Corruption : McKinsey solde le scandale sud-africain pour 123 millions de dollars
L’accord financier conclu avec le département de la Justice met fin à l’enquête américaine, ainsi qu’aux accusations de l’Autorité nationale des poursuites d’Afrique du Sud. Les faits s’étaient déroulés entre 2012 et 2016.
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Le montant du règlement – 122,85 millions de dollars très précisément – sera partagé entre les autorités américaines et sud-africaines.
Le cabinet aurait déboursé 227 millions de dollars en tout si l’on tient compte des honoraires et intérêts remboursés aux entreprises publiques sud-africaines concernées en 2018, puis 2021.
Retour sur les pratiques de corruption mises en œuvre
Cet accord intervient dans le cadre d’une enquête menée par le département de la Justice US sur les activités de McKinsey Africa, filiale à 100 % de McKinsey & Co. En cause : un système de corruption auquel le cabinet a contribué via l’un de ses senior partners, qui impliquait des fonctionnaires du gouvernement sud-africain, ces derniers ayant touché des pots-de-vin en échange de contrats de conseil lucratifs auprès de plusieurs entités détenues et contrôlées par l’État.
Le producteur d’énergie Eskom, tout comme Transnet, qui gère les ports, voies ferrées et pipelines, ont frôlé l’effondrement en raison de l’abus de contrats publics sous la présidence de Jacob Zuma. En Afrique du Sud, ces pratiques sont qualifiées de « capture de l’État ».
Les missions réalisées grâce à ce système de corruption ont permis à McKinsey de réaliser 85 millions de dollars de bénéfices environ.
Des détails sur l’accord conclu avec le Département de la Justice US
Celui-ci tient compte du plaider-coupable de Vikas Sagar en décembre 2022. L’ancien senior partner du bureau de Johannesburg de McKinsey Africa a en effet reconnu avoir participé à un complot visant à violer les dispositions de la loi sur les pratiques de corruption à l’étranger (Foreign Corrupt Practices Act).
Dans la décision rendue publique le 5 décembre par le bureau du procureur des États-Unis pour le district sud de New York, la « nature et la gravité » de l’infraction ont été mises en exergue, ainsi que la « coopération » continue du cabinet avec la justice américaine – qui a d’ailleurs vocation à se poursuivre.
En effet, lorsque le scandale a éclaté, McKinsey a très rapidement lancé des enquêtes internes en mandatant plusieurs cabinets d’avocats. Le cabinet a fourni tous les documents nécessaires à la justice, signalé les tentatives de suppression de documents par le senior partner incriminé et procédé « au suivi de flux monétaires comptables internes complexes », entre autres. Des « mesures correctives » ont également été prises à l’encontre de Vikas Sagar, de sa « mise en congé » jusqu’à son licenciement.
Au-delà de l’aspect strictement judiciaire, McKinsey a renforcé ses règles de compliance mondiales dans le secteur public, sous la houlette à l'époque de l’ancien patron de McKinsey France Jean-Christophe Mieszala, devenu Chief Risk Officer – une fonction créée à cette occasion. D’autres mesures avaient été prises : sélection drastique des partners locaux, création d’un comité des risques régional…
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Quatre ans après avoir été mis en cause en Afrique du Sud pour avoir bénéficié de contrats publics via des intermédiaires locaux soupçonnés de corruption, McKinsey continue de collaborer avec l’État d’Afrique du Sud qui lui demande des comptes et poursuit une opération de transparence de grande ampleur.
Maj le 01/06/2021 : le 26 mai 2021 McKinsey annonce qu'il accepte d'augmenter le remboursement d'honoraires de 43 à 63 millions de dollars.
Si la procédure est désormais close, McKinsey et McKinsey Africa se sont engagés à continuer « d’améliorer leur programme de conformité si nécessaire, et à rendre compte au gouvernement [US] des mesures correctives et de la mise en œuvre de leur programme de conformité amélioré ».
Cet accord, valable sous réserve que le cabinet ne commette plus de faute pendant 3 ans et demi, intervient par ailleurs à la suite du dernier en date conclu dans le cadre d’un autre scandale – celui des opioïdes – pour lequel l’addition s’élève désormais à 1,5 milliard de dollars.
En Afrique du Sud, une sanction perçue comme un « geste symbolique »
L’organisation à but non lucratif basée au Cap, Open Secrets, souligne que l’accord permet de faire reposer la responsabilité des faits sur le seul (ex-)partner Vikas Sagar. McKinsey se déchargerait ainsi « de toute responsabilité pour un problème systémique ».
En réaction à cette annonce, McKinsey a déclaré que l’accord « clôt [une] situation regrettable », réaffirmant que Vikas Sagar « avait caché sa conduite illégale » au cabinet.
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