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Ces stratèges reconvertis en déménageurs 2.0

Les anciens consultants en stratégie Benoît Fabre (ex-Advancy) et Philippe de la Chevasnerie (ex-McKinsey) sont des entrepreneurs dans l’âme. Ils se sont servis de leur apprentissage en cabinet pour créer Papernest, une entreprise d’aides au déménagement.

Quatre ans plus tard, ils ont épaulé près de 300 000 clients, ont embauché quelque 270 salariés et visent le marché européen.

04 Jui. 2019 à 15:12
Ces stratèges reconvertis en déménageurs 2.0

« Parce que c’était lui, parce que c’était moi. » L’amitié, c’est souvent très simple. La citation est de Montaigne pour La Boétie. Elle est aujourd’hui reprise par le Rochelais Philippe de la Chevasnerie pour le Castrais Benoît Fabre, créateurs en 2015 de la société d’aides au déménagement Papernest.

Les deux compères, aujourd'hui âgés d'une trentaine d'années, se sont rencontrés à la fin de l’adolescence, ont fait les mêmes grandes écoles d’ingénieurs-managers dont ils sont diplômés en 2013 (Supélec et ESCP pour Benoît Fabre et Polytechnique et HEC pour Philippe de la Chevasnerie).

« Ginette », doubles diplômes ingé-commerce puis Advancy et McKinsey

« De l’appréciation, des appétences, une rencontre en classe préparatoire au lycée versaillais Sainte-Geneviève (‘Ginette’), un amour pour le business et un univers commun », ajoute Philippe de la Chevasnerie. « On ne s’est plus perdu de vue », précisent-ils en chœur. Les deux hommes partagent aussi une enfance bourgeoise « standard », eux dont les parents étaient architecte, directrice des ressources humaines ou médecin.

« Après Ginette, nous avons opté pour le conseil en stratégie, précise Benoît Fabre. J’ai réalisé mon stage de fin d’études chez Advancy. Le cabinet m’intéressait, car il promettait la possibilité d’entreprendre en son sein. J’avais déjà la fibre du créateur et je savais que ce passage en cabinet serait court. La politique d’Advancy de traiter ses missions dans le détail m’a séduit. J’y suis resté de 2013 à 2015. »

Le parcours de Philippe de la Chevasnerie est similaire. « J’ai aussi choisi le conseil pour me former. J’ai  postulé chez Oliver Wyman, le BCG, et McKinsey & Company. J’ai préféré McKinsey pour sa réputation, son approche des consultants, la qualité des missions, le fait que les consultants se connaissaient. »

À bonne école

Pour ces jeunes gens, ils ont alors tous les deux 23 ans, le conseil en stratégie fait office d’une seconde classe préparatoire option création d’entreprise. « J’ai débuté comme junior puis je suis passé consultant, précise Benoît Fabre. Avec Advancy, j’avais fait le bon choix. Les missions me correspondaient. On y travaillait le détail. Je n’ai pas fait du conseil en chambre. Cela m’a permis, c’est mon meilleur souvenir de consultant, de travailler sur l’avenir d’un leader du vêtement et de la chaussure. Le groupe voulait céder une de ses entités. Mais cela s’avérait insuffisant pour redresser la barre. Nous avons donc travaillé sur la stratégie du groupe, discuté avec les dirigeants, refondu l’offre. Un dossier passionnant qui m’a permis d’acquérir une vitesse de décision, des connaissances dans de nombreux secteurs, de structurer mon travail, de m’appuyer sur des faits chiffrés pour me préparer, in fine, au grand saut. »

Pour les deux jeunes hommes, cofondateurs de leur entreprise, le conseil en stratégie forme aussi à la recherche efficace d’informations et aux interactions avec les partenaires, les employés, les équipes. « Cela structure aussi le discours, poursuit Benoît Fabre. Enfin, j’ai acquis lors de mon passage chez Advancy une forme de résilience, l’apprentissage de l’intensité dans le travail. Nous devions répondre à un fonds de pension dans les trois semaines, pas quatre. Cela nous aide tous les jours pour prendre des décisions dans notre start-up. »

Philippe de la Chevasnerie a aussi acquis une expérience qui lui sert encore aujourd’hui : « Mes trois années chez McKinsey ont amélioré mon analyse et ma structuration du travail. Dans ce secteur, il faut travailler vite et bien. Le cabinet m’a permis aussi d’acquérir un réseau, de savoir taper aux bonnes portes au bon moment. »

« Alors qu’Advancy m’a appris à contacter une cinquantaine de spécialistes pour acquérir une bonne vision du marché, à faire des analyses plus poussées, plus détaillées », ajoute Benoît Fabre. Après trois ans de bons et loyaux services, les deux jeunes gens, ils ont à ce moment-là 26 ans, décident de sauter le pas.

Sauter le pas de l'entrepreneuriat

« J’ai eu l’idée de monter une entreprise de services destinée aux trois millions d’individus qui déménagent tous les ans en France en connaissant des difficultés lors de mon déménagement, explique Philippe de la Chevasnerie. J’ai été moi-même confronté à cet enfer. J’ai failli être mis à la porte, car je n’avais pas contracté d’assurances. Mon fournisseur Internet m’a planté. On m’a coupé le courant… » Les néo-entrepreneurs ont alors démissionné et ont goûté aux joies de la création d’entreprise. Ils ont débuté dans leur salon, mais, très vite, ont décidé d’avoir un bureau pour accueillir leurs premiers salariés.

« C’est une prise de risque, commente Benoît Fabre, aujourd’hui CTO de son entreprise. J’avais, certes, de l’argent pour tenir un an. Mais j’ai arrêté de consommer à titre personnel et me suis consacré au développement de notre société même si nous avions, trois mois avant de quitter nos cabinets, utilisé tous nos week-ends pour lancer l'activité le mieux possible. »

Malgré cela, les premiers mois ont été difficiles. La question devient alors lancinante : ont-ils bien fait de quitter la proie pour l’ombre ?

L’entreprise s’adresse à tous les habitants qui ont besoin d’une aide pour le côté administratif du déménagement. Ce service est gratuit pour les près de 300 000 « déménagés » leur ayant fait confiance. La plateforme d'aide au déménagement, elle, est rémunérée par les fournisseurs et partenaires (comme Engie, La Poste, Bouygues ou encore SFR) chaque fois que Papernest leur apporte un client.

Accélération

Un modèle qui convainc. La société est passée de 2 à 130 collaborateurs en moins de deux ans et a réalisé une levée de fonds de dix millions d'euros en 2018.

Cap sur l'international désormais. « Nous avons la volonté de devenir les leaders européens sur ce marché, commente le CEO Philippe de la Chevasnerie. Nous avons lancé une filiale en Espagne. La réussite de cette exportation de nos services permettra d'ouvrir dans d’autres pays en parallèle. »

Gwenole Guiomard pour Consultor.fr

04 Jui. 2019 à 15:12
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