Philippe Peters, le partner passé par Bain, le BCG et McKinsey
Cela faisait 24 ans que Philippe Peters naviguait au gré des vents favorables sur les mers internationales du conseil en stratégie, et ce, au sein de quatre firmes, Bain, BCG, EY, McKinsey, en Europe et en Asie. Transitoirement consultant indépendant, le partner ès Énergie et Industrie consacre son temps libre à une autre passion, comme bénévole cette fois : il dirige le club de volleyeuses « Les Mariannes 92 » de Levallois Paris Saint-Cloud, menacé de disparition en 2019, qu’il a sauvé en investissant sur ses deniers personnels, et dont l’équipe est championne de France 2024 de Ligue A féminine, l’élite du volley-ball féminin professionnel. Parcours atypique d’un consultant sportif qui sait saisir les opportunités au bond.
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Début 2024, à 60 ans, après 3 années à la tête de la practice Nordics Energy & Materials de McKinsey à Oslo, l’associé a quitté le cabinet et a fait deux choix majeurs : rentrer en France après ce quasi-quart de siècle de consulting à l’international et quitter les grands noms du conseil en stratégie, en tout cas pour l’instant… Une décision prise en famille « autour des choix de scolarité de nos filles » avec son épouse Natalia, une ancienne de Bain Russie/GB/Allemagne (où ils se sont rencontrés), devenue une consultante spécialisée dans les institutions culturelles, et leurs jumelles aujourd’hui âgées de 16 ans. « Ma femme est mon coach, et je suis son avis la plupart du temps », confie-t-il à Consultor.
Depuis leur retour à Paris, Philippe Peters a créé sa petite entreprise (de conseil) et travaille « sur une base de centres d’intérêts et de passion pour des clients qui sont de grosses sociétés du secteur de l’énergie ou des fonds d’investissement, en alliant stratégie et intelligence artificielle ».
Un challenge sportif pour l’ancien volleyeur
Ce passionné de sport – il en a pratiqué et en pratique plusieurs, le football, l’aviron, le ski, le golf –, s’est aussi engagé pleinement dans une autre cause, le volley-ball, et en particulier le destin du club Stade français Paris Saint-Cloud (renommé Levallois Paris Saint-Cloud avec son équipe phare des Mariannes 92). Avec Natalia, ils ont en effet investi au sens propre et figuré en 2019 dans ce club féminin au bord de la faillite, alors dernière équipe de volley en première division du championnat pro national. « Nos filles y étaient licenciées depuis qu’elles avaient 8 ans. C’est l’émotion et la volonté d’aider qui nous ont décidés d’agir pour tenter de sauver le club. J’ai découvert un nouveau monde où il y avait beaucoup de belles valeurs, mais un déficit de méthodes professionnelles et d’ambition. » Celui qui est ainsi nommé président utilise les méthodes de consulting pour effectuer l’audit et la stratégie à mettre en place. Et le challenge a été d’ampleur, c’est peu de le dire, pour ce consultant expert en transformation. « Il nous fallait changer de modèle, définir une nouvelle ambition, rendre le produit attirant, trouver une salle aux normes et de plus grande capacité, attirer plus de public, améliorer le staff sportif et le système de performance, et pour cela, attirer un bon coach et des talents. Nous avons aussi triplé le budget en 5 ans. Et ça a commencé à porter ses fruits ! » Pour preuve, en 2024, le club est redevenu un club leader de ligue A féminine (la première en volley-ball) et l’équipe a été sacrée championne de France. En parallèle, Philippe Peters est aussi depuis 4 ans membre du board et du comité exécutif de la Ligne nationale de volley.
Rewind.
L’opportunité corporate en Asie
Le diplômé (Master of Science Ingénierie électrique et électronique) de l’École nationale supérieure de l’Électronique et de ses Applications (ENSEA), en 1988, puis de l’ESSEC en 1990, a une carrière « à l’envers par rapport aux standards que l’on voit généralement dans le secteur ». Philippe Peters aime à dire que « la vie est faite d’imprévus et d’émotions, il n’y a pas que de la logique, ce sont aussi les opportunités qui m’ont guidé ». En effet, à sa sortie de l’école de commerce, le jeune diplômé a une offre de Bain & Company qu’il décline. « Je devais faire mon service militaire et j’ai décidé de l’effectuer en coopération. Je suis parti sur un coup de cœur à Singapour dans une grosse PME technologique, une success-story des années 1990, Markem-Imaje, dans laquelle je suis resté 4 ans. » Et où, engagé comme manager des ventes, Philippe Peters a évolué comme managing director, « pilotant des projets de croissance en Asie » pour l’un des leaders du marquage industriel par jet d’encre et laser, et envoyé notamment en mission au Japon pour « négocier un accord de distribution à Tokyo » et à Séoul pour « redresser la filiale coréenne en 18 mois ».
Dès son arrivée en France, Philippe Peters a une nouvelle opportunité de repartir sur le continent asiatique, à Hong-Kong cette fois, pour un groupe familial, Porcher Industries (fibres textiles techniques), en qualité de CEO de la région Asie/Pacifique, « une activité à la fois industrielle et commerciale, une aventure valorisante, excitante, attractive, et aussi mieux rémunérée que les postes classiques en France, du fait des avantages de l’expatriation et des bonus de résultats ». Six années « formidables » durant lesquelles il aura beaucoup « appris et expérimenté », mais qui ont aussi trouvé leurs limites dans « la routine de gestion d’une activité ».
