Pourquoi KPMG accélère le mariage de la stratégie et des transactions
Les départs de partners sous la bannière Global Strategy Group (GSG), la marque de conseil en stratégie made in KPMG lancée en France en 2019 se multiplient. Le patron de la France Cyril Gay Belan est sur le départ. Dans ce contexte, une nouvelle gouvernance est installée pour prendre les rênes d’un ensemble resserré Deal – Stratégie. Objectifs : multiplier les synergies, atteindre une taille critique et une meilleure couverture sectorielle.
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Depuis quelques mois, un vent nouveau souffle entre la tour Eqho de la Défense, où est installée une bonne partie des 11 000 collaborateurs de KPMG en France, et la rue de Liège, dans le 8e arrondissement de Paris (chef-lieu du conseil en strat’ à la parisienne) où le Big Four a installé ses équipes de conseil en stratégie.
Accélération des collaborations des équipes stratégie et deals
En effet, si l’activité de GSG était déjà raccrochée depuis 2020 au deal advisory, qui regroupe 70 consultants à la Défense et environ 7 partners sur les activités de transactions de KPMG (restructuring, integration et séparation, PMI, carve out…), ces deux lignes de conseil vont accentuer leurs collaborations.
« Ce rapprochement vise un fonctionnement plus intégré et plus agile au niveau commercial, en permettant des apports d’expertise mutuels notamment sectoriels sur les projets de stratégie corporate ou transaction. Nous aurons ainsi à cœur de construire des chaînages intelligents sur des projets », explique à Consultor Rémy Boulesteix, associé KPMG, responsable des activités Deal Advisory en France depuis 2021.
D’ores et déjà, la « porosité commerciale accentuée » recherchée, ainsi que la décrit Rémy Boulesteix, prend forme. Plusieurs exemples récents en témoignent.
Une due dil pour un acteur de la logistique ? Le marché est remporté conjointement par un associé de deal advisory spécialiste de l’industrie et un associé GSG spécialiste de la mobilité. Un projet stratégique délivré par GSG pour le compte d’une compagnie aérienne ? Il donne lieu ensuite à deux dossiers de transaction portés par GSG et des équipes de deal advisory. L’intégration de deux compagnies du secteur des consumer goods par les équipes de deal advisory ? Elle se traduit ensuite par la réalisation d’un plan stratégique par GSG.
Nouvelle gouvernance GSG – deal
Concrètement, une nouvelle gouvernance GSG – deal advisory est instaurée. C’est à Damien Allo, un expert-comptable de formation et un partner issu des activités de deal advisory, que revient la responsabilité de conduire l’attelage de 110 consultants (70 côté deal, 40 côté GSG) et 10 partners (7 côté deal advisory, et 3 côté GSG, sur un total de 200 partners pour KPMG en France).
Plusieurs objectifs sont recherchés. Les équipes conjointes permettront une couverture sectorielle plus large. Les dominantes sectorielles des partners de GSG, dans les services financiers, les consumer goods, les mobilités ou encore les technologies, les médias et télécoms complèteront celles des associés et directeurs de deal advisory, qui sont notamment positionnés dans l’industrie, la pharma, l’énergie et la santé.
Autres ambitions : élargir la taille de l’équipe, augmenter la diversité des missions proposées tant d’un point de vue sectoriel que dans la typologie des missions, et in fine le volume des missions côté deal et côté GSG. Par exemple les équipes GSG et deal travailleront de pair dans le cadre d’acquisitions ou de vente d’actifs ou de repositionnements stratégiques.
Un regroupement au détriment du conseil en stratégie ?
Ce nouvel attelage pose la question de la place que pourront y jouer les consultants en stratégie, et dans quelle mesure cette activité pourra y exister à part entière.
Car, 4 ans après son démarrage en France avec de grosses ambitions, l’activité GSG a enregistré plusieurs départs de partners – venus chez KPMG pour développer le volant conseil en stratégie.
Ainsi de Jean-Marc Liduena qui est tout récemment parti. Avant lui, il y eut Frédéric Thomas (parti chez Roland Berger), Emmanuel Hembert (parti chez Nova Consulting et à présent en fonction chez Quantis, racheté par le BCG) et Joël Benzimra (parti chez Nova Consulting et à présent chez Bain).
