Décryptage de la gouvernance mondiale de Bain
Comment sont dirigés les cabinets de conseil ? Quelles sont les instances de direction ? Comment sont choisis les partners ? Quelle est la place des Français ? Consultor s'est intéressé au fonctionnement des grands cabinets. Premier focus : Bain & Company.
Chez Bain & Company, c’est une femme, Orit Gadiesh, qui préside le Board of Directors, qui ne compte actuellement aucun associé français.
Plusieurs sièges sont en revanche occupées par des associés parisiens au sein du Comité des nominations et, dans la zone Europe-Moyen-Orient-Afrique (EMEA) en tant que practice leaders. Le bureau parisien compte aussi un ancien représentant du board et un managing director pour la zone EMEA.
Tous les ans se tient, pendant trois jours, la Bain World Cup Tournament, une coupe du monde de football entre Bainies en mode team-building. Une tradition bien ancrée dans le cabinet américain depuis 1987 qui a permis une victoire récente du bureau français en 2013 à Amsterdam. Les Français ont aussi gagné quelques places pour faire partie des instances dirigeantes, même si les capitaines d'équipe sont souvent anglo-saxons.
Première étape : devenir partner. Comme dans la plupart des cabinets, les partners sont sélectionnés parmi les principals, au niveau local. Ils sont évalués et choisis par un premier local promotion committee. À Paris, Domenico Azzarello, patron du bureau, prend ensuite la décision de présenter un candidat au Global Compensation & Promotion Committee. Le comité est présidé actuellement par un Américain, Gerard du Toit, partner à Boston. Ses membres sont chargés au niveau mondial de la validation des rémunérations et de la promotion de tous les partners. « En gage d'impartialité, l'avancement de carrière d'un collaborateur est toujours étudié par un partner du comité venant d'une autre région », souligne Domenico Azzarello. Mais le choix d'un partner relève ensuite du Global Nominating Committee, qui fait passer les entretiens aux candidats.
Un Français à la tête du Comité clé des nominations
Il est présidé actuellement par le Français Marc-André Kamel, du bureau de Paris et qui dirige aussi le pôle distribution et luxe pour la région EMEA. Le Global Nominating Committee a un rôle clé : « Il veille sur la gouvernance de la firme », indique Domenico Azzarello. Avec notamment une attention particulière portée « à l'équilibre de la représentation des différentes régions. Le poids d'une région par rapport à une autre n’apparaît jamais comme un sujet qui fâche », assure le dirigeant du bureau de Paris.
Le Global Nominating Committee nomme aussi, avec l'accord des autres partners, les membres du Global Board of Directors, les Global Managing Directors et les membres du Global Compensation & Promotion Committee. Entre le Board, le Compensation Committee et le Nominating Committee, les partners passent souvent de l'un à l'autre.
Une fois devenu partner (et actionnaires de l'entreprise), le pouvoir ne serait plus un objectif en soi. « Les partners acceptent de prendre des responsabilités de management pour une période donnée, pour être au service du partnership. Ils se focalisent avant tout sur le principe de ''servant leadership'' », insiste Domenico Azzarello. Ce dernier dit d'ailleurs de lui-même avec précaution : « Je suis délégué par les partners pour prendre les décisions ».
En France, une vingtaine de partners forment le PartnerGroup avec à sa tête son managing director, Domenico Azzarello, qui est également un des leaders de la practice stratégie client, marketing et organisation. « Le but principal est de servir nos clients, pas de rechercher un quelconque pouvoir», ajoute-t-il…
Des Français, leaders de practices pour la région EMEA
Reste que les grandes décisions stratégiques sont du ressort du Global Board of Directors qui s'assure aussi de l'avancement des plans sur les indicateurs clés de performance. « Le Board est composé d'une quinzaine de partners, élus par l’ensemble du partnership sur proposition du Comité des nominations. » Il est présidé par l'Israélo-Américaine Orit Gadiesh, une des très rares femmes à la tête d'un board. Deuxième grande instance : le Global Operating Committee, responsable des affaires courantes pour les 53 bureaux répartis dans 34 pays. Le Global Operating Committee est composé de profils surtout anglo-saxons. Il est dirigé par Bob Bechek, worldwide managing director, et par trois autres managing directors : Dave Johnson pour la région Amérique, Dale Cottrell pour la région Asie-Pacifique (APAC), qui remplace à cette fonction Paul Meehan, devenu responsable de la région EMEA en 2013. Le Français Olivier Marchal, actuel président du bureau de Paris, fut le précédent managing director de la région EMEA, de 2008 à 2013.
