L'assurance a du mal à se défaire de ses vieux clichés
On le dit peu « sexy », pourtant, le secteur de l'assurance fait peau neuve en accélérant sa transformation digitale, marketing et son internationalisation.
Le monde de l'assurance, serait-il un peu trop ringard et franchouillard pour les consultants ? Le secteur souffre encore de son image d’Épinal, notamment auprès des jeunes diplômés. Rien ou presque rien n'aurait donc changé depuis les tribulations de Séraphin Lampion, l'agent d'assurance embarrassant des albums de Tintin ?

« Historiquement, l'assurance n'est pas le secteur le plus fun », admet d'emblée un consultant. Peut-être, à cause d'une faible culture de l'assurance dans les formations. « On constate avec regret que le sujet "assurance" n'est pas beaucoup abordé dans les écoles et universités. Les jeunes diplômés n'ont donc pas un appétit immédiat pour le secteur », avance Anne-Sophie Lendrevie, associée chez KPMG Advisory.
Un métier méconnu
En outre, même parmi les consultants, le secteur reste assez peu traité. Il exige du temps et de l'apprentissage. « Le métier n'est pas bien connu, mais s'avère plus compliqué que la banque par exemple. Une fois qu'on y a travaillé, cela devient très intéressant », explique Bertrand Lavayssiere, partner d'Ares & Co, spécialiste de l'assurance depuis trente-cinq ans. « C'est un secteur qu'il faut apprendre à connaître pour prendre conscience de ses subtilités, de la multitude de ses acteurs (compagnies, mutuelles, institutions de prévoyance, courtiers, sociétés d'assistance...), de ses réseaux de distribution, de ses produits (santé, auto, habitation, RC…), de ses enjeux économiques et sociétaux très forts », ajoute Bertrand Dimont, directeur chez Kea & Partners, en charge de l'assurance dans le cabinet.
L'assurance recouvre des problématiques sociales actuelles importantes : couverture santé (complémentaire santé d'entreprise obligatoire, contrats responsables, réseaux de soins), financement des retraites et de la dépendance, environnement (régime des catastrophes naturelles). De fait, les cabinets de conseil pourraient susciter des vocations.
« Les consultants juniors ont souvent une première approche en retrait. En revanche, dès qu’ils sont sur une mission, ils comprennent vite que le secteur est en train de se transformer en profondeur et sont heureux des changements qu’ils peuvent accompagner », insiste Fabienne Goarzin, partner chez Vertone, spécialisée notamment dans les services financiers et la protection sociale.
« Au regard des enjeux majeurs des assureurs pour les prochaines années (digitalisation, internationalisation, innovation produits/services…), l'image du secteur est redevenue attractive à bien des égards », ajoute Pascal Procureur-Chaix, partner chez Courcelles, cabinet spécialisé en banque et assurance.
Des transformations profondes
En effet, le monde de l'assurance est en pleine mutation. Et il est ainsi un important consommateur de conseil. En premier lieu, les transformations réglementaires (Solvabilité 2, Directive distribution, ANI) créent une demande forte, plutôt captée par les cabinets d'audit et les actuaires. Les cabinets de conseil en stratégie interviennent, eux, sur le pilotage économique de ces contraintes réglementaires ou encore sur la consolidation entre acteurs (en raison des contraintes de solvabilité).
Les consultants doivent également répondre à des sujets stratégiques de commercialisation et marketing : fidélisation, rétention de clientèle, multi-équipement, digitalisation des intermédiaires, vente en ligne. Pour réussir leur transformation digitale, les assureurs comptent sur l'accompagnement des cabinets de conseil. Car « la révolution digitale, qui impacte pleinement le secteur, va toucher au cœur du métier : le management du risque », pense Yves Pizay, associé Kea & Partners, en charge du secteur assurance.
Le digital entraîne des changements de métiers structurels, mais suscite aussi l'arrivée de nouveaux acteurs (start-up, comparateurs) et crée de nouveaux champs à couvrir (économie collaborative). « Ces sujets sont très prisés des consultants à double titre : d’une part, ils renvoient à des problématiques stratégiques ; d’autre part, ils sont par définition tournés vers l’innovation. Ils nécessitent des compétences particulières qui peuvent également avoir une incidence sur nos recrutements (data analyst, designer d’expérience client ou de services…) », dit Fabienne Goarzin chez Vertone.
Malgré la clientèle importante que représentent les assureurs et les nouveaux sujets qui transforment le secteur, les consultants expérimentés se font, pour l'heure, relativement rares. « Nous éprouvons des difficultés à recruter des consultants pour le secteur assurance, disposant déjà d’une expérience significative. Ces compétences sont fortement demandées », constate Fabienne Goarzin. Preuve que du chemin reste à parcourir pour changer l'image du secteur.
Thibaud Vadjoux pour Consultor.fr
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