Entretiens d'embauche : faut-il en passer par des préparations payantes ?
Plusieurs sociétés proposent en France aux candidats qui se destinent au conseil en stratégie de les assister dans la préparation des entretiens d'embauche. En quoi consiste leur offre ? Leur prix est-il justifié ? Consultor a interrogé cinq de ces prestataires.
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Se préparer aux entretiens dans le conseil en stratégie et à la résolution des business cases ? Ce n’est pas l’offre qui manque, bien au contraire. Les livres ne se comptent plus, les sites d’exercices à la résolution de business cases aussi, les clubs d’écoles dédiés spécifiquement au conseil en stratégie, les sites de peer-to-peer tel PrepLounge où il est possible de s’entraîner aux entretiens, sans même parler des copains de promo vers qui il est possible de se tourner au moment de se lancer.
Abondance de biens, donc. Une impression commune demeure cependant : il existe un vrai besoin de préparation à ces entretiens si exigeants et atypiques qui n’a pas de réponse satisfaisante en l’état des offres.
Pour répondre à ce besoin, plusieurs sociétés françaises, inspirées de modèles nord-américains très prisés par les étudiants en MBA, se développent en France. « Si demain on vous dit que vous allez faire votre premier rodéo et que vous n’êtes pas préparé à l’exercice, ce ne sera pas brillant », vante Enguerran Loos, détenteur d'un MBA à Columbia, fondateur du cabinet de chasse InnerSquare, dont une partie de l’activité consiste à coacher les candidats.
En quoi consiste leur offre ?
InnerSquare est l’une des cinq sociétés avec lesquelles Consultor a échangé, sans prétendre à l’exhaustivité sur le marché français. Que proposent ces préparateurs ?
- Trier les CV
Tout d’abord, le plus évident : « Dire à ceux qui ne peuvent pas prétendre au conseil en stratégie qu’ils ne peuvent pas y prétendre ». Dixit Adrien Rosenberg, l’un des collaborateurs d’Alumeye, la société de coaching aux entretiens en finance et dans le conseil créée à Paris en 2012.
- S'y retrouver dans l'offre pléthorique de livres
Puis, de guider les candidats dans l’océan de livres de préparation : « Les livres, il y en a énormément, à tel point que les candidats ne savent plus où donner de la tête. Je simplifie énormément le nombre de frameworks que je propose à mes clients pour la résolution des business cases. Seuls quelques-uns sont réellement utiles », dit Salomé Cohen, la fondatrice de Wizyou, une activité de coaching des candidats.
- S'exercer avec des outils et des cas inédits
Voire de former les candidats aux erreurs et aux pièges à éviter tout au long de la résolution de business cases avec des outils et des cas inédits. C’est ce que propose Victor Mamou, auteur de Comment être admis au BCG et chez McKinsey sans être issu d’une école de groupe A.
Il a mis sur pied ses propres business cases et une boîte à outils home made, à l’aune de son expérience d’un recrutement et des milliers de candidats qui « foirent leurs entretiens chaque année dans les pays francophones ».
- Ne pas négliger le fit
Autre valeur ajoutée revendiquée : préparer aussi les candidats au fameux fit avec les recruteurs. « Les machines à cas n’impressionnent pas », appuie également Enguerran Loos quand Salomé Cohen insiste sur le fait que le recrutement « est aussi un échange et une interaction que les candidats doivent anticiper ».
- Accéder à des pools de formateurs
Souvent des initiatives individuelles, certaines de ces sociétés promeuvent le pool de formateurs expérimentés auxquelles elles donnent accès (une dizaine chez Alumneye et chez son concurrent Best in Case).
- Travailler sur l'attitude
Le travail de préparation va parfois encore plus loin. « Je travaille l’approche et la posture, par exemple l’humilité, parce que certains candidats pèchent par trop d’assertivité en entretien ou emploient des formulations qui seraient rédhibitoires devant des clients », dit Salomé Cohen.
- Anticiper les premiers jours au sein du cabinet
« Il faut se préparer à être intégrable dans un cabinet, plutôt que de se limiter aux entretiens de sélection. L'accompagnement doit aller jusqu'au moment où les consultants sont bien intégrés », ajoute Victor Mamou.
Cela en vaut-il le coup ?
Les tarifs de ces préparations varient : entre 350 euros un week-end et 400 euros les deux heures. Sont-ils justifiés ? Rapport aux objectifs professionnels poursuivis, ils sont dérisoires, plaide Enguerran Loos. « Rentrer au BCG et chez McKinsey est peut-être aussi important qu’intégrer une grande école », défend-il. De ce point de vue, quelques centaines d’euros ne sont pas énormes.
Pour ceux qui ont eu recours à leurs services, le bilan est plutôt bon. « J’avais dépensé 500 à 1 000 euros chez Best In Case pour quelques heures de préparation avec un coach. Puis un chasseur de tête m’avait financé à nouveau deux heures chez eux », raconte un Team Leader Chez Bain & Company.
Evidemment, les intéressés vantent des taux d’admissions très supérieurs pour les candidats préparés par leurs soins. Des affirmations, qui pour être confirmées, nécessiteraient une analyse minutieuse à laquelle Consultor ne s’est pas livrée.
En tout cas, les préparations faites par les grandes écoles elles-mêmes sont égratignées au passage. « À part Harvard, l’Insead, HEC et quelques très grandes écoles, où les candidats ont tous les atouts pour se préparer, dans la plupart des autres écoles, c’est rarement le cas », dit Mike Ross, un ancien McKinsey au Canada qui a fondé en 2016 à Montréal Vocaprep. Un Mooc spécifiquement dédié à la préparation des entretiens au conseil en stratégie.
Tout juste peut-on faire état du nombre de candidats que ces sociétés indiquent avoir formé (130 en deux ans pour Salomé Cohen, 200 pour Alumneye...). D’autant plus que certains prestataires ne savent pas dire si ce sont ces formations qui ont été décisives ou d’autres expériences académiques et professionnelles. D'autant plus aussi que les MBB mettent eux-mêmes à disposition des candidats présélectionnés sur CV des ressources en ligne et des points de contact en interne pour se préparer au mieux aux entretiens.
Chez McKinsey, par exemple, plusieurs sessions téléphoniques et visioconférences avec les recruteurs puis avec des consultants seniors aident les futurs interviewés à cerner les attendus des entretiens. Et tout est gratuit. « Ils sont peu nombreux à ne pas choisir de recourir à ce pack. On ne veut pas laisser filer les perles rares », dit un bon connaisseur de l’aide à la préparation made in McKinsey.
Dans quel cas recourir à ces préparations ?
Bilan des courses : faut-il ou non recourir à ces services ? « Il est évident que ces entretiens se préparent. L’investissement peut se faire par des préparations de groupe, par des livres, par des coachs ou par ces sociétés. L’important reste l’investissement personnel du candidat dans la préparation », estime Charlotte Polderman, directrice du recrutement au BCG.
Et au jeu de l’investissement individuel, on peut dire que ceux qui paient un coach ou un préparateur se donnent les moyens de leurs ambitions. Voire penser qu’ils réussiraient tout aussi bien sans les préparateurs s’ils cumulent d’autres outils par ailleurs.
CQFD : les préparations payantes, pourquoi pas à la rigueur, mais seulement si vous pédalez dans la semoule et que personne d'autre ne peut vous aiguiller.
Benjamin Polle pour Consultor.fr
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