Sur l’index de l’égalité professionnelle, le consulting joue la montre
50 % des cabinets de conseil en stratégie français recensés dans le guide de Consultor n’avaient pas publié leur index à la date de cet article. Toutes les entreprises de plus de 50 salariés y sont obligées chaque 1er mars, sous peine d’amende.
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À la date de cet article, 10 cabinets de conseil en stratégie avaient publié leur index, sur un total de 20 cabinets dans le périmètre des entreprises de plus de 50 salariés à qui le ministère du Travail demande de publier son index tous les ans depuis 2020. Les 11 autres cabinets que recense Consultor sont en dessous du seuil (Consultor recense à ce jour 31 cabinets de conseil en stratégie au total).
Un taux de publication nettement inférieur à l’année dernière où, à la même date, Consultor avait recensé 82 % de publication (avec un panel de cabinets différent).
Il est aussi inférieur aux 61 % d’entreprises de plus de 50 salariés qui, tous secteurs confondus, ont publié leur index, soit exactement le même pourcentage que l’an dernier, faisait savoir le ministère du Travail le 7 mars 2022.
Deux raisons principales expliquent ce faible taux de publication : nombre de cabinets n’avaient pas finalisé leur index à ce jour et envisagent de le faire ultérieurement (Consultor mettra à jour sa publication). D’autres, à l’instar d’EY-Parthenon (dont les chiffres sont inclus dans ceux d’EY Consulting plus largement), choisissent de mettre à jour leur index à un autre moment de l’année. Dans le cas d’EY-Parthenon, l’index est arrêté au 31 décembre.
Rappel du fonctionnement de l’index : les entreprises mesurent leurs écarts salariaux dans un indicateur sur 100 points décomposés en quatre ou cinq critères (quatre pour les entreprises de moins de 250 salariés, cinq pour les entreprises de plus de 250 salariés). Les voici :
- Écart de rémunération entre les femmes et les hommes (sur 40 points). Sont recensées les rémunérations moyennes des femmes et des hommes dans une entreprise. Pour obtenir l’intégralité des 40 points, une entreprise doit ramener l’écart entre la rémunération des femmes et celle des hommes à zéro.
- Écart de répartition des augmentations individuelles (sur 20 points). L’indicateur évalue le pourcentage de femmes et d’hommes qui ont perçu une augmentation dans l’année. Pour obtenir l’intégralité des points, une entreprise doit accorder les mêmes augmentations aux femmes qu’aux hommes, à 2 % près ou à deux personnes près.
- Écart de répartition des promotions (uniquement dans les entreprises de plus de 250 salariés, sur 15 points). Les points sont attribués aux entreprises qui, au cours de l’année, promeuvent autant de femmes que d’hommes à 2 % ou à deux personnes près.
- Nombre des salariées augmentées à leur retour de congé maternité (sur 15 points). La totalité de la note est attribuée à une entreprise qui accorde une augmentation aux femmes revenant d’un congé maternité. Si une seule salariée dans cette situation ne perçoit pas d’augmentation, aucun point n’est accordé à l’entreprise.
- Parité parmi les dix plus hautes rémunérations (sur 10 points). Pour obtenir ces 10 derniers points, une entreprise doit compter au moins quatre femmes parmi ses dix plus hauts salaires.
Sans surprise, c’est ce dernier critère qui pèche dans le conseil en stratégie. Un enjeu récurrent dans les cabinets, plus que dans les CA des entreprises du CAC 40 par exemple. Ce n’est pas nouveau et cela évolue peu, les partners sont ultramajoritairement masculins dans les cabinets de conseil en stratégie (relire notre article). Ce que traduisent les notes de Publicis Sapient, PMP ou SKP sur ce point (5/10, 5/10 et 5/10).
Car au-delà, les cabinets qui publient leur index restent plutôt bons élèves : avec une note moyenne de 88, ils sont en ligne avec leur index de 2021 (également à 88) et encore au-dessus de celui de 2020 (à 83). Aussi, les cabinets de conseil en stratégie restent au-dessus de la moyenne nationale, qui est à 86/100.
Sur les autres critères, les cabinets qui nous ont communiqué le détail de leur index font plutôt carton plein, avec quelques améliorations possibles sur le premier critère, les écarts de rémunérations (Publicis est à 35, SKP à 37, Eight Advisory à 38 et PMP se distingue à 40).
« Nos fonctions supports plus féminines que la moyenne du cabinet font partie de l’effectif étudié dans l’index et baissent la rémunération moyenne des femmes comparativement à celle des hommes qui sont moins présents dans ces fonctions supports », avance Katia Wagner, partner chez Eight Advisory.
Côté augmentation, elle précise que sur les 600 personnes actives au sein du cabinet, toutes ont vu leur rémunération augmenter hors attrition de personnes qui quittent le cabinet et quelques cas à part. Toutes les personnes qui restent sont augmentées indifféremment pour les femmes et les hommes. À la seule nuance près que toutes les augmentations, si elles se veulent parfaitement paritaires, varient « en fonction du niveau de performance, de l’expérience », explique Katia Wagner. Un consultant purement en stratégie aura par exemple une valeur de marché différente de celle d’un consultant en informatique.
Sans qu’il y ait pour autant 600 taux d’augmentation différents : « Il y a des tirs groupés, et des populations plus homogènes, par exemple entre deux et cinq ans d’expérience », précise-t-elle.
Et d’ajouter enfin que les congés maternité n’impactent pas l’attribution des augmentations, ce qui est le cas dans l’ensemble des cabinets qui ont communiqué cette note à Consultor. « On considère que sur une expérience professionnelle de plusieurs années, trois ou quatre mois ne changent en rien une courbe de progression. Peut-être cela serait-il le cas pour des personnes qui seraient en limite de compétences, mais nous n’avons pas eu le cas à ce jour », décrit encore Katia Wagner.
Plus fondamentalement, trois ans après sa mise en œuvre, en quoi l’index a-t-il tourneboulé les politiques de paritarisme au sein des cabinets de conseil en stratégie ?
Il a pu précipiter ou accentuer des initiatives. Comme en témoigne Virginie Debroize, la responsable de la communication chez PMP : « Ces dernières années, nous nous sommes vraiment inscrits dans une démarche de progrès. Nos candidats sont reçus au moins une fois par une femme au cours de leur process de recrutement. Une fois par an, nous invitons nos collaborateurs à échanger autour de ce sujet afin de faire émerger des idées. » Il s’agit, par exemple, des défis de la parité où les consultants et les consultantes de PMP sont invités à partager une action menée – à titre personnel, individuel, groupé – en faveur de la parité dans la newsletter interne du cabinet.
Pour d’autres, il confirme les bonnes pratiques préexistantes, mais invite à la vigilance. « Nous allons mettre en place un plan d’action pour améliorer certains aspects et rester en alerte », explique Delphine Combier, manager RH chez SKP. « Gianmarco Monsellato [le président de Deloitte France – ndlr] ne se satisfait pas des 78 de Deloitte à cet index. Il s’est engagé personnellement en faisant de la parité et du leadership inclusif l’un de ses 7 piliers stratégiques », prévient de son côté Pascale Ponroy, la directrice marketing et communication de Deloitte France.
Surtout que la parution de l’index peut avoir, au-delà de sa vertu sociale intrinsèque, des impacts business. « C’est une question qui peut être posée au même titre que les actions environnementales et les engagements RSE », appuie Delphine Combier. Ce qui pourrait être un critère de motivation supplémentaire pour certains cabinets.
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