Grégory Sion : destination croissance pour le boss de Pierre & Vacances
Promu à la tête de Pierre & Vacances (l’une des deux entités du groupe Pierre & Vacances Center Parcs, PVCP) en pleine crise sanitaire de Covid-19 en mai 2020, Grégory Sion, 48 ans, l’ancien senior project manager d’Oliver Wyman (9 ans de firme), aime les défis d’ampleur.
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C’est peu de le dire. Au programme, un secteur du tourisme à l’arrêt et deux confinements en 2020, un chiffre d’affaires (1 milliard d’euros) du groupe en chute d’un tiers cette année-là par rapport à 2017 (1,5 Md€). Retour sur un parcours de 25 ans dans le tourisme où le farniente n’est pas vraiment au menu.
Entré en 2016 comme directeur commercial, digital et de l’innovation du groupe PVCP, Grégory Sion le connaissait donc plutôt bien lorsqu’il a pris les rênes au printemps 2020 de l’un des deux pôles, Pierre & Vacances (l’autre pôle, Center Parcs, a été acquis en 2003 par le groupe), 2500 collaborateurs. Un groupe, qui avait connu son heure de gloire jusqu’aux années 2000, et depuis en difficulté. « Nous perdions beaucoup d’argent avant le Covid, on en a perdu beaucoup pendant. Et on m’a proposé de m’occuper de Pierre & Vacances lorsque le groupe a décidé d’autonomiser les deux business en créant des sociétés indépendantes », contextualise Grégory Sion.
Une transfo entre stratèges
À la clef, une transformation d’ampleur pour cette marque fondée il y a 55 ans par l’homme d’affaires Gérard Brémond, à sa tête jusqu’en 2022, « un génie, un visionnaire », qui a fait imaginer la station de ski alors très avant-gardiste d’Avoriaz en 1967, un village-piéton à l’ère du tout voiture, et le village de résidences du Cap Estérel à Saint-Raphaël en 1990, avec une offre alors en vogue, l’accession à la propriété dans des résidences de tourisme aux particuliers. « Nous avons une grosse notoriété, mais la marque était devenue poussiéreuse, pas très claire, des résidences en manque de modernité qui ne développaient plus de stocks, avec une organisation lourde. On a revu l’ensemble de l’organisation (Franck Gervais, ex-patron Europe du groupe Accor, a été nommé CEO du groupe en janvier 2021, ndlr), prévu une baisse des coûts (c.-à-d. notamment avec 220 suppressions de postes), la relance d’un programme de développement de 2900 appartements de plus en 5 ans et de la premiumisation grâce à de la rénovation. » Avec un objectif : retrouver de la rentabilité sur l’ensemble des résidences. « Il y a 4 ans, 50 % d’entre elles n’étaient pas rentables, aujourd’hui, c’est 10 %. » Résultat des derniers plans strat’ du groupe de 12 000 collaborateurs : 1,1 milliard d’euros de chiffre d’affaires sur l’exercice 2018-2019 (source PVCP), 1,2 milliard d’euros sur 2019-2020, tombé à 1 Md€ pour 2020-2021, et atteindre quelque 1,8 Md€ en 2021-2022, un record (dont quelque 450 millions d’euros pour l’entité dirigée par l’ex-d’Oliver Wyman).
Et à la manœuvre, Eight Advisory en 2020, sur la mise en place du plan stratégique opérationnel « Change Up » et début 2021 sur l’accompagnement dans sa restructuration financière, mais aussi Advancy en 2021, un cabinet de conseil intervenant pour le groupe de longue date. Ou encore son ancien cabinet « il y a deux ou trois ans », se rappelle aussi Grégory Sion. Un appel régulier aux cabinets de conseil en stratégie jugé « utile » pour l’ancien de la firme Oliver Wyman devenu CEO.
En septembre 2022, après une recapitalisation, un consortium d’investisseurs a pris les clefs du capital de Pierre & Vacances : notamment le fond de dettes britannique Alcentra (25,4 %), Fidera (24,2 %), Pastel Holding (8,8 %), créanciers (11,9 %). Et la dette financière nette est revue à environ 132 millions d’euros au 30 juin 2022…
Un parcours focus tourisme et croissance
Plutôt satisfait le CEO business line Pierre & Vacances des rapides résultats de ces « douze travaux d’Hercule » en cours. Il faut dire qu’en quelque 26 années de carrière, dont 9 comme consultant, l’ingénieur diplômé d’un DEA Sciences de gestion de Centrale Supélec et d’un MsC Economics & Administration de Centrale Lille en 1997, n’a quasiment jamais quitté le secteur du tourisme. Déjà chez Oliver Wyman, cabinet dans lequel il effectue son « apprentissage » pro, Grégory Sion s’était spécialisé dans le secteur au fil des années. Celui qui aimait trop le business pour faire une carrière d’ingé a décidé de prendre le chemin du conseil lors d’un stage au sein de son futur employeur. « J’ai pris conscience que le conseil était une super école où je pourrais découvrir plein de choses et avec un côté sympa tout en côtoyant des gens de haut niveau. »
Alors entre 1997 et 2006, Grégory Sion va se « frotter » avant tout à des problématiques de croissance et de développement digital et y découvrir le secteur du tourisme, encore de masse, bien différent de celui prôné aujourd’hui. Au total, une vingtaine de projets menés, notamment la gestion des opérations de due dil’ pour voyages-sncf.com, « le leader français des OTA » (pour Online Tourism Agency), la définition du nouveau positionnement de la marque TGV pour la SNCF, et deux d’entre elles particulièrement marquantes, toujours « sur les rails », « un hasard » selon l’ex-consultant : l’une de ses toutes premières missions comme analyste en 1997, la création d’un nouveau programme de fidélité (Grands Voyageurs) pour la SNCF – « je me suis rendu compte que j’adorais le train et cette entreprise » –, et en 2003, comme manager, le lancement d’une agence de voyages pour un grand acteur du ferroviaire, « une activité de diversification passionnante en gérant moi-même une équipe ».
