans ce contexte, la France est même championne européenne de la baisse des dépenses des ménages : « Elles sont passées de 500 à 400 euros par an », dit Hervé Collignon. L’arrivée de Free est évidemment une des causes établies. Mais ont également joué un contexte d’entente entre Bouygues, Orange et SFR, et une facture moyenne qui, avant la dégringolade des dernières années, était un peu au-dessus de la moyenne européenne.
Quelles que soient les causes de cette baisse des revenus, les conséquences sont très claires : plans sociaux, délocalisations, fourniture auprès d’équipementiers à meilleur coût tel que Huawei ou LG au détriment d’Alcatel, Siemens ou Nokia.
Moins de revenus d’un côté, plus d’investissements de l’autre, dans la fibre, dans la couverture du territoire, dans la 5G : le phénomène est connu, c’est le cash squeeze. À savoir un épuisement des capacités d’investissement.
Partenaires financiers et nouveaux services : les telcos cherchent à dégager de nouvelles marges
D’où ces dernières années, la mise en vente par les opérateurs de leurs tours télécoms pour se désendetter et générer du cash, ou la création de véhicules dédiés à la fibre dans lesquelles des partenaires financiers – typiquement des fonds de private equity – font leur entrée.
Autre nécessité, innover pour réussir à convaincre des usagers habitués à de très bas prix de la pertinence de mettre quelques euros de plus par mois dans leurs dépenses télécoms.
« Pas facile quand les gens ont été habitués à penser que toutes les dépenses augmentent sauf celles du téléphone et d’internet. La bonne nouvelle est que les usages changent tout le temps, que le rythme technologique reste très soutenu, et des fenêtres de nouvelles opportunités s’ouvrent », analyse Hervé Collignon.
Parmi ces nouvelles offres desquelles les opérateurs pourraient tenter de générer des revenus, il y a la cybersécurité, leur rôle en tant qu’accélérateur de mutations sociales, le télétravail au premier chef, dans les services à la personne (sécurité à la maison par exemple) et même dans la distribution d’eau ou d’électricité ! En un mot : mettre le pied dans les autres lignes de dépenses des ménages européens listées par Eurostat.
Encore faut-il nouer les bons partenariats et les gérer habilement. « Pour les opérateurs aussi, un partenariat est toujours délicat à faire fonctionner. Ils seront tenus d’être plus fins dans leurs relations partenariales. » Sans quoi ces partenariats ne fonctionneront pas.
La carte joker : la consolidation
Dernière option, la consolidation. Elle reste sur la table. Pour Hervé Collignon, « le rationnel économique et l’appétit des acteurs sont là. Il reste à résoudre la question politique et la bonne manière de présenter les choses ».
Benjamin Polle pour Consultor.fr
Un tuyau intéressant à partager ?
Vous avez une information dont le monde devrait entendre parler ? Une rumeur de fusion en cours ? Nous voulons savoir !
commentaire (0)
Soyez le premier à réagir à cette information
tech - télécom - médias
- 19/12/24
D’après un fichier confidentiel du groupe informatique en proie à de graves difficultés financières, McKinsey lui a fourni 45 millions d’euros de conseil en 2022, 57 millions en 2023 – et 14 millions en 2024.
- 19/12/24
Chuck Whitten est un partner « boomerang » de Bain où il avait passé 22 ans. Au sein du cabinet il avait, notamment, conseillé Dell durant plus de 10 ans, avant de rejoindre l’entreprise.
- 03/12/24
Il est un alumni du conseil en stratégie qui fait parler de lui ces dernières semaines… Et qui aurait sans nul doute préféré rester discret pour l’occasion. Alban du Rostu, 34 ans, consultant chez McKinsey entre 2018 et 2021, puis DG du Fonds du Bien Commun (FBC), créé par l’homme d’affaires milliardaire Pierre-Édouard Stérin, catholique conservateur proche de l’extrême droite, avait été nommé le 25 novembre dernier directeur de la stratégie et du développement du groupe Bayard par son président, François Morinière…
- 21/11/24
Thibault Delon, près de 4 ans passés au bureau parisien de L.E.K., vient d’être nommé Chief of staff de Maxime Saada, CEO de Canal+ et président du directoire.
- 14/11/24
Désignée comme l’une des 50 Women in Tech allemandes en 2021, Mariam Kaynia, plus de 8 ans passés chez McKinsey, devient Chief Data and Information Officer du groupe français de télécoms par satellite.
- 07/11/24
Des associés de Simon-Kucher, EY-Parthenon, Circle Strategy et Oliver Wyman nous livrent leurs diagnostics et proposent des options stratégiques.
- 05/11/24
Benjamin Revcolevschi, consultant puis manager au BCG de 1999 à 2007, succède à Michel Paulin, pilote du leader européen du cloud depuis 6 ans.
- 02/11/24
Noli pour No One Like I. Tel est le nom de la start-up de Beauty Tech cofondée par Maëlle Gasc, 4 ans au BCG, avec un ancien directeur marketing de L’Oréal Paris. Une plateforme qui s’appuie notamment sur l’IA.
- 22/10/24
L’ex-pépite française du numérique, Atos, endettée à hauteur de 5 milliards d’euros, en pleine restructuration financière, vient de nommer son nouveau président du conseil d’administration. Il s’agit de Philippe Salle, 59 ans, un ancien senior manager de McKinsey, depuis 2017 directeur général du groupe Emeria (propriétaire en France de la marque Foncia).