10 conseils pour survivre à un entretien d’embauche en cabinet de conseil en stratégie
Vous voilà devant la porte du recruteur, prêt à aller présenter la « meilleure version de vous-même » à un prestigieux cabinet de conseil en stratégie. Que faut-il dire ou ne pas dire, faire ou ne pas faire, voire éviter à tout prix pour décrocher le contrat ? Est-ce que ça a changé ces dernières années ? Nous avons posé ces questions à des recruteurs du secteur.
Que faut-il absolument éviter de dire en entretien d’embauche avec un cabinet de conseil en stratégie ? Officiellement, rien de spécial, répond Catherine Pain Morgado, directrice du recrutement de Bain France. « Un candidat doit démontrer qu’il a les compétences et aptitudes requises pour répondre aux besoins de nos clients et qu’il possède des qualités en adéquation avec nos valeurs. »
Même son de cloche du côté de Florian Harrault, principal chez Ares & Co. « Nous souhaitons précisément que l’on puisse tout dire en entretien. Nous sommes un petit cabinet, nous sélectionnons avec beaucoup de rigueur nos futurs consultants. Nous investissons beaucoup sur eux, les formons, les accompagnons… Nous voulons donc bien les connaître. De part et d’autre, il est important que chacun dispose de “la vérité des prix” dès le départ. »
Rémi Salmeron, directeur chez Wit Associés (cabinet de chasse actif dans le secteur (dont les fondateurs sont également actionnaires à titre individuel de Consultor, ndlr), abonde dans le même sens : « Le conseil en stratégie est un monde assez formaté, et le processus de recrutement doit répondre à certains codes. Mais il ne doit pas non plus être aseptisé. Le candidat doit être dans une posture d’authenticité. »
Ce qu’il ne faut pas dire
Le point était important à rappeler : un processus de recrutement doit être aussi transparent que possible. Si la décision se prend sur un malentendu, tout le monde sera perdant. Mais bien sûr, ce n’était pas vraiment la question posée. Reformulons-la : y a-t-il des propos ou des attitudes rédhibitoires qui garantissent l’échec d’un candidat lors d’un entretien ?
En la matière, Florian Harrault affirme qu’il n’a « pas de red flag, mais disons… quelques orange flags ». Énumérons-les rapidement.
Conseil n° 1 : par exemple, « un candidat qui s’enquiert du salaire d’entrée de jeu, sans avoir abordé le contenu intellectuel des missions ». Tout dépend néanmoins du statut du candidat et de l’interlocuteur qui lui fait face, nuance Rémi Salmeron : « Un manager ou partner envisageant un mouvement peut se permettre d’aborder ce point. » Une question de contexte donc, mais un candidat qui cherche à dicter ses conditions dès l’abord - salaire, conditions de travail, types de mission - sera en général mal considéré.
Conseil n° 2 : le fait de demander rapidement « à quelle heure on finit le soir » est mauvais signe également pour Florian Harrault. « Il est très sain de s’interroger sur le rythme de travail, mais si le sujet revient avec trop d’insistance, le candidat donnera l’impression qu’il cherche davantage son confort que le dépassement de soi » attendu dans ce métier.
Conseil n° 3 : le postulant qui la joue trop « perso » peut également inquiéter. Pour Florian Harrault, « un candidat qui pose beaucoup de questions sur la carrière, les passages de grades, ses possibilités de développement montre qu’il est ambitieux, ce qui est une bonne chose ; mais chez Ares & Co, nous essayons de développer un collectif, et nous voulons des profils qui sachent jouer en équipe. Si l’entretien donne l’impression d’un candidat trop individualiste, c’est un sujet d’attention pour nous ».
Conseil n° 4 : Rémi Salmeron rappelle aussi un grand classique du recrutement. « Il est très mal vu de dire du mal de son employeur précédent, que l’on y travaille encore ou pas. Même si les reproches sont fondés ! » Mais ce red flag n’est pas spécifique au conseil en stratégie.
Ce qu’il ne faut pas faire
Au-delà des sorties de route verbales, il y a tout ce qui relève de l’attitude et du comportement.
Conseil n° 5 : comme dans n’importe quel secteur, tout ce qui peut donner l’impression que l’on vient en touriste est classiquement malvenu. « Quand je sens que la personne ne s’est pas du tout renseignée sur le cabinet et n’a pas préparé l’entretien, ce n’est jamais bon », commente Florian Harrault. Mais il y a pire : pour Rémi Salmeron de Wit Associés, « un candidat qui vient en dilettante et essaie d’inverser le rapport de force en adoptant une posture de type “c’est à vous de me séduire” sera mal perçu. Vous acceptez de rencontrer un cabinet, vous mobilisez le temps d’un partner, vous ne pouvez pas vous permettre cette attitude ».
