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Index de la parité : le conseil progresse, le BCG reste à la traîne

Depuis 2019, toutes les entreprises de plus de 250 salariés et, depuis 2020, toutes celles de plus de 50 salariés doivent calculer et publier leur Index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, chaque année au 1er mars. Si la note moyenne nationale des entreprises françaises plafonne, les cabinets de conseil en stratégie — historiquement très masculins — progressent pour la 3e année d’affilée. Ils n’en restent pas moins mauvais quant à la parité parmi les plus hautes rémunérations. Analyse des index 2024 et réactions de plusieurs des cabinets concernés.

Benjamin Polle
22 Mar. 2024 à 05:00
Index de la parité : le conseil progresse, le BCG reste à la traîne
© Adobe Stock

Tendance à la hausse pour l’outil de mesure de l’égalité entre les femmes et les hommes instauré par l’ancienne ministre du Travail Muriel Pénicaud en 2018. Chaque année, les entreprises de plus de 50 salariés mesurent leurs écarts salariaux dans un indicateur sur 100 points décomposés en 4 ou 5 critères.

Or, depuis son instauration, la moyenne nationale de cet index progresse sur le plan national : 85 sur 100 en 2021, 86 en 2022 et 88 en 2023. Mais léger plafonnement de cette progression avec les résultats rendus publics début mars pour 2024 : avec à nouveau 88 sur 100, l’index se stabilise.

3e année de progression pour les cabinets de conseil en stratégie

À rebours de ce coup de frein national, les cabinets de conseil en stratégie voient leur index moyen progresser pour la 3e année de suite. Alors que le secteur était passé de 85 à 84 sur 100 entre 2021 et 2022, il a atteint 89 en 2023 et 90 cette année. Un score qui confirme la tendance enclenchée ces deux dernières années et situe les cabinets de conseil en stratégie au même niveau que les entreprises de 1 000 salariés ou plus, qui performent mieux dans cet index que leurs consœurs de plus petite taille.

Eight Advisory frôle le 100 sur 100 avec 99, talonné par Kéa avec 98. Suivent 6 cabinets au-dessus de 90 points (Accuracy Strategy, Bain, Avencore, McKinsey, PMP Strategy, Simon-Kucher). Le Boston Consulting Group arrive dernier de notre panel avec une note globale de 83 sur 100.

2024 03 20 Graph étude index égalité professionnelle

La quasi-totalité des points sur les 3 premières composantes de l’index

Dans le détail, sur les 3 premières composantes de l’index, les cabinets de conseil ont globalement la totalité des points possibles.

Sur l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes (sur 40 points) qui recense les rémunérations moyennes des femmes et des hommes dans une entreprise, les cabinets dont l’effectif est supérieur à 50 personnes et pour lesquels des données étaient disponibles à la date de cet article ont une moyenne de 37. Six cabinets ont 39 points (Accuracy, Advancy, Bain, Eight Advisory, Oliver Wyman, Roland Berger). La lanterne jaune revient, là aussi, au BCG avec 33.

De même, pour la répartition des augmentations individuelles (sur 20 points) qui évalue le pourcentage de femmes et d’hommes qui ont perçu une augmentation dans l’année ou le nombre des salariées augmentées à leur retour de congé maternité (sur 15 points).

Sur ces trois critères, des marges de progrès existent, mais les cabinets sont a minima dans la moyenne nationale des entreprises, et souvent au-dessus.

La parité parmi les 10 plus hautes rémunérations

Là où le bât blesse, année après année, c’est sur le dernier critère : la parité parmi les 10 plus hautes rémunérations (sur 10 points). Pour obtenir ces 10 derniers points, une entreprise doit compter au moins 4 femmes parmi ses 10 plus hauts salaires. Or, la moyenne des cabinets dans l’index 2024 est à 3, les meilleurs sont à 5.

Piètre notation que les cabinets ne sont pas les seuls à recevoir à ce sujet. La note nationale moyenne est de 5 sur 10, 32 % des entreprises ont moins de 2 femmes dans les 10 meilleures rémunérations et seules 28 % respectent une parité. 4 294 entreprises n’ont enregistré aucun progrès depuis 2021 sur ce critère.

Mais comparaison n’est pas raison : l’enjeu de la féminisation des partnerships est récurrent dans les cabinets et les partners restent ultra majoritairement masculins dans les cabinets de conseil en stratégie.

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Le conseil partait de loin

Interrogés par Consultor sur leurs résultats, les cabinets de conseil se félicitent plutôt de leur performance et de leur progression — quoique tous ont bien conscience que l’idéal serait d’arriver à 100 sur 100, ce que seules 2 % des entreprises à l’échelle nationale arrivent à faire.

