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Recrutements dans le conseil en stratégie : atterrissage rapide après l’euphorie post-covid

Après des exercices 2021 et 2022 marqués par un fort rattrapage post-covid, les compteurs de l’activité refroidissent, et avec eux les recrutements marquent le pas et changent de nature.

Consultor
25 Oct. 2023 à 18:00
Recrutements dans le conseil en stratégie : atterrissage rapide après l’euphorie post-covid
© Adobe Stock

Voilà deux semaines, au forum conseil d’une top business school où la plupart des cabinets de conseil en stratégie ont leurs habitudes de recrutement, les MBB (McKinsey, Boston Consulting Group et Bain) étaient évidemment présents. Sauf un, et pas des moindres : McKinsey.

C’est un signal faible, mais il corrobore une tendance observée sur le marché du recrutement dans le conseil en stratégie « depuis fin 2022 ou le T1 2023 », ainsi que le date David Cukrowicz, un ancien du Boston Consullting Group et le fondateur du cabinet de recrutement dans le conseil Lastep.

Depuis cette date environ, les signes de ralentissement se sont accumulés dans l’ensemble des sociétés de conseil, les annonces de coupes ou de gels se multipliant.

Certes, nombre de cabinets de conseil en stratégie publient des résultats en croissance (Oliver Wyman : +8 % sur 9 mois), mais globalement, 2023 marque un niveau d’activité moins important que sur les deux exercices antérieurs.

Ce ralentissement dont personne ne veut parler

Aucun cabinet ne voudra le dire publiquement. « Pour les grands acteurs internationaux du conseil en stratégie, l’information de savoir si un cabinet recrute ou ne recrute pas est quasi impossible à avoir. Si elle était sue, ce serait un aveu de faiblesse dans un business dont la dynamique interne de progression hiérarchique rapide repose intrinsèquement sur de la croissance et du turnvover » pose Rafaël Vivier, associé et cofondateur du cabinet de chasse de têtes Wit Associés (et actionnaire à titre individuel de Consultor), qui n’a pas souhaité commenter l’activité de ses clients.

En France, du moins, pour les 250 cabinets de conseil (dont quelques-uns en stratégie) qui en sont membres, le Syntec partage le constat d’un ralentissement.

Ainsi que le confirme à Consultor David Mahé, le président du syndicat : « Nous n’avons pas encore de données consolidées, mais tous les cabinets nous le disent : il y a un ralentissement après une période totalement euphorique et de pénurie de talents. Certains secteurs sont en difficulté et globalement la vigilance est de mise. »

Après une année 2022 hors-sol, 2023 touche terre

Une forme de réalignement pour Rafaël Vivier pour qui « 2022 était un peu hors-sol et a marqué une incongruité. Alors que la guerre en Ukraine se déclarait, alors que l’inflation galopait, il y avait des recrutements dans tous les sens. Même à la fin de l’année dernière, nombre de cabinets semblaient se dire que l’euphorie allait se poursuivre ».

Le retour sur terre est bien concret à présent. Et le tassement se répercute mécaniquement sur les recrutements. Un constat est partagé : il y a moins de tickets d’entrée dans les cabinets, ce d’autant plus qu’il y a moins de sorties à l’autre bout de la chaîne. Notamment parce que les sorties du conseil en stratégie vers les géants ou les start-ups de la tech sont nettement moins nombreuses à l’heure actuelle.

« Longtemps, dans les cabinets de conseil en stratégie, la tech était vue comme une aventure d’hyper croissance. Ce n’est plus le cas. Les fonds qui leur ont prêté de l’argent leur mettent la pression, les recrutements sont moins nombreux, et les consultants ont déchanté. Cela explique aussi qu’il y ait moins de sorties », analyse David Cukrowicz.

Pour les juniors, prio au tier 1

Moins d’entrées et moins de sorties égalent un resserrement voire un stop des recrutements. En France, David Cukrowicz fait le même constat. « Je perçois la même chose, et cela est particulièrement vrai pour les profils juniors. Dans le bas de la pyramide, les recrutements ont été faits et les cabinets sont attentistes pour voir si l’activité va reprendre », dit-il.

Même sentiment pour Thierry Boudès, professeur de stratégie à l’ESCP qui enseigne à nombre d’étudiants qui se destinent à des débuts de carrière dans le conseil. « On est sorti du rattrapage post-covid au cours duquel il y a eu vraiment énormément de recrutements. Les cabinets faisaient de très gros efforts pour avoir accès aux étudiants, qui avaient des offres à tour de bras », décrit-il.

