MSF France : CVA s’engage pour de bon dans le pro bono
C’est une première mission véritablement estampillée pro bono pour Corporate Value Associates. Le cabinet est tout récemment intervenu pour MSF France afin de l’épauler dans son projet de e-plateforme destinée à la distribution de médicaments essentiels contre les maladies non transmissibles dans les pays à faibles revenus d’Afrique. Récit de mission.
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En mai dernier, le cabinet CVA a été missionné par Médecins Sans Frontières France dans le cadre d’une mission pro bono. Ce serait une première pour les équipes françaises ! Pour MSF France, l’accompagnement par un cabinet de conseil en stratégie était inédit, en tout cas selon les souvenirs de Pierre Mendiharat, au sein de l’ONG depuis 15 ans, « nous faisons en revanche souvent appel aux avocats d’affaires et aux boîtes IT ».
Avec une équipe plutôt réduite au sein du bureau parisien, une quarantaine de consultants, il était jusqu’à présent difficile pour de se lancer dans le mécénat de compétences en général et le pro bono en particulier. Question de staffing. « Nous nous étions plutôt engagés sur le tutorat, le coaching d’entrepreneurs sociaux grâce à notre partenariat avec l’entreprise spécialisée 180 Degrees Consulting, des dons et du soutien au réseau social et solidaire “Un Début de Réseau”, ou encore une initiative de soutien au développement des entreprises ukrainiennes locales depuis le début du conflit, souligne Thierry Rigoine de Fougerolles, associate partner pour la practice santé, volontaire-pilote de cette mission, sous la direction d’Olivier Vitoux, chef de file santé de CVA. Dans notre nouvelle stratégie RSE, et du développement de notre plateforme New Healthcare Systems, nous nous sommes engagés à effectuer au moins une mission par an dans le domaine de la santé. »
Une rencontre opportuniste
Chose dite, chose faite. Le cabinet, via son service partenariats, a lancé une sorte d’appel d’offres auprès des acteurs de la santé pour proposer ses gracieux services. Et MSF France, 487 millions d’euros de dépenses en 2022, a répondu à l’appel, comme le pointe Pierre Mendiharat, responsable des études de faisabilité dans le cadre des activités d’amélioration de l’accès aux médicaments de l’ONG. « Cela a été plus une opportunité pour notre département collectes et partenariats qu’une question de coûts. Même si le pro bono est toujours de l’argent que nous n’avons pas à dépenser et qui peut aller à des missions opérationnelles de terrain. »
Un sujet santé pas comme les autres
Sur le fond, la question était claire pour le consultant Thierry Rigoine de Fougerolles, « nous sommes arrivés à un stade où le concept était posé ». Il s’agissait d’étudier l’impact financier de la mise en place de cette plateforme, « un projet très original pour MSF, comme le pointe Pierre Mendiharat. Cette plateforme vise à répondre au besoin urgent d’améliorer l’accès aux médicaments essentiels dans les régions et les populations mal desservies. Notre constat initial est que de nombreux habitants de ces pays ne trouvent tout simplement pas de médicaments dans leur pays. Notre priorité est de ne pas remplacer le circuit normal de distribution de médicaments, mais de pallier les manques ponctuellement en proposant des produits à prix coûtant, et de se servir de cette activité pour du plaidoyer en faveur de solutions plus habituelles par les acteurs locaux. Ce projet de plateforme en ligne nécessitait de bien comprendre les mécanismes de commerce en ligne et de faire des projections financières. Pour cela, il nous a semblé important d’avoir un regard et une aide extérieurs. »
Quatre consultants-volontaires détachés
Le match, une fois acté, s’est transformé en une mission « normale », d’une durée de 6 semaines, avec une équipe de volontaires composée de quatre experts santé du cabinet (sur la dizaine au sein du bureau parisien) : un consultant, une senior manager, un associate et un partner. « Si c’était une première d’un point de vue du mécénat de compétences, en revanche, le sujet lui-même n’était pas nouveau pour nous, à savoir travailler sur le business plan de projets de plateforme digitale, la modélisation financière et le modèle opérationnel. Mais dans ce cas, le modèle économique est évidemment particulier, avec un impact majeur de santé publique dans le cadre d’un investissement limité », amende l’associate partner.
Un travail sur mesure
Une centaine de médicaments a été dans un premier temps étudiée dans un ou deux pays-pilotes avant une éventuelle généralisation si la plateforme s’avère efficace. Et de multiples enjeux dans cette étude financière : les différentes hypothèses de coûts, de l’investissement, de la maintenance, des envois, les marges à imputer pour compenser les coûts opérationnels ou au contraire les subventions éventuelles pour réduire les prix pour les patients, l’exploration des taux de perte des colis, la gestion des commandes, le point d’équilibre de ce qui sera refacturé aux patients finaux… Au final, le livrable est sous forme Excel, un doc particulièrement bien adapté aux besoins de l’ONG selon Pierre Mendiharat. « CVA nous a laissé un outil robuste, puissant et fonctionnel, des hypothèses très larges concernant l’étude de faisabilité, car nous n’avons pour l’instant aucune idée sur les valeurs exactes de certains des paramètres influençant les prix et sur lequel nous pouvons maintenant prendre la main en modifiant des valeurs de variables qui nous permettent de voir des résultats directs sur les projections financières. »
Le choc des cultures
Question acculturation MSF/CVA, avec à la clef une rencontre de deux mondes, la mission s’est passée au mieux côté cabinet comme ONG. « Là où il y avait pour eux une acculturation à faire sur le fond, c’est en termes de profit, nous ne parlons pas de profits, ni les visons. Nous travaillons toujours à perte, nous ne cherchons pas à être rentables. Notre vocation est d’utiliser l’argent des donateurs pour financer des opérations destinées aux populations en difficultés sanitaires. Mais le calcul du point d’amortissement est le même. Nous estimons combien nous allons devoir subventionner pour mettre en œuvre l’activité et atteindre un volume souhaité », témoigne Pierre Mendiharat.
Une mission qui ne compte pas pour du beurre
Le livrable de CVA a été rendu à MSF fin juin. La fin de l’étude de faisabilité est prévue pour la fin 2023. Avec des points critiques pour MSF, notamment les questions de réglementation pharma très diverses, de prix le plus juste et de qualité des médicaments, et ce en fonction des pays. Si les conclusions de faisabilité s’avèrent positives, la phase de test pourra être lancée mi 2024 dans quelques pays (entre 3 et 5) sur un nombre de médicaments limités (entre 30 et 50). Pour l’équipe de CVA, cette première mission pro bono auprès de MSF a été particulière. Pour Thierry Rigoine de Fougerolles, une expérience à la fois pro et perso. « Lorsqu’on travaille pour des labos qui couvrent les pays développés, on ne voit pas les graves problèmes de santé publique et le manque criant de médicaments dans certains pays. Il faut le voir pour le croire. La question est : pourquoi en 2023 en est-on encore là ? Il serait bien qu’on aille voir sur le terrain pour comprendre ce qui s’y passe réellement. Cela fait partie de notre job. »
Cette première mission pro bono n’est donc pas la dernière pour CVA, en cohérence avec sa démarche RSE. La prochaine ? Pour l’instant, elle n’est pas arrêtée, mais cette expérience auprès d’une ONG majeure en France et à l’international a l’air d’avoir déclenché des vocations au sein du cabinet…
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