Une armada d’ex-consultants derrière le succès de 3i
Le conseil est souvent une belle carte de visite pour rejoindre le private equity. Et le secteur du PE ne se prive pas de piocher dans le vivier consulting (en parallèle de celui de la banque d’affaires) pour renforcer ses équipes. C’est le cas de 3i, qui compte près de 30 % d’anciens consultants dans sa team parisienne, dont le premier d’entre eux, Rémi Carnimolla, DG France, et le dernier promu, Pierre-Axel (Pax) Botuha, partner, co-responsable du PE en France.
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D’un côté, les cabinets de conseil en stratégie, présents dans le PE, réalisent une véritable montée en puissance de leurs équipes dédiées, et ce, même si le secteur a vécu une période plus compliquée l’année dernière. Certains cabinets s’en sont fait une spécialité depuis plus de 10 ans. De l’autre côté, les acteurs du PE sont friands de ces consultants spécialisés private equity qui ont envie d’opérationnel.
C’est notamment le cas de 3i, la société de capital-investissement britannique fondée au sortir de la Seconde Guerre mondiale (rebaptisée officiellement Investors in Industry en 1983, et communément 3i), cotée à la bourse de Londres (depuis 1994) et faisant partie de l’indice boursier FTSE 100 des cent entreprises britanniques les mieux capitalisées cotées à la bourse de Londres. 3i, et ses deux pôles PE et infra, 21 milliards d’euros de gestion d’actifs en 2022 (dont 19 en PE), a ouvert des bureaux en Europe, aux États-Unis et en Asie.
Promo pour l’alumni du BCG
Et un bureau parisien qui compte aujourd’hui 17 investisseurs, dont pas moins de 5 anciens consultants. « À la différence des fonds d’investissement, notre spécificité en tant que société de capital-investissement est que nous investissons notre bilan (sans argent d’investisseurs tiers) dans des sociétés mid-cap, entre 100 et 500 millions d’euros de valeur, dans trois secteurs, le consumer, la santé, les logiciels et services digitaux, où nous allons chercher la croissance, le déploiement et le changement d’échelle, pas l’optimisation de coût ou le restructuring », partage à Consultor Pax Botuha, 40 ans, l’ancien project leader du Boston Consulting Group, qui vient d’être promu partner co-responsable du PE de 3i France (avec Marc Ohayon, un ancien de Lazard). Il était arrivé chez 3i en 2021 comme director. Les nouvelles missions du co-lead PE : déployer le capital en France, gérer l’équipe parisienne, participer à l’élaboration de la stratégie d’investissement et de la politique RH, et en tant qu’expert consumer, aider ses pairs à investir dans des marques.
Le jackpot « Action »
Dans le pôle PE que co-dirige désormais cet ancien du conseil en stratégie, le portefeuille est garni d’une une quarantaine de sociétés en croissance, dont Action depuis 2011, « où nous sommes majoritaires », enseigne d’origine néerlandaise créée en 1993 opérant dans le secteur de la vente hard discount de produits non alimentaires, implantée depuis dans une dizaine de pays européens (en France depuis 2012). Et un jackpot à la clef. 3i avait alors investi quelque 279 millions d’euros dans l’entreprise, aujourd’hui elle vaut près de 12 milliards d’euros…
3i avait également investi en 2013 dans Basic-Fit (franchise de salle de fitness), et le groupe vendéen de compléments alimentaires Havea, qui est passé de moins de 100 millions d’euros de chiffre d’affaires lors de l’entrée par 3i en 2017 à près de 215 millions d’euros en 2021. Deux entreprises dont la société de capital-investissement est sortie récemment. L’ex-BCGer s’occupe notamment en ce moment de Konges Sloejd, une marque danoise en forte croissance dans l’univers de l’enfant, réalisant 80 % de son activité à l’international. Et dont 3i a pris une participation majoritaire l’année dernière.
