Exclusif - Nombre d’années pour devenir partner : le comparatif 2023 de Consultor
8 ans minimum, 12 ans maximum : telle est la fourchette de durées, très variables, qu’il en prendra aux consultants qui commencent leur carrière dans 30 cabinets de conseil en stratégie dont Consultor a passé les time in grade (le temps moyen par grade hiérarchique) au peigne fin. À noter : une certaine tendance RH ou commerciale au rebranding de fonction (« principal » devenu « directeur » puis « associate partner »).
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Agilité. Beaucoup des candidats qui défilent en entretiens en cours de carrière dans des cabinets de conseil en stratégie concurrents, en font état.
« Nous avons le sentiment que tout le monde met de plus en plus d’agilité dans les parcours. Beaucoup des candidats que nous recevons en entretien, beaucoup plus que par le passé, disent être dans un parcours fast track (parcours de progression rapide dans la hiérarchie d’un cabinet, indépendamment des durées normales prévues par l’entreprise, ndlr) », témoigne un partner qui a requis l'anonymat.
Exactement l’agilité dont fait état son confrère Florian Harrault, principal chez Ares & Co, en charge des recrutements. Chez le spécialiste des services financiers, les grades n’ont que peu ou pas évolué depuis la création de l’entreprise en 2009.
« Chez Ares & Co, les durées par grade sont à titre indicatif, car d’expérience, dans une carrière de consultant, les progressions ne sont pas toutes linéaires : certains sont nativement plus à l’aise sur les principaux attendus des grades juniors quand d’autres ont des qualités initiales qui leur serviront davantage un peu plus loin dans leurs parcours. Avoir un cadre agile, en cohérence par ailleurs avec notre taille humaine, nous permet de faire évoluer rapidement les consultants les plus performants et de laisser plus de temps aux autres sans que cela soit ressenti négativement », témoigne Florian Harrault.
Donc, si Ares & Co affiche 12 ans de durée moyenne pour arriver au grade de partner, la pratique interne du cabinet est davantage du sur-mesure et du cas par cas à l’occasion de comités dédiés tous les 6 mois où plusieurs blocs de compétences sont passés en revue et les décisions de promotion prises indépendamment de la pyramide théorique.
Le pragmatisme règne
Ce décalage avec la réalité de la pratique interne est commun à nombre de cabinets. Exemple chez Simon Kucher qui affiche une des durées globales les plus courtes du panel (7 ans, même si en pratique personne ne devient partner avec moins de 8 ans d’ancienneté).
A priori, ici, les quatre premières marches sont de durées normées. Dans les faits, les grades senior consultant et senior manager peuvent être faits en marche rapide en 6 mois au lieu de 1 an au moins. Et cette logique d’adaptation va encore plus loin une fois parvenu au niveau de director : là, les plus rapides passeront partner en 2 ans (c’est la durée affichée), mais c’est souvent plus, et certaines et certains peuvent même rester à ce grade ne souhaitant pas endosser la responsabilité commerciale qui échoit aux partners.
Souplesse pour tous
À tel point que ceux des cabinets qui se cantonneraient trop strictement aux durées types prévues par leur pyramide pourraient être vus comme rigides vis-à-vis de la concurrence.
C’est du moins une autocritique que formule une de nos sources vis-à-vis de son propre cabinet. « Nous, ce qu’on affiche, on le respecte à la lettre en toute transparence. Nous sommes peut-être un peu plus longs que chez la concurrence, en revanche un partner chez Eight est à 99 % un equity partner. Il n’y a pas de demi-partner comme on peut les voir parfois ailleurs », appuie-t-elle.
Une rigueur qui peut avoir ses limites, notamment vis-à-vis des profils venant du corporate, comme l’analyse la même source : « Il y a une tendance à la multiplication de l’arrivée de profils avec des parcours hybrides dont corporate. Pour des profils qui rentrent à 5 ans d’ancienneté, si la première échéance non négociable est 6 mois plus tard, cela leur met une pression énorme »
Si l’empirisme règne en interne dans chaque cabinet, pourquoi affichent-ils tous des étiquettes aussi nombreuses, et pourquoi font-ils évoluer les durées et les noms ?