Au niveau régional, le partnership permet une interaction entre tous les pays. « Au sein du groupe de direction EMEA, on se connaît très bien, on travaille ensemble, on s'assure que l'on mobilise le meilleur de l'expertise régionale pour les clients, le mode de fonctionnement est très intégré », assure Domenico Azzarello, DG France. Le travail des équipes se coordonne également avec les responsables des différentespractices, comme Laurent-Pierre Baculard, ancien membre du Board of Directors, et aujourd’hui responsable de la practice digitale pour la région EMEA et un des leaders-monde de la practice technologies média, télécom. Pour la zone EMEA, on compte enfin la présence d'autres Français leaders comme Arnaud Leroi qui dirige le pôle de compétences fusions et acquisitions ou encore François Montaville à la tête de la practice amélioration de la performance. Une équipe de joueurs français bien placés donc pour la division Europe-Moyen-Orient-Afrique, mais pas encore dans le top management.
Thibaud Vadjoux pour Consultor.fr
Un tuyau intéressant à partager ?
Vous avez une information dont le monde devrait entendre parler ? Une rumeur de fusion en cours ? Nous voulons savoir !
commentaire (0)
Soyez le premier à réagir à cette information
Manuel de survie
- 29/11/24
Depuis 2022, le phénomène des salariés « boomerang » est largement relayé dans les médias en contrepoint de celui du big quit. Certains experts RH en font un nouveau levier de gestion des talents. Valable dans le conseil en stratégie ?
- 18/11/24
Un nouveau barème de couleurs commence à fleurir sur les CV des consultants McKinsey. À quoi correspond ce système d’unification des « niveaux d’impact » individuels, précisément ?
- 28/10/24
La crise sanitaire l’a montré : c’est possible. Mais est-ce souhaitable ? Dans le conseil en stratégie, le télétravail suscite depuis 4 ans des annonces régulières d’un « retour au bureau », comme dans beaucoup de professions intellectuelles supérieures. La réalité est plus nuancée.
- 02/09/24
Première femme indienne à avoir été élue partner chez McKinsey en 1985, Chandrika Tandon fait résonner sa voix dans de multiples domaines.
- 29/08/24
A 37 ans, Paul Ricard, partner d’Oliver Wyman aux US, vient de se voir confier un challenge d’envergure : prendre la tête de la practice assurance et gestion d'actifs pour l’ensemble de la région Asie-Pacifique à Singapour. Particularité de ce Français né dans l’Aveyron, consultant de la firme depuis 2011 : il a, durant ces 14 années, évolué uniquement hors de France : aux US, dans les bureaux de New-York puis de San Francisco.
- 19/07/24
Plusieurs cabinets de conseil en stratégie accompagnent leurs consultants désireux de suivre des formations certifiantes. Dans quel contexte, et pour quels bénéfices ?
- 16/07/24
Selon les senior partners de Kéa, Arnaud Gangloff et Angelos Souriadakis, le métier de consultant en stratégie a profondément muté ces dernières années.
- 16/02/24
Les coûts et les gains de productivité induits par l’intelligence artificielle vont-ils conduire à une refonte des modèles de tarification des missions de conseil en stratégie et une évolution de la relation aux acheteurs ? Pour certains, que nenni. Pour d’autres, évidemment. Entre deux, plusieurs cabinets s’interrogent.
- 26/01/24
Chacun sa route, chacun son chemin, chacun la mission de conseil qui lui convient ? Si cette envie de satisfaire les consultants dans les attributions de clients et de sujets entre les consultants des cabinets de conseil en stratégie peut paraître tentante, sa mise en œuvre est beaucoup plus nuancée.