J’ai créé ma boîte : Samy Ouardini
Quelques minutes d’échange suffisent pour être conquis par la personnalité de Samy Ouardini, cofondateur et Chief Executive Officer de Ramify. Interview découverte.
Avec Olivier Herbout, Samy Ouardini a fondé Ramify, une plateforme qui veut démocratiser la gestion de patrimoine. L’aventure entrepreneuriale commence fin 2020. Pas de hasard pour Samy Ouardini. Il avait une petite horloge interne, un compte à rebours qui tournait avec l’objectif de créer son entreprise avant ses 30 ans. Il franchit le pas à 29 ans et 9 mois, après un début de carrière dans le trading, puis une période d’exploration et d’observation dans le monde du conseil chez Oliver Wyman.
Pourquoi avoir choisi le conseil avant de créer Ramify ?
J’ai fait du conseil parce que je souhaitais toucher à beaucoup de choses différentes. Je voulais faire de l’entrepreneuriat, mais je me disais qu’une expérience dans une entreprise avec des standards et une exigence de haut niveau pouvait beaucoup m’apporter, et potentiellement me préparer à la création d’entreprise. En fait, j’ai signé un pacte avec moi-même : « OK, tu as 25 ans, tu rentres dans ce cabinet [Oliver Wyman, ndlr] avec une seule condition : tu montes ta boîte avant 30 ans. » Ce qui m’a conduit à ne pas optimiser ma carrière dans le cabinet de conseil, à ne pas choisir de verticale et à ne pas toujours travailler avec la même équipe. Cette approche m’a permis de traiter une quinzaine de projets et d’être très ouvert sur les sujets et la géographie des missions. Je dois reconnaître que j’ai aimé ce que j’ai fait pendant 4 ans.
Avez-vous l’impression que si vous n’aviez pas eu cette expérience dans le conseil, vous n’auriez pas déployé la stratégie que vous avez choisie ?
Tout ne s’explique pas par le conseil, car c’est aussi très lié à ma personnalité. Cependant, je sens que cela m’a aidé dans l’entrepreneuriat, dans l’aspect création de structure et d’organisation, car j’ai vu beaucoup d’organisations différentes et de départements. Quel type de profil ? Pourquoi et comment créer un département opérationnel ? Comment s’assurer que les process sont robustes ? Comment s’assurer que les gens travaillent efficacement ? Le conseil m’a donné un regard sur l’entreprise et la création d’un système qui peut en partie fonctionner sans les humains.
Doit-on comprendre que vos 4 années en conseil vous ont appris à communiquer avec les grandes structures et à comprendre leur mode de fonctionnement pour faire mouche quand vous les abordez ?
C’est exactement ça. Et aussi mieux appréhender les dynamiques internes. C’est-à-dire de s’assurer, pendant les premiers meetings, de bien comprendre qui est le décisionnaire et en combien de temps une décision peut être prise. Ce sont des critères très importants dans le conseil si l’on veut mener à bien un projet. Ce sont des réflexes que j’ai maintenant et que j’applique.
Est-ce que vous diriez à un jeune qui veut créer son entreprise de passer par le conseil ?
Oui. Pour deux raisons. La première est que le conseil aide à pitcher, à structurer un propos avec des présentations impactantes, par exemple pour les levées de fonds. La deuxième porte sur le regard que l’on peut avoir sur l’entreprise. Un regard biaisé, mais positivement, car il porte sur des organisations de 30 000 personnes, pas sur des start-ups. En effet, le conseil permet de voir les structures de manière plus claire, de comprendre pourquoi avoir une organisation est hyper important et de mesurer quelle est la valeur d’un process. Il y a toutefois un point négatif.
Lequel ?