« Le conseil en stratégie est plutôt bon élève de l’index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes aujourd’hui. Ce n’était franchement pas le cas quand j’ai démarré dans le métier 20 ou 25 ans en arrière où il n’y avait aucune femme au-delà des grades de manager ou principal, et elles étaient rares ! Chez Kea, notre première femme associée a été cooptée en 2008. Je fus la deuxième en 2009. C’était plutôt précurseur », contextualise Stéphanie Nadjarian, senior partner de Kea.

Comme elle, Anne Baudrier, la DRH d’Avencore, et Myriam Gasnier, en charge de la communication et du marketing du cabinet, se disent « assez satisfaites du résultat pour un cabinet à l’histoire récente avec une dominante industrielle, des clients souvent aux quatre coins du territoire, qui font que rentrer le soir pour dîner avec ses enfants est souvent moins commode que quand on travaille majoritairement à Paris auprès de clients dans la banque ou l’assurance ».

L’index, un marqueur peu chronophage à produire, mais une mesure objective attendue

Ces marques de réjouissance traduisent aussi un ratio intéressant au sujet de cet index : il est assez peu chronophage à établir, de l’ordre de 1 ou 2 heures de travail souvent réalisées par les DAF des cabinets, et constitue a contrario une mesure objective et un véhicule de communication interne et externe porteur.

Pour améliorer encore leur score, les cabinets sont parfois tenus par des réalités sociales pas agréables, mais bien existantes : à commencer par la prédominance de profils féminins dans les équipes des fonctions support ou des assistantes, souvent moins bien rémunérés que les équipes de consultants.

Les leviers pour aller plus loin

Au-delà, différents leviers sont actionnés par les cabinets pour féminiser leurs équipes et garantir une égalité de traitement, avec en ligne de mire l’éléphant dans la pièce, la féminisation à tous les étages. « Nous avons, par exemple, un comité staffing, constitué d’un groupe restreint de partners et DRH assez agile pour identifier les besoins des consultants, instaurer un suivi fin à ce sujet, ce qui établit un climat de confiance pour tous », détaille Anne Baudrier.

Autre moment critique soigné aux petits oignons et objet d’un programme interne spécifique : les retours de congés parentaux. « On a vraiment mis l’accent sur ce point pour garantir des non-déplacements sur les mois qui suivent le retour et une flexibilité augmentée à cette période », dit Anne Baudrier.

Chez Kéa, Stéphanie Nadjarian insiste sur l’importance des figures de proue ou les rôles modèles qui inspirent l’ensemble des équipes de consultantes quant à leur avenir au sein du cabinet. Il y a bien sûr la parité respectée dans diverses instances de gouvernance interne, jusque dans le codir, mais également dans les choix de personnalités invitées à débattre chez Kéa des sujets de diversité et inclusion

« L’an dernier, nous avons fait venir Élisabeth Moreno (l’ex-ministre déléguée à l’Égalité entre les femmes et les hommes) et Michelle Perrot (historienne du féminisme). Elles ont appuyé et illustré une croyance fondamentale pour Kéa qui est que pour transformer le monde il faut transformer l’entreprise », se réjouit la senior partner.

Un certain consensus émerge pour ne pas recourir à des quotas. « La discrimination positive, les consultantes elles-mêmes n’en veulent pas », appuie Myriam Gasnier chez Avencore. Quand Éric Dupont, co-fondateur de PMP Strategy, rappelle que « pour les promotions de partners nous regardons seulement les personnes en mesure de passer le grade ». Ce qui, cette année, explique, une légère baisse de l’index du cabinet dont les dernières élections de partners étaient masculines.

« La question que l’on se pose est comment nous pouvons recruter davantage de femmes pour atteindre 50 % de consultantes à la base de la pyramide. C’est un chiffre auquel nous ne sommes pas encore et que nous devons mieux monitorer », se projette Éric Dupont.

Pour se donner les moyens de ses ambitions, le cabinet va promouvoir un comité parité et diversité, dont une des responsabilités sera de concrétiser le recrutement et la rétention d’une part plus importante de femmes parmi les consultants PMP Strategy.

Un index nouvelle génération attendu en 2025

Si les initiatives ne viennent pas des cabinets, peut-être seront-ils contraints d’agir depuis l’extérieur. En effet, après 5 ans de mise en œuvre de cet index, le 8 mars, Gabriel Attal a appelé de ses vœux la mise en œuvre d’un index nouvelle mouture après que le Haut conseil à l’égalité en a pointé les limites. Une nouvelle version est attendue dès 2025.

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Benjamin Polle
22 Mar. 2024 à 05:00
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Eric Dupont Stéphanie Nadjarian
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