Deux ans à la tête de l’équipe cycliste Decathlon AG2R La Mondiale : la mission inédite de Benjamin Abitbol
Après 10 ans de conseil en stratégie dédiés au sport chez EY-Parthenon et 18 mois chez Decathlon-AG2R La Mondiale, Benjamin Abitbol se prépare pour de nouvelles aventures. Son univers ne change pas : le sport business. Portrait.
Dimanche 23 juin 2024. Trois coureurs de l’équipe Decathlon-AG2R La Mondiale comptent parmi les 10 premiers à franchir la ligne d’arrivée des championnats de France de cyclisme sur route, dont le vainqueur, Paul Lapeira. Ce succès n’est pas isolé. Depuis le début de l’année, l’équipe a déjà gagné 26 courses et accédé au podium à 55 occasions et occupe la troisième place du classement provisoire par équipe 2024 de l’UCI. Du jamais vu depuis plus de 10 ans !
Cette remontada de l’équipe cycliste basée à Chambéry doit beaucoup à Benjamin Abitbol. Il a été à son chevet pendant plus de 2 ans. « La mission de conseil en stratégie devait durer 5 semaines, raconte l’ex-directeur chez EY-Parthenon. Ce fut 9 mois parce que nos premières réponses et analyses ont soulevé d’autres questions. » La période a notamment été marquée par la décision du groupe d’assurance et de prévoyance de passer d’un statut de sponsor, présent depuis 25 ans, à celui de propriétaire à 100 %. Un choix auquel, là encore, Benjamin Abitbol n’est pas étranger : une partie de sa mission de conseil a été justement de peser les avantages et les inconvénients des différents scénarios posés sur la table. Finalement, « lorsque le groupe a décidé de racheter l’équipe cycliste, nous avons bâti un plan de transformation pour redresser cette PME ».
Transformer les trajectoires financières, sportives et médiatiques
C’est d’ailleurs à l’issue de cette acquisition, en juin 2022, que la carrière professionnelle de Benjamin Abitbol prend un tournant déterminant. En effet, l’AG2R La Mondiale lui propose d’intégrer l’équipe AG2R-Citroën pour mettre sur pied et entamer la transformation proposée. Pour cela, elle souhaite le nommer directeur adjoint de l’équipe. « J’ai dit “avec plaisir” », lance-t-il. Le ton de sa voix ne laisse aucun doute : il assume pleinement ce choix et pour plusieurs raisons. La première est humaine. Il s’entendait bien avec la direction générale de l’équipe en place. Un lien de confiance fort s’était installé au fil de la mission de conseil. La seconde était le défi proposé : « Relever une PME passée de la 8e à la 18e place mondiale en 2023. » La troisième est sa conviction que le conseil en stratégie a toute sa place dans le développement d’une équipe cycliste.
Fort de sa motivation totale pour se lancer dans cette aventure, il obtient d’être détaché d’EY-Parthenon pour se consacrer à 100 % dans ses nouvelles missions : « redresser les trajectoires financières, sportives et médiatiques de l’équipe », résume l’ancien membre de la classe prépa au lycée Louis-Le-Grand à Paris. Il peut alors pleinement s’engager avec passion et méthode dans le renouveau de l’équipe. Rien n’est omis. Tout est challengé avec la collaboration de tous les acteurs en interne à travers un comité de direction hebdomadaire, un comité de recrutement, etc. « Énormément de choses ont changé en 2 ans, relate Benjamin Abitbol. Le management a changé. La gouvernance a changé. Les reportings ont changé. Les méthodes de travail ont changé. Même la façon dont les avions et hôtels sont réservés. »
Aucune décision sans son accord
Dès le départ, ce féru de sport intervient sur l’administratif, les finances, les ressources humaines, le juridique, mais aussi sur la partie business, et notamment les relations avec les sponsors, la recherche de nouveaux partenaires, la communication, le marketing… Le moindre détail est questionné pour être optimisé. Le matériel ou les véhicules ne font pas exception. Au point que rapidement, la partie sportive va aussi entrer dans son périmètre. Dès lors, rien ne peut se décider sans son accord.