Parfois, dans le conseil, on cherche à optimiser avant de faire, on se positionne beaucoup dans la stratégie. Or, il y a une expression qui dit : « L’action précède la stratégie », en start-up en tout cas. Moi, j’aime ajouter un adjectif en disant « l’action mesurable précède la stratégie ». En effet, quand une entreprise est encore jeune, il vaut mieux faire beaucoup de choses et pouvoir mesurer l’impact pour ensuite poser sa stratégie, plutôt que de réfléchir pendant des mois à une stratégie et se rendre compte 6 mois après qu’elle ne marche pas.
Ce que vous décrivez là repose sur une approche très anglo-saxonne qui s’autorise l’échec en ouvrant plusieurs voies en même temps…
C’est exactement ça. Je suis persuadé d’une chose : ce qui fait le succès d’une jeune entreprise, c’est sa vitesse d’itération. Si elle est en mesure d’essayer une idée toutes les 2 semaines, en 3 mois, elle aura testé au moins 6 ou 7 idées. Peut-être qu’il y en aura 4 qui ne marcheront pas. Mais, il y en aura 2 qui vont marcher. Si on ne déploie qu’une idée en 3 mois, mathématiquement, elle a moins de chances d’aboutir.
Qu’est-ce que le conseil ne vous a pas appris ?
Dans une entreprise comme Ramify, nous ne sommes pas nombreux. Nous avons besoin d’une organisation hyper flexible et plate où l’information circule très très vite. Quand on a une idée, tout le monde s’aligne : chacun sait qui fait quoi, on explique à tout le monde, et on avance. Dans une organisation à 50 000 personnes, où intervient le conseil, les choses vont moins vite, et demandent de trouver un juste milieu.
Est-ce qu’il y a des cabinets de conseil qui vous accompagnent ?
Ramify ne fait pas appel à des consultants externes, parce que cela coûte trop cher, même les indépendants. Mais peut-être dans le futur. En revanche, j’échange avec le réseau que j’ai pu constituer de partners qui connaissent très bien le monde de la gestion d’actifs et de la finance. Je les sollicite pour avoir des insights de marché, quelques informations sur certains concurrents, et certaines dynamiques de marché. Toutefois, en interne, nous avons recruté des anciens du conseil. C’est le cas d’Amélie Yuan, directrice des opérations. Elle a été l’une de mes collègues chez Oliver Wyman, mais surtout elle a une belle expérience dans les services financiers. Et puis, elle aime les opérations, elle est très carrée, très cartésienne.
Une dernière question : vous vous exprimez volontiers en utilisant les outils de communication d’aujourd’hui. C’est assez original dans le monde de la finance et de la gestion de patrimoine, où on a plutôt des dirigeants discrets. Qu’est-ce qui explique ce choix d’être dans une communication personnalisée où vous mettez très en avant votre histoire ?
Alors, c’est une bonne question… Je suis assez d’accord : les acteurs traditionnels, dans notre domaine, privilégient la discrétion. Mais chez les acteurs « nouvelle génération », j’ai plutôt l’impression qu’Olivier et moi, nous nous mettons moins en avant que d’autres. Après, il y a une raison pour laquelle on se met en avant : nous sommes sur un marché dominé par les banques traditionnelles, les banques privées, les gros réseaux de CGP. Tous ont un historique qui parle pour eux. Vis-à-vis de certains, nous avons 100 ans de retard. Or, le business de la gestion de patrimoine et de la gestion d’actifs se base beaucoup sur la confiance à la marque. C’est elle qui amène les épargnants à investir, à placer leur argent chez nous. Et le meilleur moyen, quand on est encore petit et qu’on n’est pas encore une institution financière qu’on souhaite devenir, c’est de mettre en des personnalités qui inspirent confiance par leurs parcours, par leurs expériences passées. Il s’agit aussi de permettre de mettre un visage derrière une stratégie d’investissement, un service. C’est notre stratégie de marque. Pour le moment, la marque n’est pas assez grosse pour prendre le dessus sur les personnalités. Mais au fur et à mesure, nous n’aurons plus autant besoin de mettre en avant les personnes que la marque elle-même.
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