Conseil n° 6 : la dimension comportementale peut être très subjective. Pour Florian Harrault, par exemple, le fait d’être « fuyant dans le regard, assis au fond de sa chaise » ou de « donner l’impression de répondre sans avoir très bien écouté la question posée », mais aussi « la posture physique, le body language, la communication non verbale », tout cela peut contribuer à une impression négative.
Conseil n° 7 : sur la délicate question du dress code, le constat est unanime ; les curseurs ont bougé. Pour les hommes, la cravate n’est plus nécessaire. La tenue correcte est toujours exigée en entretien, mais sa définition a changé : costume, chemise unie, sans cravate. Dans le travail, c’est le code vestimentaire qui s’impose, dans toutes les circonstances où il faut être bien habillé. Pascal Colson, managing partner du cabinet de recrutement spécialisé NC Partners, se souvient : « Avant le Covid, c’était costume cravate, il y avait zéro question. Aujourd’hui quand j’en mets une au cabinet, on me demande si je vais à un mariage. » Mais il reste déconseillé de descendre en dessous de ce standard vestimentaire. « Vous ne voulez pas qu’on se souvienne de vous comme “celui qui est venu en jean” ! » La barbe, également, entre dans les mœurs.
Ce qu’il faut dire
Une discussion avec des recruteurs se finit le plus souvent sur une vérité peu originale, mais assez indépassable : l’entretien doit avant tout révéler le « fit » avec le candidat. « S’il ne se passe rien humainement, nous ne serons pas tentés de poursuivre », explique Florian Harrault.
Conseil n° 8 : au-delà de ce facteur difficilement mesurable, il y a des constantes propres au métier, rappelle Pascal Colson. « Les cabinets de conseil en stratégie s’attendent toujours, dans le discours, à trouver certains invariants : une ambition saine, la résilience, la flexibilité, l’adaptabilité, l’exigence, la capacité d’écoute ; pour un candidat, il ne faut pas trop s’éloigner de ces fondamentaux. Au-delà, il est possible de dire beaucoup de choses, en y mettant les formes, en restant correct et en modérant son propos. »
Ce qu’on ne pouvait pas dire, mais que l’on peut dire aujourd’hui
Les évolutions qui ont affecté le marché du travail après la crise sanitaire n’ont cependant pas épargné le consulting. Les attentes des candidats changent, le rapport de forces tend à les favoriser davantage. Pour Florian Harrault, le phénomène est essentiellement cyclique. « En 2022, c’était un peu le Far West. Il y avait beaucoup de concurrence sur les profils que nous recherchions. » Depuis, cependant, « le rapport de force s’est rééquilibré en faveur des cabinets, même si la concurrence sur le marché du recrutement des consultants reste importante ».
Conseil n° 9 : à la faveur de ces changements, le champ des questions « acceptables » en entretien s’est quelque peu élargi. « On va entendre des questions sur la politique RSE du cabinet, par exemple sur l’égalité professionnelle hommes-femmes », analyse Florian Harrault, « ou encore sur la politique en matière de télétravail, même si ce point est moins fréquent aujourd’hui qu’il y a 2 ou 3 ans ».
Conseil n° 10 : l’idée que les consultants ont une vie en dehors du cabinet n’est plus taboue. « Aujourd’hui, reprend Pascal Colson, il est possible à un candidat de ne pas témoigner d’une ambition démesurée, par exemple. Vous pouvez dire en entretien : “Mon plan est de venir chez vous 2 ou 3 ans pour acquérir de l’expérience et de la méthodologie, puis de poursuivre ma carrière ailleurs” ; cela peut s’entendre ». Il est même possible de souligner « sans trop s’attirer de suspicion que l’on a des contraintes familiales, et ce, que l’on soit homme ou femme. Annoncer que l’on va bientôt être parent et qu’on préfèrerait ne pas trop bouger de Paris dans les 12 ou 24 mois qui viennent n’est plus un killer concern ».
Un marché exigeant
Bien sûr, il y a la manière. Pour le candidat, il faut savoir rester flexible. Mais pour Pascal Colson, il est clair que l’attitude des recruteurs a évolué face à la nécessité d’attirer les meilleurs. Et cela se reflète dans les pratiques de travail au sein des cabinets. « J’ai le sentiment que les consultants en stratégie travaillent moins souvent le week-end ou la nuit. Et si vous évoluez dans une équipe où l’on travaille couramment jusqu’à minuit, on ne vous montrera plus du doigt si vous partez à 22 h… »
Quoiqu’il en soit, « la sélection va continuer à se faire surtout à 50 % sur le fit, à 50 % sur la qualité des études de cas », avec des processus en 5 ou 6 entretiens. La difficulté « fait aussi partie du marketing des cabinets » : il faut que le recrutement reste une épreuve, à la hauteur du prestige inhérent à la carrière de consultant en stratégie. Le marché du partner et du consultant reste un domaine d’exception.
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