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J’ai créé ma boîte : Romain Lebègue

Vu de loin, le parcours de Romain Lebègue peut sembler quelque peu hétéroclite, avec une trajectoire qui l’a conduit, à sa sortie de l’EM Lyon, du conseil en stratégie aux mobilités douces en passant par la livraison de produits frais et l’automobile. 

Bertrand Sérieyx
23 Fév. 2024 à 16:56
J’ai créé ma boîte : Romain Lebègue
© D.R.

Le tout en un peu plus de 18 ans, tour à tour sous le statut de salarié, d’entrepreneur et de freelance, au gré des projets. En 2024, il entame sa deuxième création d’entreprise. Nous lui avons demandé de nous en dire davantage sur ses motivations, les apports de son passage au sein du cabinet Roland Berger, et la différence de point de vue entre consultant et entrepreneur.

Quel est le métier de Bicytrust, l’entreprise que vous venez de créer ?

Bicytrust cherche à résoudre le problème des vols de vélo, en combinant plusieurs solutions : le marquage, l’assurance, le tracking… L’objectif est d’aider les cyclistes à faire face au risque de vol par tous les moyens possible (technologiques ou non), et ainsi contribuer au développement de l’usage du vélo.

L’entreprise se crée donc autour d’un problème à résoudre, et non d’une solution particulière ?

Tout à fait. Nous nous inscrivons dans une logique de développement de solutions au fil du temps, en intégrant au fur et à mesure les nouvelles évolutions technologiques qui émergent pour créer de nouveaux services. Sans pour autant nous interdire de travailler nous-mêmes sur des innovations technologiques – par exemple dans le domaine du tracking.

Pourquoi vous êtes-vous associé à un ancien de Roland Berger pour lancer votre entreprise ?

Cela s’est fait un peu par hasard. Je cherchais surtout quelqu’un qui avait une expérience du domaine du vélo, tout en ayant la fibre commerciale ; c’était le cas de Franklin Guinier, que j’ai rencontré il y a 15 ans chez Roland Berger. Je l’ai appelé, et le projet a suscité son intérêt. Nous avons des parcours et des profils à la fois similaires et complémentaires. Nous avons tous les deux travaillé dans le domaine de l’automobile pour évoluer vers des sujets plus larges autour de la mobilité, avant de nous retrouver autour du vélo.

Je ne me suis donc pas associé avec lui parce qu’il avait travaillé chez Roland Berger, mais ce point commun entre nous a suscité ma confiance : pour moi, c’était un gage de sérieux, j’étais rassuré sur ses méthodes de travail, sur son niveau d’exigence et d’ambition. Et même si je ne cherche pas nécessairement à m’associer à des gens qui me ressemblent, le fait d’avoir tous deux une expérience dans le même cabinet – qui plus est avec le même mentor, Jacques Radé [élu partner du bureau de Paris en 2007, puis partner du bureau de Bruxelles de 2013 à 2018, expert Industrie automobile - ndlr] – nous rapproche. C’est une manière de nous rattacher à une histoire commune !

Qu’est-ce qui vous a poussé à entreprendre ?

J’ai eu envie de faire des choses concrètes, d’avoir les mains libres, sans avoir de compte à rendre à qui que ce soit – si ce n’est aux clients, naturellement ! Et puis il y a également ce sentiment exaltant de partir d’une page blanche : tout est à construire. Cette situation peut aussi exister quand on est salarié, dans une certaine mesure : quand j’ai rejoint Identicar [devenu depuis Roole, un club automobile proposant notamment des services d’assurance complémentaire - ndlr], j’ai eu l’occasion de travailler sur des sujets de développement dans lesquels peu de choses avaient été initiées. Mais ma mission s’inscrivait dans une organisation structurée, et certains aspects du projet étaient déjà lancés.

Bien sûr, l’entrepreneuriat implique un risque financier significatif, et de temps en temps on est contraint de repasser par la case « salariat » pour gagner sa vie !

Et votre période en tant que consultant freelance ?

J’ai simplement répondu à une opportunité. Lorsque j’ai revendu ma première entreprise, Fresh Corner [à mon-marché.fr, ndlr], Jacques Radé m’a proposé de travailler avec lui sur des projets de conseil en freelance. Cela m’a permis de reprendre le consulting avec plus de liberté que dans un cabinet. Et de continuer à acquérir de l’expérience dans divers secteurs.

Pouvez-vous nous en dire davantage sur Fresh Corner, votre première entreprise, et sur ce que l’expérience vous a enseigné ?

L’idée de Fresh Corner était de développer un service de livraison de paniers de fruits et légumes frais à destination des salariés des entreprises. À l’époque, les structures qui faisaient dans le circuit court étaient essentiellement associatives et locales. Pour moi, il y avait une place pour un acteur qui serait capable de gérer efficacement la logistique entre producteur et consommateur, en utilisant le lieu de travail des salariés comme point de distribution. Les employeurs se chargeaient de la communication auprès de leurs collaborateurs.