L’aventure française Bain & Company
Retour à la case France pour cet expert Industrie avec l’envie de tenter enfin l’aventure du conseil en stratégie à l’aube des années 2000 après ces 10 années asiatiques. « J’ai postulé dans différents cabinets, et j’ai finalement retrouvé Bain qui a été ma plateforme, ma fondation pour l’apprentissage du métier avec ses méthodes à la fois assez simples et fortes, que j’ai trouvées plus diluées dans les autres cabinets. » Qu’est-ce qui différencierait autant Bain de ses concurrents ? Une façon, selon Philippe Peters, de « dire les choses clairement et sans ambages (aux clients comme en interne, ndlr) », et le mantra de « l’answer first », une méthode de travail basée sur les hypothèses, avec « à partir d’une situation, nous formulons les questions et des hypothèses que l’on éprouve analytiquement ». Et enfin, une méthode de travail en équipe axée sur le MBTI, outil d’évaluation des personnalités, qui « nous permettait d’échanger sur nos profils de personnalité en amont des missions afin de mieux travailler ensemble ».
Cartes postales de Russie
Promu principal chez Bain en 2007, l’insatiable Philippe Peters a capté en 2008 une nouvelle opportunité au Boston Consulting Group en Russie, souhaitant alors suivre son épouse qui prenait « un beau poste » dans son pays d’origine, éditrice en cheffe pour Elle Deluxe Russie (groupe Hachette Filipacchi). À l’origine, une coïncidence et une rencontre. « J’avais une mission en cours avec Bain pour une grande banque française à Moscou. Dans la rue, j’ai rencontré une ancienne de Bain Paris travaillant depuis pour le BCG Moscou me disant que le cabinet se développait. En moins de 48 h, j’ai rencontré le senior partner pour la région, en quelques jours, j’ai eu une offre de partner. » Quatre années au sein du bureau moscovite du BCG où Philippe Peters apprend la langue et son nouveau rôle, avec à la clef les nouvelles missions dédiées : développement commercial, définition de la stratégie sectorielle et des grands comptes, recrutement… « Comme étranger, cela n’a pas été toujours facile, mais ça a plutôt bien marché. J’ai élargi mes compétences secteurs, la banque, les minerais, l’énergie, les télécoms, la pharma. Et le bureau est passé de 50 à 150 consultants. »
Après une année sabbatique entre 2011 et 2012, où le partner souhaitait être « plus proche de sa famille », Philippe Peters est approché par un cabinet de chasse international qui recrutait pour la firme EY. Peu convaincu de prime abord pour aller dans un Big Four, le consultant se laisse finalement séduire par la force de frappe EY et leur vision pour réussir les transformations d’ampleur en tant que consultant en stratégie, et intègre le bureau de Moscou comme managing partner à la tête de la practice Stratégie, puis Consulting pour la région CIS (Russie, Ukraine, Kazakhstan, Azerbaïdjan) durant 5 ans. Une mission qui « a marché modestement du point de vue des méga-transformations, car le marché n’était pas mûr ». Cette expérience lui a cependant permis « de construire le métier de consultant en stratégie d’EY en recrutant, en codifiant ce modèle très hybride de compétences et en développant des outils opérationnels ».
Voyage en terres EMEIA
Ce qui ne l’a pas empêché pour autant d’accepter un nouveau défi d’EY en 2017, un poste basé à Paris, où il souhaitait rentrer au plus près de sa famille : être la tête de pont de la practice Strategy Consulting de la région EMEIA (Europe/Moyen-Orient/Inde/Afrique) –l’année de la création d’EY-Parthenon en France. Et ce, pour « orchestrer, mettre en musique », plus de 1000 consultants, apprenant à « manager différemment, à créer une communauté avec des intérêts communs », au sein d’un méga partnership « assez dilué, mais solidaire » et « dans une culture différente des cabinets de conseil en stratégie ».
Chez les « Vikings » scandinaves
En 2021, Philippe Peters a de nouveau des fourmis dans les jambes. Fort d’un échange avec « Alex, un bon ami de McKinsey New York », le consultant apprend que le cabinet est en cours de développement de régions et practices phares, notamment la Scandinavie, « à la fois flatté et excité de cette possibilité n’ayant jamais travaillé dans cette région ». Nouvelle réunion avec son coach d’épouse, qui y voit « une belle opportunité », décidant même ensemble de la ville d’implantation : Helsinki, Oslo, Stockholm, Copenhague ? Ce sera Oslo, « The place to be ». Après pas moins de 15 entretiens, l’expert Industrie/Énergie intègre le bureau norvégien de McKinsey pour devenir responsable de la practice Global Energy & Materials (GEM) pour la région. « Ce bureau de 150-200 consultants est historiquement axé sur la stratégie. Ma mission était de redynamiser la practice GEM, qui avait été le plus gros secteur du cabinet, mais était en déclin. C’était très intéressant sur les contenus, énergies et matériaux traditionnels et renouvelables, et sur la mission de croissance qui nous a permis de tripler l’activité en 3 ans. ». Et ce, dans un cabinet où le style de leadership du cabinet n’a pas toujours bonne réputation. « Les consultants sont souvent vus comme arrogants, très top-down, mais j’ai été agréablement surpris par la diversité et l’écoute… Il y a également dans ce cabinet une vraie profondeur d’analyse, plus forte qu’ailleurs. »
Actuellement engagé à 50 % de son temps dans sa passion de cœur que sont les Mariannes 92, Philippe Peters continue de construire sa carrière. Des projets pros, il en a. « En 2025, il y a de fortes chances que j’embraye sur autre chose. Ma vocation ne se réduit pas à une société unipersonnelle, car j’aime m’emparer de sujets complexes au croisement de la stratégie, des nouvelles technologies et de la transformation, et les mettre en œuvre, construire et réaliser une vision. » Nous n’en saurons pas plus… Peut-être attend-il la prochaine opportunité…
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