À ces moves successifs s’ajoute à présent celui de Cyril Gay Belan. Arrivé de Monitor Deloitte en 2019, le patron France de GSG est sur le départ. Cyril Gay Belan était arrivé de Monitor Deloitte en 2019 au côté de Jean-Marc Liduena, Grégory Morel, Jean-Charles Ferreri et Bertrand Grau (les trois derniers restent à ce jour partners chez GSG).
Son objectif était alors de développer la marque GSG en France.
Le point commun à l’ensemble de ces départs est qu’il signe le retour de profils issus de cabinets historiques du conseil historique vers… des cabinets historiques du conseil en stratégie ou des cabinets qui s’en prévalent.
Ces mouvements signalent aussi l’éventuelle difficulté qu’ont pu expérimenter certains de ces partners à gérer le caractère limitatif du développement d’une activité de conseil dans le contexte d’un Big Four.
Chez EY, Deloitte, PwC et KPMG, les équipes EY-Parthenon, Monitor Deloitte, Strategy & et GSG ont interdiction de vendre quelque prestation de conseil que ce soit aux clients servis par ailleurs par le groupe sur des prestations réglementées (le fameux channel 1, le commissariat aux comptes notamment). Certains partners le vivent mal, et cette contrainte peut expliquer certains départs.
Les objectifs de développement de GSG
Cette division par deux du nombre de partners GSG, Rémy Boulesteix et Damien Allo ne l’éludent pas. Ils indiquent à Consultor que des renforcements seniors, par promotions internes ou recrutements externes, aux grades de directors et de partners chez GSG sont en cours, notamment sur la partie private equity et ESG. L’objectif est de porter à nouveau le nombre de partners GSG à six en France.
Et sur les inquiétudes de dilution du conseil en stratégie que ce rapprochement pourrait susciter auprès des candidats, des recrues, des consultants ou des clients, Rémy Boulesteix et Damien Allo sont droits dans leurs bottes.
« L’ambition n’est pas de diluer notre positionnement stratégique, assure Damien Allo, associé KPMG, Head of Deal Strategy, l’entité nouvellement créée. Nous souhaitons continuer à nous différencier auprès des talents, grâce à une approche multidisciplinaire forte, une marque puissante construite sur la confiance de nos talents comme de nos clients. Le modèle que nous proposons, et qui va dans le sens des attentes des talents, est un cabinet de conseil en stratégie premium, qui bénéficie d’une approche commerciale enrichie et mutualisée avec les multiples expertises du cabinet, qui continue à bénéficier d’un investissement fort. »
« Comptant aujourd’hui plus de 40 consultants, le nouvel élan GSG initié en 2019 nous donne satisfaction, avec notamment de bons retours clients. L’évolution d’organisation actuelle est partagée par l’ensemble des acteurs du marché, pour aller vers des projets plus complexes qui savent mobiliser toute la richesse de notre expertise, comme en témoignent de récents projets d’envergure accompagnés sur le marché » appuie Rémy Boulesteix.
S’aligner sur la concurrence
À les entendre, donc, la difficulté à développer ou maintenir le partnership GSG n’est pas la cause du rapprochement. Il correspond plutôt à une volonté de gommer certains recouvrements entre PMI, carve out et conseil en stratégie, avec des inefficacités parfois. Surtout, ce rapprochement est un alignement de ce que plusieurs pays de KPMG ont déjà fait et à une tendance de marché déjà observée chez EY ou chez PwC. En cela, Rémy Boulesteix et Damien Allo concèdent d’ailleurs être plutôt suiveurs.
« C’est un modèle hybride, comme ce que fait KPMG partout dans le monde et comme ce que font tous nos concurrents », souligne Rémy Boulesteix. Quand Damien Allo met en exergue la similitude du rapprochement entrepris par KPMG avec ce que font même les historiques de la strat’ : « Prenez n’importe quel cabinet de tier 1, des activités de carve out ou de PMI sont toujours proposées. On répond conjointement à des marchés avec un des trois MBB, la strat’ n’est jamais complètement isolée, mais avec des prestations de conseil sur le carve out et les roadmap IT. »
Un chaînage des lignes de conseil, si cher à certains des Big Four, que KPMG, par ce rapprochement, entend amplifier encore. Et auquel la récente déconfiture du split EY donne du crédit.
Et Damien Allo d’enfoncer le clou : « La corporate strategy n’est pas un projet isolé qui naît dans le quotidien d’un dirigeant. C’est au contraire toujours un projet qui porte de multiples implications opérationnelles, et est souvent lié à la croissance externe et à la protection de la valeur. Dans cette logique-là, l’offre des Big Four me parait très solide. »
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