Transports : les affres du monopole finissant de la SNCF
PMP est intervenu à plusieurs reprises auprès du ministère du Transport avant et après le vote de la loi sur un nouveau pacte ferroviaire en 2018, qui avait suscité un tollé social et ouvrait la voie à la libéralisation du rail français en application d’une directive européenne — une ouverture à la concurrence de la SNCF dont les exemples récents montrent qu'elle ne sera pas de tout repos.
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Chez PMP, la mission conduite auprès de l'autorité organisatrice des trains d’équilibre du territoire, qui chapeaute la mise en concurrence d’une dizaine de lignes Intercités au ministère des Transports, est de grande ampleur. Elle était partie pour durer en fil rouge au minimum trois ans : le cabinet avait remporté le contrat à l’été 2019, l’avait démarré en août 2019 et devait accompagner l’autorité organisatrice jusqu’en 2022, y compris dans le cadre d’un SAV d’un an après les premiers tours de roue de l’éventuel nouvel opérateur.
La mission mobilise le partner Grégory Gautheron, le directeur associé Lionel Chapelet et le senior manager Raphaël Guillemont. Il s’agit pour eux d’assister la mission ministérielle dans la conduite de la procédure de l’appel d’offres, en tant que coordinateurs des différents autres prestataires retenus par le ministère pour l’accompagner. Il y a notamment le cabinet de conseil spécialiste des décideurs publics Adexel, le cabinet d’avocats Cloix & Mendès-Gil ou les spécialistes de l’ingénierie ferroviaire Atkins.
« Notre rôle est d’animer le groupement Adexel-Cloix & Mendès-Gil-Atkins, de faire un benchmark des bonnes et mauvaises pratiques d’autres autorités organisatrices d’ouverture à la concurrence du rail à l’international, de tirer un maximum d’enseignement des dysfonctionnements de l’ouverture à la concurrence du fret ferroviaire en France, de rédiger le DCE (le dossier de consultation des entreprises, qui regroupe les pièces nécessaires à la consultation des candidats à un marché public, ndlr) », explique Raphaël Guillemont, senior manager de PMP, qui a coordonné le conseil apporté à la mission organisatrice par le cabinet.
Des prestataires intellectuels externes dont la mission ministérielle explique avoir besoin étant donné la complexité de la tâche que représente l’ouverture à la concurrence de ces marchés ferroviaires.
« Pour toutes les compétences de construction d’une offre de marché public, nous sommes notoirement insuffisamment nombreux en interne pour les rassembler. C’est la raison pour laquelle, depuis que la mission existe, soit une dizaine d’années, nous faisons appel à des consultants externes. Ils nous aident à passer en revue les contrats d’exploitations complexes que nous passons avec la SNCF, à gérer des problèmes juridiques qui s’y déclarent. Ce point juridique-là est décuplé pour le pilotage d’un appel d’offres tel que celui de Bordeaux-Nantes et Nantes-Lyon. Nous avons jugé utile d’avoir une assistance ad hoc en propre et de recourir aux services d’assemblier de PMP », détaille Patrick Ferchaud, ingénieur des ponts, des eaux et des forêts, chef de la mission autorité organisatrice des trains d’équilibre du territoire.
Appel d’offres infructueux
Sauf que mi-décembre, c'est la douche froide pour la dizaine d’ingénieurs, de juristes et d’administratifs actifs au sein de cette autorité organisatrice. L'État déclare alors infructueux l’appel d’offres pour l’ouverture à la concurrence des lignes de train Bordeaux-Nantes et Nantes-Lyon, alors que trois candidats, Transdev, l’Allemand Arriva et le Belge Eurorail, étaient prêts à succéder à la SNCF (où nombre de cabinets de conseil sont actifs par ailleurs, ndlr), pour un début d’exploitation qui était projeté en 2022.
Coup dur pour l’autorité ministérielle, mais aussi pour PMP qui accompagne le ministère sur la libéralisation du rail (à relire ici), et sur cet appel d’offres en particulier.
