Préparation des lois : le Sénat s’inquiète du rôle des consultants
La secrétaire générale du gouvernement était entendue par la commission d’enquête du Sénat sur l’influence des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques.
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Premier sujet de vive attention des sénateurs à l’endroit de Claire Landais : la raison pour laquelle l’État, doté de ressources multiples dans ses différentes structures, aurait un tel besoin de consultants externes. Ce dont la pandémie de covid a attesté.
Quand les cabinets de conseil écrivent les lois
Et, avant elle, l’incursion de cabinets privés jusque dans la préparation de textes législatifs. À l’instar de la controversée mission réalisée en 2018 sur l’étude d’impact du projet de loi Lom [loi d’orientation des mobilités votée en 2019 – ndlr], confiée au cabinet d’avocats parisien Dentons. De même, le Boston Consulting Group a effectué une étude d’impact en janvier 2021 (ici) concernant la loi Climat-Résilience adoptée en août 2021 (ici) – ce dont le cabinet s’est expliqué devant la même commission sénatoriale (relire notre article).
« Est-il acceptable que le ministère [de la transition écologique – ndlr] court-circuite les institutions qualifiées ? Le Haut conseil pour le climat ne pouvait-il pas réaliser cette prestation ? », questionne la commission qui en profite pour demander à la secrétaire générale du gouvernement si elle a été consultée sur cette étude. « Il n’y pas de raison que le secrétariat général le soit. Le SGG a assemblé à la fin l’étude d’impact pour le Conseil d’État et avant dépôt, pour le Parlement », a-t-elle répondu.
De la même façon, McKinsey avait contribué très en amont à la rédaction du projet de loi dit « Macron 2 », qui avait finalement été enterré.
Les sous-traitances privées des études d’impact de lois ne choquent pas Claire Landais : « Cela ne me semble pas aberrant que ce soit en partie externalisé, car ces prestations ne concernent pas la production normative. »
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Une proposition de loi portée par trente-six députés LR, avec en chef de file, Olivier Marleix (député d’Eure-et-Loir), a été enregistrée à la présidence de l’Assemblée nationale fin février.
Elle vise à interdire les prestations de conseil pro bono à l’égard de toute administration ou parti politique. Son déclencheur : le battage médiatique provoqué par la révélation des interventions de McKinsey dans l’organisation de la campagne de vaccination covid en France. Dans le fond, elle est plutôt floue et met la profession en émoi. Analyse.
La question des déports de hauts fonctionnaires en porte-à-faux avec les cabinets de conseil
Autre sujet récent : le risque de conflit d’intérêt de la part du directeur interministériel de la transformation publique (DITP), Thierry Lambert, dans le cadre du recrutement de son propre fils chez McKinsey en septembre 2022 (relire ici). Pour Arnaud Bazin, le président de la commission, il s'agit d' « une question déontologique sur le conflit d’intérêt et le pantouflage ».
« En avez-vous été informée ? », a-t-il demandé, souhaitant savoir si d’autres déports de la sorte sont prévus. « Je confirme et j’ajoute qu’il m’en a informé avant son déport, compte tenu du risque potentiel. Nous avons eu une réflexion avec lui sur son déport. Je n’ai pas connaissance d’autres déports par rapport aux cabinets de conseil, » répond sans sourciller Claire Landais.
Sur ce sujet, quid du droit de regard de l’administration sur les recrutements des hauts fonctionnaires dans les cabinets et des règles en vigueur pour prévenir les risques de conflits d’intérêt ? « Oui, la reconversion fait l’objet d’un contrat pénal et déontologique qui ne doit pas risquer de porter atteinte au bon fonctionnement des missions du service d’origine. Une mécanique assez bien huilée, avec peu de risques sur ce champ », affirme Claire Landais.
Ce que Didier Migaud, le président de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, a confirmé dans une audition ultérieure.
Crise, compétences manquantes : quand faire appel à des consultants est justifié
Plus largement, Claire Landais avance qu’« il est inévitable d’être accompagné et de bénéficier de ressources extérieures pour faire face à cette crise-là. On est typiquement dans une période où ce recours est légitime ». Pour la secrétaire générale du gouvernement, deux autres cas de figure nécessiteraient également un recours aux consultants : lorsque des compétences internes manquent dans les administrations (à l’instar du champ numérique) et lorsque ce regard extérieur de consultants enrichit la réflexion par leurs expériences et la variété de situations (dans le secteur privé et à l’international).
Des critères plus précis et stricts portés sur les fonds baptismaux par le gouvernement depuis la tenue de cette audition. En effet, le 19 janvier, le Premier ministre a signé une circulaire invitant les ministères et administrations centrales à réduire leurs dépenses de conseil en stratégie de 15% dès 2022 (relire notre article).
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