La digitalisation au programme
Suite logique pour celui qui est ainsi devenu expert en tourisme, Grégory Sion est chassé pour entrer comme directeur stratégie et qualité de Promovacances du Groupe Karavel. « J’avais décidé de rester dans le conseil tant que ça me plaisait. Cela s’est fait de façon très opportuniste, j’avais envie de me projeter dans les aspects opérationnels dans la durée. J’ai travaillé sur une LBO (deux acquisitions, Partir pas cher et AB Croisières) et la structuration du plan stratégique. » Une période pendant laquelle le tourisme commence sa mutation digitale, « imaginez en 2005, vous ouvriez un site Internet où vous aviez accès à un numéro de téléphone, vous pouviez payer pour les plus en avance, se rappelle l’ancien de Wyman, il n’y avait aucune donnée, on jouait les apprentis sorciers, on faisait presque de la VPC (Vente par correspondance, ndlr) en ligne. » Promovacances où il est promu en 2007 manager de la BU partenariats produits, avec une « première expérience de pilotage de P&L ».
Nouvelle « chasse » en 2009 suite à laquelle l’ex-consultant passe DG d’Abritel, société alors rachetée par l’un des leaders mondiaux de locations de vacances en ligne HomeAway, encore « un très beau challenge, d’accélération de croissance, où on a atteint le taux de 35 % par an et doublé la taille de l’équipe, et ce, dans une ambiance de start-up ». Au sein de ce groupe, Grégory Sion évolue aussi comme DG de Bed and Breakfast .com, « pour son lancement en Europe, trois années incroyables », puis comme directeur d’HomeAway UK et Irlande entre 2013 et 2014. « J’ai fait le tour de cette boite en passant par la start-up à ce groupe très international, hyper technologique avec un gros prisme communication. » C’est après une expérience d’un an comme manager France de La Fourchette (une appli de sélection de restaurants), puis d’une autre année comme CEO de Travaux.com, site de mise en relation entre particuliers et pros, qu’il est contacté en 2016 par « une ancienne cliente » qui recherchait un profil pour accélérer le digital de Pierre & Vacances, « dans des situations et des équipes compliquées ».
Et un nouveau gros défi comme directeur commercial, digital et innovation de Center Parcs, dont l’ex-consultant est friand. « Il y avait beaucoup de monde, pas de stratégie commune, une partie e-commerce digitale qui n’était pas structurée comme une boite digitale et un manque de focus commercial. » Résultat affiché suite à un changement d’organisation et de gouvernance, associé notamment à une baisse drastique des coûts (de 14 %), une croissance de 30 % des ventes et de 55 % de la part du digital sur 5 ans.
Stratégie et opérationnel, deux sources d’inspiration
Cette rapidité d’analyse de problématiques inconnues, la capacité de structuration, cette approche « pour émettre des hypothèses et apporter des conclusions », cette compétence interpersonnelle de management d’équipe et des clients, c’est bien avant tout pendant ses neuf années dans le conseil en stratégie que Grégory Sion dit les avoir acquises. Et c’est bien pour l’ensemble des qualités en hard et soft skills des consultants que le CEO de Pierre & Vacances, sans cesse en recherche de nouvelles pépites, n’hésite jamais à recruter ses anciens collègues. Un gage de « capacité à apprendre et à analyser vite, à l’ultra adaptabilité sur des tas de sujets ». Mais passer du conseil, où l’« on n’apprend pas à prendre des décisions », à l’opérationnel s’avère une phase transitoire délicate, nécessitant un travail de terrain de long terme. « Une belle façon d’entrer dans l’opérationnel pour apprendre pour les consultants, ce sont des postes comme chargés de mission. Il faut souvent quelques années. Le point de départ pour un consultant, c’est l’humilité, l’humilité d’écouter, le pragmatisme. »
L’ancien consultant dit aussi avoir toujours en tête quelques consultants inspirants, « plutôt des amis que des mentors », à l’instar de Nicolas Lioliakis, chairman France de Kearney, patron de la practice Services fi d’Oliver Wyman entre 2001 et 2006. « Un homme extrêmement brillant, très bon au niveau commercial, unique dans un style atypique, décalé, avec son profil de philosophe (Hypokhâgne, khâgnes Sciences sociales, préparation à l’ENS Ulm, ndlr) apportant sa propre patte au métier et pensant différemment. En plus de cela, il est très sympa avec les équipes. » Marquant donc. Autre source d’inspiration, Bruno Despujol, le nouveau boss d’Oliver Wyman France et Belgique, « un grand consultant apportant énormément de perspective, notamment en termes de concurrence et de RSE », avec qui Grégory aime échanger et confronter ses idées de CEO de Pierre & Vacances.
Et s’il a un seul message à faire passer aux jeunes consultants ou aux candidats, c’est de « profiter du conseil pour identifier les problématiques et les secteurs qui plaisent », témoignant lui-même que ses années conseil l’ont aidé à définir ses sujets de prédilection que sont la croissance et le secteur du tourisme. Et un dernier conseil : « Apprenez aussi des clients, écoutez-les, voyez-les fonctionner avec leurs équipes. Il y a plein de choses à intégrer pour votre carrière d’après ! »
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Le cabinet Advancy vient de plancher sur « Réinvention 2025 », le projet de relance Pierre & Vacances Center Parcs (PVCP), présenté mi-mai par le nouveau DG du groupe depuis janvier dernier, Franck Gervais (ex-CEO d’Accor Europe).
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