Partners strat’ en France : beaucoup de turnover et peu de croissance
100 mouvements de partners de novembre 2022 à février 2024, avec un solde de 8 associés supplémentaires pour les 11 cabinets observés. La 3e édition de l’étude menée par Consultor confirme la tendance au ralentissement – relatif – du marché, bien que certains cabinets connaissent une nette croissance de leur partnership.
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Une augmentation ici ou là, un resserrement ailleurs : assurément, les chiffres de la mobilité des partners, de novembre 2022 à février 2024, sont contrastés*.
Le solde global reste néanmoins positif : + 8 partners donc, soit 392 associés dans les 11 cabinets pris en compte. En comparaison, lors de la précédente période d’observation (de janvier 2021 à novembre 2022), le partnership total s’était étoffé de 51 associés.
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Consultor a passé en revue les 148 départs et arrivées de partners intervenus depuis janvier 2021 dans les cabinets de conseil en stratégie comptant plus de dix partners en France.
Pour rappel, le partnership avait été augmenté de 39 associés durant la première période étudiée (de janvier 2019 à janvier 2021).
La mobilité totale, c’est-à-dire le nombre de départs et d’élections, reste pour sa part stable, avec 100 mouvements en 15 mois – équivalente à celle de janvier 2021 à novembre 2022 (148 mouvements) et supérieure à celle de janvier 2019 à janvier 2021 (130 mouvements).
Une prudence globale des cabinets quant à la taille de leurs partnerships
Cette tendance s’observe plus particulièrement chez les « très grands » de la stratégie, le BCG et McKinsey. À une exception près : Bain est en effet le seul des MBB à avoir fait croître son partnership de 14%. Si le cabinet du 25 avenue Kléber a enregistré deux départs, il dispose désormais de 8 nouveaux associés.
Du côté du BCG, le solde d’associés n’a strictement pas bougé : si le cabinet a vu partir 11 partners, il en a accueilli tout autant. Le BCG reste ainsi leader du nombre de partners en France, avec 84 associés. Pour McKinsey, la situation est un peu différente, le cabinet ayant vu son partnership se réduire de 6 associés (4 élections, 10 départs). Sachant que certains partners ont changé de bureau – Cindy Popp, désormais partner en Allemagne par exemple – ou de statut, avec une sortie du capital (Filippo Rossi, devenu senior partner Emeritus). McKinsey pointe donc en 2e position pour la taille du partnership en France, avec 73 associés. Bain, évoqué précédemment, se classe 3e avec 48 associés (au 18 février 2024).
Les champions de la mobilité, et ceux de la stabilité ou de la régularité
Sur la mobilité « brute » cumulée (total des mouvements depuis janvier 2019), le top 5 est le suivant : McKinsey avec 44 mouvements, devant le BCG (42), Oliver Wyman (40), Roland Berger (28) et Bain (24).
En leur sein, seuls les bureaux de Paris de McKinsey et d’Oliver Wyman enregistrent un solde négatif de novembre 2022 à février 2024, chacun ayant perdu 6 partners.
Des départs qui correspondent, en partie, à des changements de bureaux, pour McKinsey comme indiqué précédemment, et pour Oliver Wyman. Ainsi, Muriel Schtickzelle, Guillaume Thibault et Tom Fleming sont partis à Bruxelles, Dubaï et New York. Quant à Gérard Varacca, il fait partie des 4 partners, tous cabinets confondus, ayant atteint la limite d’âge ou de temps passé au sein d’un partnership.
À l’inverse, certains cabinets se font remarquer pour les faibles mouvements de leur partnership ou la régularité de son évolution. C’est le cas de de PMP Strategy (stabilité), qui totalise 6 mobilités depuis janvier 2019, et de L.E.K. Consulting, qui en totalise 7 (régularité). Sachant que le bureau de Paris de PMP Strategy comporte 17 associés et celui de L.E.K., 15.
Le second graphique dédié aux mouvements des partners, rapportés cette fois-ci à la taille du partnership, confirme le statut de ces deux cabinets.
