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Fondateurs, dirigeants, garde-fous : dans les licornes françaises, des stratèges tous azimuts

Qu’ils soient cofondateurs ou membres des comex, les consultants jouent un rôle croissant dans la vie des start-up.

Mais alors que les jeunes pousses made in France auront levé le chiffre record de 5,5 milliards d’euros en 2020, le passage par la case conseil est-il la recette secrète pour réussir ?

Pierre-Anthony Canovas
24 Nov. 2020 à 14:52
Fondateurs, dirigeants, garde-fous : dans les licornes françaises, des stratèges tous azimuts

Pierre Vergnes a rejoint en septembre Doctolib en tant que chief financial officer groupe tandis que Juliette Le Gelard devenait le même mois people strategy director au sein de la plateforme française de prise de rendez-vous médicaux. Trois mois plus tôt, c’était Marie Chabal Filleteau qui intégrait la société en tant que global people developpement director. En février, Arthur Martiano était, lui, nommé directeur de la stratégie, après trois ans chez Airbnb.

Les points communs de ces quatre cadres ? Ce sont tous d’anciens consultants ou d’anciens des cabinets de conseil en stratégie : le premier fut partner chez Kearney, les autres viennent du Boston Consulting Group, où elles étaient respectivement principal et DRH, et Arthur Martiano fut sept années durant, de 2010 à 2017, consultant chez Bain, jusqu’au grade de manager.

Ces recrutements d’ex-consultants en stratégie ne sont pas le fruit du hasard. La plateforme née en 2013 – cocréée par un autre ancien de la stratégie, Stanislas Niox-Château, qui fut brièvement consultant chez Corporate Value Associates – a levé 150 millions d’euros au printemps 2019.

Elle est entrée ainsi dans un club restreint qui compte à peine une dizaine de membres en France : celles des « licornes », ces sociétés valorisées à plus d’un milliard de dollars. 

Or, dans ce club, ces boîtes au potentiel majeur ont pour autre caractéristique commune de voir de nombreux ex ou actuels consultants en stratégie graviter en interne ou en externe, soulignant la grande proximité entre ces deux mondes.

Des ex-consultants à des postes clés

Mirakl qui a réalisé la plus importante levée de fonds pour une start-up française en septembre 2020 avec 300 millions de dollars comprend aussi un ancien consultant parmi ses dirigeants en la personne du directeur des opérations Florian Bressand, un ex-partner de chez McKinsey.

Chez BlaBlaCar, parmi les consultants, on peut citer Audrey Wolfovski Barthuel qui est general manager France et Benelux, venue des rangs de Bain ou encore Beatrice  Cossa-Dumurgier, chief operating officer, issue de McKinsey.

Du côté de la start-up de gaming en hyper croissance Voodoo qui a fait entrer le Chinois Tencent à son capital cet été – la valorisant 1,4 milliard de dollars –, aucun des deux cofondateurs Alexandre Yazdi et Laurent Ritter n’est passé par la case conseil. Le duo a en revanche nommé Marianne Brucy, une consultante venue de Mars & Co, comme directrice marketing.

Sortir la tête du guidon

Ex-consultant senior chez Roland Berger passé par Alvarez & Marsal puis COO chez Proprioo qui a levé 20 millions d’euros en 2019, Pierre-Arthur Chatard estime que le profil des consultants est précieux. « Vous avez besoin de collaborateurs bien structurés pour réussir et bien souvent les consultants ont cet état d’esprit », explique celui qui a lancé il y a un an sa propre structure pour accompagner les dirigeants d’entreprise.

Celui qui est désormais indépendant met ainsi en avant le rôle du consultant. « Un allié particulièrement précieux des fondateurs pour aider à la structuration de l’entreprise et à la prise de décision » qui permet, comme il le fait lui-même actuellement pour une licorne française dont il ne souhaite pas dévoiler le nom, « donner un regard extérieur à des gens qui sont la tête dans le guidon ». Dans le cas contraire, les conséquences sont nombreuses et peuvent être graves par exemple avec des fonds mal utilisés. D’après lui, entre 15 et 20 % des fonds seraient ainsi jetés à la poubelle par manque d’expérience chez des patrons relativement jeunes.

Autre enjeu dans le passage du conseil en stratégie à ces licornes : des cultures d’entreprises franchement différentes. « Il y a une différence entre le conseil qui est un environnement souvent théorique, et les start-up qui adressent des problèmes aussi bien stratégiques qu’opérationnels avec des variétés de profils beaucoup plus larges » prévient Pierre-Arthur Chatard, évoquant le risque d’une homogénéité des profils.

Si le réseau acquis dans le conseil peut être également précieux pour des partenariats ou des levées de fonds, un risque demeure pour le consultant devenu entrepreneur : celui de ne pas être conscient de ses faiblesses. « Un consultant souhaitant monter une start-up doit avoir conscience des forces que lui procure son parcours. Il doit également être conscient des traits de personnalité nécessaires à son succès. L’humilité et le bon sens paysan en font partie. » Et Pierre-Arthur Chatard d’ironiser : « On n’est pas toujours formé à l’humilité quand on sort des plus grands cabinets de conseil… »

« La boîte à outils » venue du conseil

Et quid des boîtes qui ne sont pas encore des licornes ? Pour Maxime Albertus, un ancien manager de McKinsey, cofondateur de la start-up Comet Meetings, spécialisée dans l’organisation de réunions et séminaires d’entreprises créée en 2016 et qui a levé 30 millions d’euros en septembre 2020, l’apport du cabinet est important.

« L’expérience en cabinet donne un bon bagage technique comme faire une école de commerce ou d’ingénieur, cela donne un tool kit, en termes de structuration, de delivery de projets, de capacité à apporter un message. »

Diplômé de HEC en 2011, le jeune entrepreneur a passé plusieurs années chez McKinsey tout comme son cofondateur et actuel DG Victor Carreau tandis que le troisième cofondateur de Comet, Nicholas Findling, a fait ses classes chez Bain.

Malgré une certaine omniprésence des profils de consultants en stratège dans ces start-up françaises en forte croissance, à ses yeux, il est plus important d’avoir une « complémentarité » dans les parcours et les compétences des cofondateurs. Car, il est clair, la case conseil « n’est pas le facteur clé du succès ».

Pierre-Anthony Canovas pour Consultor.fr

Crédit photo : New York, USA - 15 May 2020: Doctolib mobile app logo on phone screen. Adobe Stock. 

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Pierre-Anthony Canovas
24 Nov. 2020 à 14:52
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