Cette période un peu folle est clairement passée, et sur le campus, les afterworks, les visites de cabinets et les événements en tout genre se font un peu moins nombreux côté conseil.

Dans le détail, les recrutements n’ont pas totalement cessé. Ils sont beaucoup plus sélectifs côté juniors. « Les profils moins élitistes en termes de background professionnel ou académique qui dans un passé récent étaient clairement envisageables le sont nettement moins », appuie David Cukrowicz.

Prio aux écoles de tier 1 donc. Par exemple, à HEC, lors du consulting fair d’il y a 3 semaines, tous les MBB, sans exception, avaient fait le déplacement. Sous peu, les étudiants de l’école seront conviés à l’Intercontinental à Paris par le BCG. Dans la même veine, voilà quelques semaines, McKinsey Casablanca a invité tous les présidents de juniors entreprises et d’associations en lien avec le monde arabe d’écoles de commerce et d’ingénieur françaises pour une visite de présentation.

Ce ne sont pas exactement les signes d’un gel marqué et les cabinets continuent à être présents sur les campus bon gré mal gré comme ce fut le cas en 2001 et en 2008. Ce dont témoigne très ouvertement Pierre-Marin Perrier, le secrétaire général de HEC Junior Conseil qui sera diplômé de l’école en 2026 : « Nous avons des échos extérieurs qui nous laissent penser qu’il y a un ralentissement. Mais il ne se ressent pas dans les échanges que nous avons avec les cabinets qui n’envoient aucun signal en ce sens et perpétuent un dialogue chaleureux. Mais peut-être est-ce le cas parce que nous sommes au niveau zéro du recrutement ? »

Ciblage sur les secteurs et les régions qui fonctionnent le mieux

En effet, à des niveaux plus avancés, le ciblage va crescendo. Aussi parce que dans les plus grands cabinets « l’organisation est devenue très matricielle. Si une ligne verticale ralentit, ce n’est pas nécessairement le cas d’une ligne horizontale », analyse Rafaël Vivier.

Puis, pousse-t-il encore, « la grande tendance que l’on voit se dessiner est que les cabinets de conseil de direction générale continuent à recruter davantage sur des sujets opérationnels que de stratégie de croissance ».

Même son de cloche de David Cukrowicz pour qui « la stratégie de recrutement évolue. Des profils beaucoup plus ciblés sont recherchés par les cabinets de conseil en stratégie. Dans les seuls secteurs dans lesquels ils sont encore très sollicités et où ils identifient des gaps dans leur pyramide », détaille-t-il encore.

Gare au spectre de 2008

La question à présent est celle que pose Thierry Boudès : « Est-ce qu’on va avoir un atterrissage stable ? » Une réponse sur laquelle Rafaël Vivier a quelques doutes : « Les vieux de la vieille se souviendront qu’en 2008, après la crise financière, nombre de cabinets avaient complètement arrêté de recruter pendant de longs mois et qu’ils s’en étaient mordu les doigts ensuite. “On ne nous y reprendra plus”, disaient-ils alors. Était-ce simplement déclaratif ? Les mois qui viennent nous le diront. »

Plus récemment, une erreur analogue avait pu être commise au démarrage de la pandémie de covid et des confinements avec des stops parfois très brutaux sur les recrutements dont certains s’étaient repentis au redémarrage quelques mois plus tard.

Au-delà, la nature de l’atterrissage en cours est corrélée à des facteurs qui dépassent le conseil : la géopolitique chaotique de l’Ukraine ou du Moyen-Orient, l’inflation, le coût de l’énergie, les taux d’intérêt, la tech aux États-Unis… La question reste donc totalement ouverte pour ces prochains mois.

Bain & Company Boston Consulting Group McKinsey Oliver Wyman
Consultor
25 Oct. 2023 à 18:00
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commentaires (1)

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27 Oct 2023 à 11:59
"Rafaël Vivier, associé et cofondateur du cabinet de chasse de têtes Wit Associés (et actionnaire à titre individuel de Consultor)," top de le mentionner :)

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Manuel de survie

Adeline
Manuel de survie
mckinsey, boston consulting group, Bain, oliver wyman, recrutement, recrutements, rh, ressources humaines
13194
Bain & Company Boston Consulting Group McKinsey Oliver Wyman
2023-10-26 20:33:24
1
Non
Manuel de survie: Recrutements dans le conseil en stratégie
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