Ainsi, le taux moyen de mouvements de PMP Strategy s’élève à 13% – bien que le dernier taux soit nettement supérieur en raison des 4 nouveaux associés que compte désormais le cabinet : Cyril Gay Belan, Jonathan Zelmanovitch, Laure Lemaignen et Lionel Chapelet.
Pour Frédéric Jover, cofondateur et partner du cabinet, « la stabilité de notre partnership tient à la fois à la forte croissance de PMP Strategy, avec un chiffre d’affaires de + 80% sur les 4 dernières années, et à la nature de son projet entrepreneurial – être reconnu à l’international comme LE cabinet français de stratégie ». Par ailleurs, selon son cofondateur, « avec 150 consultants, la taille de PMP Strategy permet aux partners d’échapper aux carcans à l'œuvre dans de plus grosses structures, grâce à une priorisation du collectif notamment. Il n’y a pas de guerre des comptes ! » Autre facteur, le fait que « tous les partners du cabinet soient des “Equity Partners”, ce qui induit une fidélisation ». À la différence d’Oliver Wyman par exemple, dont les actions sont exclusivement détenues par sa maison-mère, Marsh & McLennan.
Si PMP Strategy apparaît comme le champion de la stabilité, L.E.K. fait figure de leader quant à la régularité de mouvements des partners – avec un taux de 20% sur chaque période observée.
Selon le directeur du bureau de Paris, Maxime Julian, cela s’explique aisément. « En Europe et notamment en France, la plupart des partners font la majeure partie de leur carrière chez L.E.K. ». Sachant que les élections relèvent en grande partie de la promotion interne. D’ailleurs, quand les nouveaux associés viennent de l’extérieur, ils ont souvent un historique malgré tout au sein du cabinet : c’est le cas de Claudio Molinaro, arrivé en avril 2022, et de Benjamin Audon, partner depuis septembre 2023. De cette stabilité découle la régularité, L.E.K. pilotant son partnership essentiellement via l’élection de nouveaux associés – en 2023/début 2024, outre Benjamin Audon, Philippe Gorge et Benjamin Tuchman – et faisant face à très peu de départs.
L.E.K. s’est par ailleurs doté d’un Partner Development Commitee (PDC) depuis un peu plus de 5 ans, qui aide les principals à mieux se projeter sur la suite de leur carrière. Autre avantage selon Maxime Julian, « une plus grande objectivation de la prise de décision, qui dépend du secteur en Europe et est validée par un comité spécifique d’associés, pour davantage de neutralité ».
Malgré la contraction du marché du conseil, le directeur du bureau de Paris estime qu’il est « plus facile de gérer la volatilité quand on dispose d’un partnership significatif ».
Du côté des champions de la mobilité, Oliver Wyman et Roland Berger arrivent en tête ex-aequo, avec un taux de 33% en moyenne, nettement supérieur à la « règle » des 20% de renouvellement annuel du collège de partners. Des niveaux élevés qui induisent pour ces cabinets un taux d’effort plus important, mais qui correspondent à des modalités de fonctionnement assumées. Les taux de mouvements d’Oliver Wyman et de Roland Berger étaient déjà les plus élevés lors des éditions précédentes – à l’exception de 2021 où Kéa s’était classé premier ex-aequo, via de la croissance externe.
Par ailleurs, le bureau de Paris de Simon-Kucher étonne par son taux de mouvements sur ces 15 derniers mois !
Dans le détail, le cabinet du square Édouard-VII, qui regroupe 16 associés, n’enregistre pas moins de 7 élections – « issues essentiellement de l’interne » selon David Vidal, managing partner Europe du Sud et managing director France de Simon-Kucher. « Seul un associé, Jean-Louis Delpérié, est venu de l’extérieur [d’Exton Consulting, acquis par Accenture Strategy, ndlr] sur un métier nouveau pour SK, l’assurance. »
Le bureau de Paris est porté par « une belle dynamique de croissance, sur des secteurs qu’il a très bien développés : la partie Consumer, le Private Equity, et la partie Industrie qui donne lieu à un renouvellement de générations ».