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Mi-novembre, l’effondrement de la plateforme de cryptomonnaies FTX a jeté un froid sur les consultants en strat’ qui avaient avalisé des investissements de plusieurs dizaines, voire de plusieurs centaines de millions de dollars au capital de l’entreprise. Ces due dil stratégiques sont toujours susceptibles d’erreurs, de biais et de discussions malgré leur formalisme poussé.
Consulting à tous les étages
3i France est pour le moins plutôt consulting-compatible. Le DG France de 3i depuis 2012, Rémi Carminolla, membre du comité d’investissement du groupe, est également un ancien consultant, chez McKinsey en début de carrière entre 2000 et 2003. Mais aussi Louis Gréaume (ESSEC 2014), chez Roland Berger de 2015 à 2017 et qui est arrivé comme investisseur chez 3i en 2021, Thibault Laure (Sciences Po 2016), un ancien de L.E.K. Consulting (2016-2020) et du BCG (2021-2022) recruté chez 3i en 2022, et Nathaniel Haloua (HEC 2018) qui a passé 4 ans chez L.E.K. Consulting entre 2018 et 2022 avant d’entrer comme investisseur chez 3i. « J’aime bien travailler avec d’anciens consultants pour leur culture d’excellence, leurs capacités d’analyse, leur côté teamwork. Des qualités qui sont très complémentaires avec notre autre vivier de recrutement qu’est la banque d’affaires. »
Pax Botuha, CentraleSupélec promo 2007, coche lui-même toutes les cases du bon profil PE ; il est un ancien consultant issu de la banque d’affaires, avec « un fil conducteur qu’est l’international ». Il a en effet débuté sa carrière comme analyste, puis associate M&A au sein de la banque Edmond de Rothschild (2007-2011) avant de rejoindre le BCG. Un cabinet où il a réalisé des missions en France, en Allemagne, à Singapour et aux États-Unis, dans l’industrie et le shipping, « axées sur la stratégie, l’entrée sur de nouveaux marchés, la finance d’entreprise et l’efficacité des forces de vente. Le BCG reflète l’état d’esprit du conseil en stratégie, le can do, aimer cracker des problèmes, avec une approche à la fois business et transaction. » Après ces 3 années d’expérience consulting, « inestimable en private equity », Pax Botuha entre d’abord chez L-GAM, un fonds affilié à la famille princière du Lichtenstein en qualité de vice-président basé à Londres, ensuite comme directeur de participations chez Omnes Capital à Paris, puis entre 2017 et 2021 principal chez L-Catterton, un fonds gérant plus de 16 milliards de dollars de capitaux dédiés aux entreprises B2C.
Le gros défi de cette société d’investissements depuis un an : la décarbonation de son portefeuille, à savoir réduire les émissions de carbone des entreprises dans lesquelles elle a investi. 3i a adhéré en 2023 au SBTi (Science Based Target), initiative portée notamment par le Pacte mondial des Nations unies pour une réduction drastique des émissions des CO2 des entreprises. « Peu de fonds sont engagés dans cette démarche-ci, car elle est extrêmement formalisée et très contraignante. Nous sommes engagés dans des initiatives et indices RSE depuis 2011 (c.-à-d. des labels à la pelle), FTSE4Good, Ethibel Sustainability Index Excellence Europe, PRI (Principes pour l’investissement responsable, ndlr), ICI (Initiative Climat International, ndlr). Cela nous a paru nécessaire d’aller encore plus loin dans cet enjeu incontournable de décarbonation de notre secteur », souligne l’ancien BCGer, tout juste promu partner. Pas d’objectifs chiffrés officiels, sauf l’engagement de comptabiliser les émissions directes et indirectes associées à son portefeuille scope 1 (émissions de gaz à effet de serre, GES), 2 (énergie), 3 (émissions indirectes incontrôlables par l’entreprise). Et de publier une feuille de route en cours de bilan. Pour proposer du concret et sortir de ce qui s’apparente encore trop souvent à du greenwashing…
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