Charles-Édouard Bouée : récit d’une démission surprise
Le CEO français a annoncé sa démission vendredi 7 juin à Berlin devant l’assemblée des actionnaires.
Il n’occupe plus ses fonctions opérationnelles qui passent à un collège de cinq partners. Il reste cependant dans le groupe jusqu’à la fin septembre, dit-il à Consultor, et conservera ensuite un rôle de senior advisor.
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Stupéfaction. Pour l'un des quelque 250 partners mondiaux présents à Berlin pour l’assemblée générale de Roland Berger, c’est bien l’impression qui prévaut. Vendredi soir, le CEO Charles-Édouard Bouée lâche sa bombe : il quitte ses fonctions pour poursuivre d’autres projets professionnels après quasi deux décennies de maison. « Quelques-uns savaient, mais la plupart sont tombés des nues », dit notre source.
Le « Grand Cheb », comme Charles-Édouard Bouée est parfois surnommé, passe la main ? Sacrée surprise ! C’est que le timing peut sembler des plus surprenants.
À contretemps
Charles-Édouard Bouée était devenu le premier CEO non allemand en 2014, réélu en 2018 par l’ensemble des partners ; alors qu’il affichait urbi et orbi les bons résultats de la firme, en croissance depuis plusieurs années à 600 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2018, affirmant à l’envi que Roland Berger atteint des niveaux d’activité historiques — même si le chiffre d'affaires reste encore en deçà du record de 750 millions d'euros atteint en 2013 avant que le cabinet ne lance une profonde restructuration suite au choix des partners de ne pas céder le cabinet.
Autres achèvements à mettre à son crédit : une stratégie de diversification qui s’était matérialisée en France par le lancement d’un fonds de capital-investissement ou la création de la plateforme de partenariats numériques Terra Numerata dont la direction a été confiée à l’ancienne secrétaire d’État Axelle Lemaire.
« Je pense à ce changement depuis un certain temps et j'ai voulu profiter de la réunion de tous les partners en assemblée d’actionnaires annuelle à Berlin pour leur annoncer ma décision, explique-t-il à Consultor. Comme je l’ai dit aux partners, il y a des moments où on a envie d’autres choses et où il faut saisir les fenêtres d'opportunité. »
Surprise générale
Et si la majorité des partners n’étaient pas avertis de cette démission, inutile de dire qu'elle a été apprise du plus grand nombre des consultants en même temps que la diffusion du communiqué de presse de l’entreprise vendredi soir.
Tout juste, notait ce même communiqué, le conseil de surveillance (supervisory board) de Roland Berger était-il « aligné » avec Charles-Édouard Bouée. Quand l’avait-il annoncé au conseil de surveillance ? A-t-il été invité à partir ? A-t-il été retenu ? Motus sur tous ces points et aucun de la dizaine de partners sollicités par Consultor n'a souhaité commenter.
Réunion de pédagogie à Paris
C’est dire si le retour de week-end du staff Berger s’est fait dans une ambiance quelque peu inhabituelle. Mardi matin à 9 heures, dans les locaux parisiens de Roland Berger, certains managers avaient convié le staff à une réunion.
Objectif : expliquer les raisons de ce départ. En substance : Charles-Édouard Bouée souhaitait partir pour poursuivre des projets personnels et l’activité de l’entreprise continuera normalement. « Business as usual », dit-on encore à la communication de l’entreprise ce mercredi.
Ce que confirme aussi anonymement un autre consultant : « Notre quotidien ne change en rien. Selon nos sujets de prédilection, nous sommes plus ou moins affectés par son départ. Ceux qui ont la fibre digitale vont clairement le regretter. Mais nous connaissons les règles : il existe un turnover important pour les consultants à tous les niveaux. C’est dans le cours normal des choses que le dirigeant parte aussi. »
De nombreuses questions encore ouvertes
Mais, après ce départ, de nombreuses questions restent ouvertes. À commencer par la date effective à laquelle Charles-Édouard Bouée aura quitté l’entreprise. « J'ai quitté mes fonctions opérationnelles, mais je reste dans le groupe pour assurer une bonne transition jusqu'à la fin septembre », explique-t-il à Consultor.
Pour ensuite devenir senior advisor. « Je vais continuer par exemple à siéger au AI Global Council », précise Charles-Édouard Bouée au sujet de l’un des cercles de réflexions mis sur pied par le Forum économique mondial en mai à San Francisco auquel l’ex-CEO a un siège.
Autre gros point d’interrogation : l’attelage de cinq partners installés à sa place nourrit d'ores et déjà les bruits de couloir. La presse allemande va bon train pour voir un successeur tout trouvé en Stefan Schaible, le CEO délégué et l’un des cinq partners de l’équipe de management qui succède à Charles-Édouard Bouée.
Surtout qu’un deuxième Allemand est aussi présent dans cette équipe en la personne de Sascha Haghani, le CEO Allemagne, Autriche et Suisse. Ce qui pourrait laisser présager un retour de la direction du groupe en Allemagne.
Certes, Tijo Collot d‘Escury, le managing partner des Pays-Bas, Satoshi Nagashima, le managing partner Japon et – cocorico – Olivier de Panafieu, le comanaging partner France, font aussi partie de l’équipe.
Un attelage cependant plutôt biscornu qu’on imagine mal durer. « Cinq partners très seniors qui connaissent très bien l’entreprise », indique seulement Charles-Édouard Bouée à leur sujet. À quand la prochaine étape ? Sans doute, au plus tard, lors de la prochaine assemblée générale des actionnaires de Roland Berger qui doit se tenir en décembre.
Benjamin Polle pour Consultor.fr
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