Il s’agissait de la première des ouvertures à la concurrence des lignes chapeautées par la mission ministérielle. Pourquoi celles-ci en particulier ? Parce que ces lignes sont très déficitaires financièrement. Quand les autres Intercité, tels que Paris-Toulouse, Hendaye-Toulouse ou Toulouse-Marseille n’ont, pour l’heure, pas été ouverts à la concurrence.
Coup d’arrêt donc à ce processus, mais ce n’est pas la première fois que PMP doit travailler sous pression sur le sujet de la libéralisation du rail au ministère des Transports. Dès 2017, le cabinet est intervenu auprès de la DGITM, Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, à laquelle appartient l’autorité des TET.
Le cabinet avait alors pour mission de contribuer à la mise au point de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire promulguée en juin 2018. Et ce alors que cette loi a suscité un tollé social et une retentissante « grève perlée » chez les cheminots.
Un contexte pour le moins délicat. C’est pourtant dans ce contexte-là que le cabinet a été chargé d’apporter expertises techniques et économiques pour alimenter l’étude d’impact de la très polémique loi. « On a porté une attention toute particulière à la rigueur du fait du contexte, pour bien sourcer et recouper tous nos chiffres, pour qu’ils soient irréfutables, et pour documenter spécifiquement nos sources, pour sortir les analyses de toute considération politique et objectiver au maximum », se souvient Raphaël Guillemont.
Deux ans après cette loi, qui permettait au gouvernement de transposer la directive européenne de 2016 sur la libéralisation du rail, les annonces se multiplient.
Le 9 décembre 2020, le conseil d’administration d’Île-de-France Mobilités a approuvé le calendrier de l’ouverture à la concurrence des trains et RER actuellement exploités par la SNCF. L’autorité régionale des transports entend passer son premier appel d’offres mi-2021 avec un lot comprenant les lignes de trams-trains T4 et T11, ainsi que la branche Esbly-Crécy de la ligne P. Avant elle, plusieurs régions avaient déjà ouvert la voie avec des appels d’offres à la concurrence pour plusieurs lignes de train sur chacun de leur territoire : les Pays de Loire, le Grand Est, les Hauts de France et la Région Sud.
Pour les lignes à grande vitesse, la date de l’ouverture à la concurrence était prévue le 14 décembre 2020. Thello, filiale de Trenitalia, est intéressée par la ligne Paris-Lyon-Milan, et l’Espagnol Renfe et l’Allemand FlixTrain sont également sur les rangs.
Bis repetita
Mais des annonces aux faits, il y a un grand écart comme le montre la première mise en concurrence des lignes Bordeaux-Nantes et Nantes-Lyon. Une exécution complexe qui dans ce dernier cas s'explique pour Raphaël Guillemont : « L’État a un rôle particulier. Il n’a pas les coudées aussi franches que la Région Sud par exemple qui, elle, a clairement dit qu’elle ne voulait plus de la SNCF et fait tout pour que les marchés soient les plus attractifs possible pour les opérateurs privés. L’État, lui, a une position plus ambivalente, à la fois adjudicateur et tuteur de la SNCF, dont il ne peut pas dire qu’il ne veut plus sauf à vouloir se couper une jambe ».
Rebelote donc pour PMP : car il est d’ores et déjà acquis que le marché Bordeaux-Nantes et Nantes-Lyon sera à nouveau lancé à des conditions plus incitatives pour les opérateurs privés. Par exemple par un nouveau mécanisme de partage entre les recettes générées par le trafic voyageur et le subventionnement que continuera à garantir l’État.
Pendant ce temps-là, l’autorité organisatrice des trains d’équilibre du territoire continue à se faire accompagner. Elle vient d’attribuer à Alenium Consultants un nouveau marché, auquel PMP postulait également. Objectifs cette fois-ci : le renouvellement, le temps qu’une seconde mise en concurrence aboutisse, de la convention SNCF (qui arrivait à échéance en 2022) sur les lignes Bordeaux-Nantes et Nantes-Lyon et la mise en concurrence deux lignes supplémentaires.
Benjamin Polle pour Consultor.fr
Crédit photo : Adobe Stock
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