Le « Bureau Véritas des logiciels » que les cabinets de conseil s’arrachent
À l’occasion d’une augmentation de capital que l’éditeur de logiciels Cast a bouclée le 17 mai, la société française a vu le Boston Consulting Group – qui était déjà actionnaire – souscrire de nouvelles actions, trois ans après la signature d’un partenariat entre les deux entreprises.
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Une participation de 2 % à date qui traduit la régularité et l’importance de la collaboration entre Cast et le BCG, « avec qui nous travaillons mieux et plus », dit Vincent Delaroche, le PDG de l’éditeur. Mais d’autres sociétés de conseil ont aussi recours aux services d’évaluation de la fiabilité et de la performance des logiciels, comme McKinsey ou A.T. Kearney.
Et pour cause : le « Bureau Véritas des logiciels », comme l’appelle Vincent Delaroche, permet de packager et d’industrialiser ce que les cabinets de conseil ne peuvent pas faire eux-mêmes – ou alors artisanalement – sur des sujets aussi sensibles que la protection des données ou les accès non désirés à des applications informatiques d’entreprises. Un accélérateur avec lequel les relations commerciales sont amenées à augmenter, dit-on du côté du BCG.
BCG et Cast en binôme dans une grande banque américaine
La scène se passe dans une grande banque américaine. Sa direction informatique met sur les rails sa transformation digitale. Première étape : en connaître un peu plus sur son portefeuille de logiciels entre ceux qui sont utilisés en back-office en interne pour la gestion des opérations de la banque et ceux du front office auxquels les clients ont par exemple recours lorsqu’ils consultent leurs comptes en ligne.
Une introspection que ses équipes ne savent pas faire. Le BCG est donc mandaté par la banque et ne vient pas seul. Dans son sillage, Cast, la société française spécialiste des audits et mesures des logiciels qui intervient aussi bien auprès de portails d’e-commerce que dans les systèmes de facturation de sociétés de télécommunication. Son objectif à chaque fois est de passer en revue la qualité des logiciels et la performance des équipes informatiques.
Cast se charge cette fois-ci d’auditer une centaine de logiciels différents. Son « scanner à logiciels », comme le surnomme Vincent Delaroche, le PDG de la société, génère des analyses brutes. Celles-ci évaluent la résilience du logiciel, son agilité, la facilité avec laquelle il pourrait être transformé ou sa capacité à évoluer vers l’informatique en nuage.
Le BCG se saisit ensuite de ces rapports et les transforme pour en tirer des recommandations adressées in fine à la banque. Ce binôme Cast-BCG est loin d’être une première. En effet, le nombre de projets menés conjointement par Cast et le BCG depuis qu’ils ont officialisé un partenariat en 2015 n’a cessé de progresser. Vincent Delaroche les estime à une vingtaine par an.
« Le deal flow avec Cast va augmenter »
Alors que Norbert Faure, le managing director de BCG Platinion, le bras armé technologique du BCG, estime que « le deal flow avec Cast va augmenter ». La concrétisation de cette relation grandissante a été donnée le 17 mai lorsque Cast a bouclé une augmentation de capital 10,7 millions d’euros. Parmi les actionnaires existants qui ont participé à l’opération, le BCG : le cabinet détenait déjà 2 % du capital et a souscrit 65 564 actions nouvelles. Sa part post-opération restera à 2 %.
« On travaille mieux et plus avec le BCG, car quelques senior partners aux États-Unis, en France, en Allemagne et au Royaume-Uni comprennent très bien comment tirer parti de la technologie Cast pour délivrer de la valeur à leur client. » A fortiori, Christophe Duthoit, senior partner et managing director du BCG, siège au conseil d’administration de Cast.
« Cast nous permet trois choses. Il nous aide à cartographier les liens entre les différents logiciels utilisés dans les très grands groupes et à voir quelle est la flexibilité entre les uns et les autres. Puis à estimer les investissements que leur mise à jour nécessitera. Secundo, il analyse la qualité du code [une application critique en grande entreprise compte facilement un million de lignes de codes, NDLR] et son potentiel d’évolution. Enfin, il établit clairement quelles données sont utilisées par quel logiciel », détaille Norbert Faure.
Données : un sujet dans les mains des directions générales
Un dernier point qui n’est pas anodin le jour de l’entrée en vigueur du règlement européen sur la protection des données. « Les risques sur données et les accès frauduleux sont de plus en plus directement dans les mains des directions générales », confirme Vincent Delaroche. C’est-à-dire dans les mains des donneurs d’ordres du BCG et de ses concurrents. D’ailleurs, plusieurs cabinets collaborent aussi avec Cast, en Europe et aux États-Unis, à commencer par McKinsey et dans une moindre mesure A.T. Kearney.
« On a tous le droit d’utiliser une pioche. Cela ne veut pas dire qu’on trouvera tous de l’or », rétorque Norbert Faure. De la même manière que le patron de « l’usine à produire des données made in BCG », comme il résume l’activité Platinion, ne voit aucune difficulté à ce que le BCG soit actif sur des prestations de conseil en systèmes d’information. « On le met très volontiers en avant. »
« Si deux sociétés de conseil en stratégie se présentent à la direction générale d’un grand groupe, l’une disant qu’elle travaille seule, l’autre expliquant qu’elle s’est associée avec le numéro un de la software intelligence, cela fait une différence », pense Vincent Delaroche. « Nous pouvons faire certaines choses seuls, mais c’est plus artisanal. Cast est l’outil le plus complet et le plus industrialisé », confirme Norbert Faure.
Des activités dont les marques les plus connues du conseil en stratégie, en théorie peu investies dans l’IT, font d’autant moins secret (BCG et McKinsey) qu’elles marchent fort commercialement.
Un ratio de 1 à 20 dans la facturation
Dans la grande banque américaine où le BCG et Cast sont intervenus conjointement, Cast a facturé quelques dizaines de milliers de dollars, le BCG quelques centaines de milliers de dollars. « Il y a toujours un ratio de 1 à 10 ou de 1 à 20 entre ce qui est facturé pour le logiciel Cast et les services de consulting associés du BCG par exemple. Mais cela reste clairement un partenariat gagnant-gagnant. Nous nous appuyons sur le BCG, McKinsey ou Deloitte pour engager de nouvelles discussions commerciales avec de grandes entreprises, et le BCG ou McKInsey s’appuie sur nous pour vendre un peu plus que des têtes très bien faites », dit Vincent Delaroche.
Benjamin Polle pour Consultor.fr
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