Tout s’inscrit dans la perspective d’un retour planifié des bons résultats. « C’est inattendu que les bons résultats sportifs arrivent si vite, à ce niveau d’excellence, s’étonne Benjamin Abitbol avec un sourire de satisfaction du devoir accompli, en réaction aux récents résultats de l’équipe Decathlon AG2R La Mondiale. Bravo à l’équipe en place qui réalise un superbe travail. L’ambition était d’être parmi les 5 meilleures équipes du monde, mais pas dès 2024, plutôt en 26 ou 27. Pour 2024, il s’agissait de revenir dans les 15 meilleures et en 2025 dans les 10 meilleures. »
Decathlon AG2R La Mondiale, une expérience inédite et grisante
Pour parvenir à retrouver de la performance sur la durée, les habitudes et une partie de la culture de l’équipe ont été remaniées. Aucune décision n’est prise par une seule personne ou au hasard. La pertinence des courses inscrites au calendrier de l’équipe a été questionnée, tout comme les critères pour sélectionner les coureurs intégrés à l’équipe, la définition des profils à renforcer ou à alléger, les rémunérations, le matériel utilisé… Dans ces changements, il y a aussi la mise en place de processus et d’indicateurs qui permettent de suivre et comprendre ce qui se passe, et valider les tests. « Cela a généré d’autant plus de travail pour moi, mais c’était d’autant plus grisant comme expérience » fait remarquer, sans l’ombre d’un regret, ce passionné des mathématiques. Et pour cause.
Il prend un réel plaisir à son poste. « Je n’avais jamais travaillé dans une PME et à un poste de direction, commente Benjamin Abitbol. Le plan de transformation a été pensé de façon sur mesure pour embarquer le maximum de personnes historiques de l’équipe dans un nouveau projet. Et qu’elles contribuent pour aller plus loin et plus vite ». L’épanouissement est total. Quand sa mission s’arrête en fin d’année 2023, il réintègre EY-Parthenon. Mais rapidement, « je me suis rendu compte que je n’avais plus envie d’être un consultant ».
À la recherche d’un nouveau projet sportif tangible
À date, « je n’ai pas encore décidé de mon prochain projet, avoue-t-il. Des discussions sont en cours. Je reçois pas mal de sollicitations ». Et de préciser : « Que je crée quelque chose ou que je rejoigne un dispositif avancé, ce sera dans le sport, c’est sûr. » Et d’ajouter : « Il y a encore un boulevard pour innover, diversifier les revenus, augmenter les recettes, mieux dépenser, moderniser les processus. » Participer à la réussite de la chaîne payante de la Ligue de football ou contribuer à la relance du club de basket de Limoges pourrait l’intéresser. Car l’homme n’a pas peur du niveau élevé des difficultés, bien au contraire, mais à une condition : « Contribuer à un projet tangible. »
Sport business : un choix atypique ?
Le sport s’apparente comme une ligne et une hygiène de vie pour Benjamin Abitbol. Sur le plan professionnel, c’est à l’occasion de son cursus à HEC Paris que son intérêt pour le business dans le sport prend forme. Ses stages lui permettent de dessiner sa voie, notamment ses 6 mois chez YouFoot, une plateforme communautaire pour les passionnés de football, puis à nouveau 6 mois chez Canal+. « J’ai bâti mon parcours pour faire autant que possible, et aussi vite que possible, des missions dans le sport business », explique l’ancien consultant du Boston Consulting Group. Et d’ajouter : « Il y a 15 ans, quand j’étais sur les bancs de l’école, c’était encore très atypique de s’intéresser au sport business. »
À la sortie de HEC en 2013, il intègre Boston Consulting Group quelques mois, avant de rejoindre EY-Parthenon. Son expérience s’y diversifie à l’envi. « J’ai travaillé pour des équipes professionnelles dans plusieurs sports, des médias qui diffusent des compétitions, des opérateurs de paris sportifs, des sponsors, des événements dans des stades, des équipementiers sportifs, des fonds d’investissement, des start-ups de la sport tech… Tout l’écosystème du sport sous différents formats de projets », énumère Benjamin Abitbol. Cette diversité lui donne un regard atypique sur l’économie du sport.
Pas de sport sans moments de partage collectifs
Cela va même beaucoup plus loin. Les valeurs du sport sont les siennes, car, le sport occupe beaucoup de son temps libre, par plaisir, par défi, mais pas pour faire du haut niveau. « Quand j’étais enfant et adolescent, j’ai beaucoup joué au football, au tennis, au ping-pong, au basket-ball avec des compétitions départementales et régionales, mais pas plus », se rappelle-t-il. Devenu adulte, il continue d’avoir une pratique sportive intense : boxe anglaise, ski de randonnée, triathlon récemment… « Je veux que cela reste un plaisir, même si je me fixe des défis plus ciblés, explique Benjamin Abitbol. Et puis, je le fais pour me dépasser, pour ma santé, pour mon équilibre mental, pour mon physique, et pour inspirer mes enfants et partager du temps avec eux. »
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