Une recherche de croissance assumée par David Vidal, qui repose notamment « sur les secteurs développés récemment et des lignes de service naissantes qui demandent à être pleinement déployées – software, stratégie digitale, Private Equity ».
Quant aux 4 « départs » répertoriés chez Simon-Kucher, ils relèvent en réalité de rattachements à d’autres bureaux (Dubaï pour Marc Matar, New York pour Robert Dumitrescu), ou de sortie du capital d’associés ayant contribué durant 16 ans au partnership (Florent Jacquet et Franck Brault). Tous deux poursuivent d’ailleurs leur activité chez Simon-Kucher en tant que senior advisors.
Focus sur le taux de mouvements des partners selon leur genre, et sur leur « destination »
D’après les résultats de notre étude, l’appartenance à la gent féminine, ou masculine, a en effet une incidence.
Ainsi, le taux de mobilité des femmes partners s’avère plus élevé, à 35% contre 24% pour leurs confrères. L’impact n’est pas significatif en revanche sur la répartition entre départs et élections.
Ce taux de mouvement plus élevé peut s’expliquer par le vivier que représentent les femmes partners pour les clients du conseil, avec en perspective la possibilité qu’elles rejoignent leurs boards. Au-delà de l’univers du conseil en stratégie où la parité des partnerships reste un objectif… lointain (à l’exception de Simon-Kucher, qui touche presque au but), les grands groupes et/ou institutions publiques ne disposent pas d’une multitude de candidates pour des postes de direction.
Voyons donc si l’hypothèse d’une plus grande sollicitation des femmes partners par les clients des cabinets de conseil, se vérifie.
En consultant le graphique portant sur la destination des partners quittant leur cabinet, la différence entre les femmes et les hommes ne fait plus débat. Là où les hommes partners optent très largement pour le conseil en stratégie – ailleurs ou dans un nouveau bureau –, les femmes se dirigent en tout premier lieu vers de grands groupes privés ou des organismes publics.
Dans notre étude, c’est le cas de Nathalie Bouvier-Tersiguel (ex-McKinsey), laquelle a rejoint Alstom en tant que directrice de la stratégie. Mêmes cas de figure pour Marianne Debains (ex-Oliver Wyman), devenue responsable de la stratégie, M&A and FP&A du Groupe Bouygues, et pour Dominique Guilhem (ex-Oliver Wyman également), désormais cheffe de cabinet de la présidente et DG de Sodexo. Quant à Daphné Maurel (ex-McKinsey), elle est devenue DG de la Protection civile Paris Seine (PCPS).
Un écueil supplémentaire pour les cabinets de conseil désireux de féminiser leur partnership. Dans un tel contexte, la voie de la fidélisation et de la valorisation des parcours féminins internes, choisie par Simon-Kucher, porte manifestement ses fruits. Les femmes associées constituent en effet 44% du partnership du cabinet – le record dans le monde du conseil ! À l’inverse, la chasse aux profils d’associées externes paraît extrêmement délicate.
Pour conclure, si certains cabinets ont réduit la voilure de leur partnership par prudence, par anticipation d’un tassement plus important du marché ou dans l’attente de nouvelles arrivées, d’autres ont tiré leur épingle du jeu, pariant notamment sur des relais de croissance importants. L’avenir dira s’ils ont eu raison. Quant au taux de mouvements des femmes partners et à leur « destination » ultérieure, il contribue à éclairer le secteur du conseil en stratégie sur ses avancées en matière d’égalité professionnelle – et sur ce qui se joue aussi en dehors de son périmètre.
* Le panel de cabinets pris en compte par Consultor a légèrement évolué depuis l’édition précédente, avec l’arrivée de CVA (Corporate Value Associates) et de Simon-Kucher. Cet échantillon est composé de cabinets de conseil se consacrant principalement à la stratégie et comportant 10 associés ou plus.
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