Les 1001 raisons de la valse des étiquettes
Pour nos interlocuteurs, cela est le résultat de plusieurs facteurs : cultures d’entreprise mise en cohérence avec ce qui est pratiqué dans les groupes globalement pour les plus gros cabinets, structures de rémunérations différentes ou encore forte croissance de cabinets, à l’instar du BCG qui s’est illustré en créant un grade de partner non equity.
Ou peut prévaloir encore la volonté de s’aligner sur la concurrence, comme ce fut le cas tout récemment pour l’activité de conseil en stratégie interne à BNP Paribas CIB qui a refondu totalement sa pyramide.
Même logique de benchmark de Simon-Kucher quand, voilà 2 ans, le cabinet a refondu ses grades : « Nous nous sommes développés, nous avons été obligés de nous structurer », indique David Vidal, le managing partner de Simon-Kucher en France.
Consultant, manager, partner : le b.a.-ba de la hiérarchie dans le conseil
Pour un patron de cabinet, qui a souhaité intervenir de manière anonyme sur ce sujet, ces grilles reflètent schématiquement les trois grands niveaux qui structurent les ressources humaines dans l’ensemble des cabinets de conseil : « Consultant, manager et partner : les premiers sont attendus sur des compétences analytiques ; les seconds sur de la gestion de projet, vis-à-vis des consultants, des partners, et des clients ; les derniers sur leur capacité à convaincre. »
Ce sont ces grands blocs qui ont prévalu quand il s’est agi de créer la pyramide de Strategia : une pyramide parmi les plus simples du panel. « On l’a structurée par rapport à ce qui nous a semblé être une trajectoire dans laquelle les consultants peuvent se projeter, ce qui est essentiel », juge Thomas Chèvre, partner et fondateur de Strategia, le cabinet créé en mars 2021.
Une grille qui pourra, là aussi, être ajustée avec le temps et à l’usage, comme elle n’a que 3 ans pour le moment.
L’embrouille des nouveaux grades
En évitant l’écueil de la surmultiplication des étiquettes ou des couches hiérarchiques qui peuvent diluer les responsabilités et mettre certains consultants à grande distance des partners ou des clients. Et peuvent finir par dérouter totalement sur le qui fait quoi dans certains cabinets : « Sur un marché récent, je cherchais à comprendre à quoi correspondait le grade d’un des membres de l’équipe adverse, mystère total », glisse un partner qui a requis l’anonymat.
Car ce que Consultor relevait dans la dernière édition de son étude reste vrai : la valse des étiquettes. D’un cabinet à l’autre, les noms de fonctions varient beaucoup : « junior consultant », « associate », « analyste », « consultant », ne serait-ce que pour le premier grade.
À l’autre bout de la pyramide, le remplacement du grade « principal » ou « directeur » par celui d’« associate partner » semble être une tendance notable. Cela permet probablement de faire monter le taux journalier facturé aux clients, plus susceptibles de payer plus cher un consultant au titre d’« associate partner » plutôt que de « principal », qui n’évoque pas grand-chose.
Mieux, au BCG, sans doute pour des raisons similaires de flatterie clients et d’ego des consultants, un étage « partner » à 8,5 ans d’expérience, non associé, a été ajouté il y a peu.
En un mot, la création de grades peut s’envisager quand elle vise à clarifier le qui fait quoi, mais également sans doute parfois avec l’objectif totalement inverse pour brouiller à des fins d’éventuelles filouteries RH ou commerciales.
C’est en revanche pour clarifier si David Vidal, chez Simon-Kucher, réfléchit, par exemple, à l’ajout d’un grade : « subject matter expert », à l’instar des « tracks experts » de McKinsey ou du BCG, qui permettrait de différencier les principals qui souhaitent et qui ont la capacité à devenir partner, de ce qui n’y aspirent pas ou ne le peuvent pas. Ce qui, dans ce cas, serait une mesure de transparence en interne et en externe.
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