Nous avons fait le choix de tout internaliser – le site Internet, la logistique, la préparation des commandes, les livraisons… L’activité s’est bien développée, nous avons référencé beaucoup d’entreprises partenaires qui nous faisaient confiance pour livrer des fruits et légumes frais à leurs salariés. Mais l’intérêt de ces derniers pour le service n’était pas suffisamment au rendez-vous. Rapporter un panier chez soi, surtout en transports en commun, ce n’est pas toujours pratique. Nous sommes assez vite arrivés à un plafond en matière de volume de commandes. Beaucoup d’entreprises se sont lancées dans le secteur à la même époque et ont connu les mêmes difficultés : il était délicat de trouver le bon modèle économique, en payant bien les producteurs tout en limitant les prix pour le client final…

Qu’est-ce qui vous a amené chez Roland Berger, au début de votre carrière ?

Comme beaucoup d’étudiants qui sortent de leur école, j’ai commencé par le conseil. C’était un moyen de reporter les décisions à prendre sur mon parcours professionnel. Tout en apprenant beaucoup de choses et en découvrant des branches, des activités, des entreprises très variées.

En quoi le conseil en stratégie vous a-t-il aidé dans vos projets de création d’entreprise ?

J’ai acquis chez Roland Berger beaucoup de compétences relevant des « hard skills » du conseil en stratégie : la capacité à construire un projet à partir de zéro, avec une partie financement chiffrée, une partie « marketing client », une partie distribution et logistique… Tous les aspects du business model. J’y ai appris également à exprimer clairement mes idées et mes projets pour entraîner l’adhésion des partenaires, des investisseurs, de toutes les parties prenantes.

Et qu’est-ce qui vous a manqué ?

L’approche « conseil » que l’on déploie dans les cabinets est très structurée. Or, quand on lance une activité entrepreneuriale, il faut accepter de ne pas être trop structuré. C’est vraiment le principal travers à éviter lorsqu’on a un parcours de consultant et que l’on souhaite partir sur un projet d’entreprise. Il faut avoir confiance, savoir se lancer à l’eau sans trop savoir où l’on va. On ne peut pas tout prévoir, tout anticiper, tout modéliser. Il y a une part de risque qu’il faut bien accepter.

Comment expliquer ce décalage ?

Le consultant a tendance à cadrer beaucoup de choses en amont avec le client, puis à dérouler le plan tel qu’il a été conçu. C’est ce que le client lui demande. Mais dans la réalité, nous ne savons pas exactement quel marché, quelle réalité nous allons trouver. Il faut être agile pour pouvoir pivoter facilement. Avec le recul, je me dis que lorsque nous avons lancé Fresh Corner, nous avons sans doute trop fait confiance aux études de marché. Chez Roole, j’ai appris qu’il valait mieux partir d’une intuition, la tester sans trop investir dessus, afin d’identifier ce qui fonctionne vraiment, ce qui répond à des besoins réels. C’est l’approche « conception produit », qui est bien plus efficace en pratique qu’une planification initiale trop rationnelle.

Pour résumer, l’œil du consultant reste très pertinent sur tout ce qui concerne la méthode à suivre pour construire un business plan et un modèle économique. Et c’est absolument fondamental : les chiffres ne mentent jamais. C’est un atout considérable pour se lancer dans un projet à partir de zéro. Mais pour la suite, le consultant aura tendance à freiner l’initiative, en demandant à tout moment « Est-ce que tout cela est backé par les chiffres ? », sans accepter la part de risque qui est inhérente à l’entrepreneuriat.

Pratiqueriez-vous différemment le métier de consultant si vous le repreniez aujourd’hui ?

Oui, certainement. J’y intégrerais tout ce que j’ai appris dans ma carrière et notamment dans mes projets de création d’entreprise. À savoir, le fait que les choses se font par étapes, progressivement, en s’adaptant au fur et à mesure. Je crois assez peu aux plans de 400 pages que l’on rédige soigneusement puis que l’on consigne dans un placard… Je pense qu’il faut plutôt fixer de grandes lignes directrices, puis accompagner les clients pas à pas. Plutôt que de construire des plans détaillés à 3 ans, il faudrait élaborer une vision à 3 ans, puis laisser les opérationnels construire le projet petit bout par petit bout. Cela dit, il est possible que la pratique du métier de consultant ait évolué depuis mon époque !

Roland Berger
Bertrand Sérieyx
23 Fév. 2024 à 16:56
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Adeline
automobile - mobilités
entrepreneur, mobilités douces, vélo, Bicytrust, Roland Berger, Jacques Radé, industrie automobile, emlyon, Romain Lebègue, alumni
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Roland Berger
2024-02-26 20:56:34
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