Fintech : fini la bamboche, place à l’écrémage
Après des années d’argent facile, les centaines de jeunes sociétés actives dans le paiement, les services financiers, les services bancaires, l’assurance ou encore la gestion d’actifs doivent faire face à des conditions de marché beaucoup plus raides. Pour toutes, frugalité et rentabilité sont au menu. Des consolidations importantes sont à attendre anticipent plusieurs partners de cabinets de conseil interrogés par Consultor.
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Fin septembre 2023, les fintechs françaises avaient levé 735 millions d’euros sur les 9 premiers mois de l’année : un recul de 71 % par rapport à la même période en 2022 !
Le chiffre publié par France Fintech permet de mesurer le mur que les centaines de néo-banques, spécialistes du transfert d’argent, distributeurs de produits d’assurance, gestionnaires de la relation client ou encore fournisseurs de robot advisors se sont pris ces derniers mois.
« Le robinet à cash s’est tari »
« La bulle a explosé », analyse Giovanni di Francesco, associate partner chez Ares & Co. « Je ne sais pas s’il faut parler d’une bulle, modère Éric Balansard, partner chez Courcelles. Ce qui est vrai est que l’argent a été gratuit avec des capacités de financement quasi infinies. Ce qui entraîne une moindre sélectivité des fonds et une moindre exigence de rentabilité vis-à-vis des cibles à court terme. Évidemment, avec les taux directeurs qui remontent, le robinet à cash s’est tari. »
Et le stop se fait sentir et passe notamment par des cessions et des acquisitions. Exemples : la vente de l’établissement de crédit spécialisé Greensky par Goldman Sachs ; Paykrom, un service de comptes professionnels pour entrepreneurs a cédé sa clientèle à Qonto ; le néoassureur Luko est au bord de la liquidation judiciaire ; la plateforme de financement participatif October a repris son principal concurrent Credit.fr.
Rationalisation
Dans ce marché qui se resserre, la course à la qualité des investisseurs est engagée. L’écosystème des jeunes entreprises de la fintech entre donc à présent dans une phase inédite de rationalisation.
« Nombre d’entreprises dont le business plan devait tenir encore un ou deux ans, jusqu’à la prochaine levée de fonds, s’organisent pour pouvoir le faire durer plus longtemps. Des réductions d’effectifs sont engagées. En clair, les start-ups serrent les boulons, comptent mieux leur argent et se mettent sur les rails d’une croissance plus saine », décrypte Giovanni di Francesco chez Ares.
BtoC : le mur de la rentabilité
Un horizon de vaches maigres qui ne touche pas tous les acteurs de la fintech de la même manière. Il y a consensus parmi les partners interrogés par Consultor sur la nécessité de distinguer les modèles grand public, BtoC, des modèles destinés aux professionnels, BtoB.
« Je fais vraiment le distinguo entre BtoC et BtoB, puis entre les entreprises de front end et de back end. Il y a une différence entre Shift Technology dont jamais personne n’entendra parler dans le grand public et PayPal, qui reste en partie du BtoB, et que tout le monde connaît » décompose Yves Pizay, partner chez Kea.
Et c’est bien côté BtoC que le bât blesse le plus présentement. « Luko, Lemonade… tous ces acteurs qui se sont lancés dans le BtoC ont connu exactement ce qu’ont connu des acteurs tels que Egg Banking et d’autres dans la bulle Internet au tournant des années 2000. Des coûts d’acquisition de clientèle colossaux, de l’ordre de 50 % de la base de coûts, qui font que, avant d’arriver au point mort, ces sociétés doivent arriver à des tailles critiques que beaucoup n’atteindront pas », analyse Éric Balansard chez Courcelles.
Investir beaucoup pour atteindre les millions d’usagers nécessaires à la rentabilité : si cette perspective pouvait se défendre devant des fonds quand l’argent était gratuit, la donne n’est plus la même.
« La fintech BtoB va continuer à se développer »
En revanche, côté BtoB, où le coût d’acquisition de clients est plus faible, les perspectives sont meilleures, à l’instar de Shift Technology, qui automatise les tâches des assureurs avec l’intelligence artificielle, ou encore Descartes dans l’assurance paramétrique. « Ils interviennent sur des étapes critiques de la chaîne de valeur des clients et offrent des retours à la rentabilité plus rapide », pose Éric Balansard.
Son cabinet, Courcelles, s’investit même soit financièrement soit opérationnellement dans certains des modèles assurtech BtoB que portent ses alumnis.
Il y a Fasstn, qui se présente comme l’accélérateur digital des assureurs, mutuelles et courtiers et qui concrètement vend des plateformes aux compagnies d’assurance pour améliorer la distribution de produits d’épargne ou de retraite. Après 5 ans d’existence, la société réalise de l’ordre de 10 millions d’euros de chiffre d’affaires et s’approche de la rentabilité.
Il y a PERmute, une plateforme SaaS à destination des compagnies d’assurance, qui facilite les transferts de contrats retraite entre assureurs.
Des exemples qui, pour Éric Balansard, illustrent que « la fintech BtoB va continuer à se développer parce qu’il y a encore de nombreux problèmes industriels et technologiques sur lesquels ces start-ups peuvent apporter des solutions ».
Pivots et consolidations
Le BtoB est à ce point plus porteur que certaines jeunes pousses pivotent. « C’est par exemple le cas de Lyanne : la start-up, initialement positionnée sur le diagnostic des contrats d’assurance et l’accompagnement des clients, a lancé des services supplémentaires visant à aider courtiers et assureurs à gérer leurs réclamations client et recours entre assureurs », décrit Yves Pizay chez Kea. Seule planche de salut côté BtoC : trouver le bon angle et savoir attirer et fidéliser les clients.
Pour les autres, Giovanni di Francesco chez Ares ne se fait pas beaucoup d’espoirs : « Certaines sociétés vont disparaître, certaines vont être rachetées à prix cassés pour leur portefeuille de clients ou la valeur ajoutée qu’elles auront réussi à apporter »
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